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HARVARD COLLEGE
LIBRARY
FSOM THE BEQUBSr OF
JOHN AMORY LOWELL
OASS OP iSt;
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Ij'ABBESSE
MARIE DE BRETAGNE
ET LA. RÉFORME DE
L'ORDRE DE FONTEVRAULT
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T EN ;699,
L'ABBESSE
MARIE DE BRET
ET LA RÉFORME DE
L'ORDRE DE FONTEVR
d'après des DOCIIHËNTS INÉDIT!
ALFRED JUBIEN
AVOCAT.
ANGERS PARIS
E. BAKASSÉ, LIBR.-ËDITEUR DIDIER ET C", lœr .-éditeurs
Rue Saint - laud, 83 Quai des Augustîns, 35
M DCCC LXXlt
BO-Z. 10
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HARVARD
UNIVERSITY
LIBRARY
OCT 7 1963
^■UYr-^^
\y
En publiant cette modeste étude, notre pré-
tention n'est pas d'avoir écrit Thistoire de la
réforme de l'Ordre de Fontevrault — tâche
au-dessus de uos forces. Faire connaître un
curieux Inventaire d'objets ayant appartenu à
Marie de Bretagne, puis rappeler les principales
actions de la vie de cette illustre réformatrice,
était même, dès l'abord, notre seul désir. Mais,
séduit par Tétude de cet intéressant sujet, peu
à peu nous en sommes venu à préciser la part
que plusieurs Abbesses crurent devoir prendre
dans ces luttes ardentes, qui durèrent près de
deux siècles.
Maintenant, trop heureux serions-nous si les
nombreux documents inédits qui se trouvent
dans ce volume, pouvaient servir à l'écrivain
qui plus tard voudra présenter fidèle et com-
plète, cette longue, celle difBcile histoire.
En un mot, nous apportons une pierre pour
aider à l'édification d'un grand monument.
A. J.
Angei^, 1«' octobre 1871.
CHAPITRE I«^
MARIE DE BRETAGNE.
Marie de Bretagne, née en 1 424 dans le diocèse
de Chartres * , était fille de Richard , comte
d'Étampes , de Vertus , etc. , et de Marguerite
d'Orléans, tante du roi Louis XII. Elle eut pour
frère François II, qui gouverna la Bretagne après
son oncle Arthur III, et pour sœur Catherine, dame
d'Argiieil, femme du prince d'Orange. Marie épousa,
croit-on, vers 4438 Pierre de Rieux, maréchal de
France, mariage qui ne fut probablement pas con-
sommé, car Pierre, mourant la même année, la
laissait veuve à peine âgée de quatorze ans *.
Marguerite d'Orléans , veuve de Richard le 3 juin
iASSy se retira avec ses filles dans l'abbaye de
Longchamps , de l'ordre de Saint - François , et
située près Paris; pour se consacrer tout entière
à leur éducation. Ses efforts furent couronnés
d'un plein succès : Catherine devint « une des
» femmes les plus accomplies de son temps S > et
* Sainte-Marthe, Hist. de la maison de France, t. H, p. 505.
> Dom Lobineau, Hist. de Bretagne»
Id., ibid^
- ' * ■ -8-
Marie, veuve de Pierre de Riçux, la première réfor-
matrice de son ordre.
Dès sa plus tendre enfance, Marie donna les
preuves de son extrême bonté, de sa grande piété :
« A Paris, encore bien jeune, au-dessous
y> de quinze ou seize ans , elle avoit une telle ten-
> dresse pour les pauvres et pour les malades, que
» souvent elle pratiquoit avec ses domestiques quon
» luy amenast des personnes infectées de lèpre,
» pour les traitter et laver \ » préludant ainsi aux
fonctions de sa future dignité. Pendant tout le temps
qu'elle habita l'abbaye de Longchamps, elle garda
les habits séculiers ; ce fut plus tard, croyons-nous,
qu'elle prit le voile. En effet, une bulle du pape
Calixte III permit à Marie de Bretagne, « de l'ordre
» de Sainte-Claire, d'entrer dans celui de Fonte-
» vrault et d'y emmener avec elle les religieuses
3> qu'elle voudra ch(»isir *. »
La fille de Marguerite d'Orléans vivait en paix
dans sa douce retraite, tout entière à ses pieux
travaux, et ne prévoyant pas les peines et les
tourments que lui réservait l'avenir, quand en 1457
Arthur III, allant en Touraine rendre l'hommage
qu'il devait au roi de France pour son duché de
Bretagne, eut l'idée de faire sa nièce abbesse de
Fontevrault. A cet effet, il envoya en Anjou l'évêque
de Condom, André le Bœuf, avec mission d'obtenir
de la titulaire la résignation de cette dignité. Marie
de Montmorency y consentit en échange d'une
* H. Nicquet, Hist. de Fœitevr., p. 478.
* Angers, Archives de Fontevr., Anciens titres.
— 9 —
pension de 240 livres, à prendre sur les revenus de
l'abbaye ^ Arthur fit alors partir pour Rome Jean
Gaigne, avec mission d'obtenir les bulles de la nou-
velle abbesse ; puis , avant de quitter la Touraine,
fut avec le duc d'Orléans, autre oncle de Marie,
installer en quelque sorte le nouveau chef de
Tordre *.
Lorsque cette future réformatrice entra en fonc-
tions, la création du bienheureux Robert d'Arbrissel
était sérieusement menacée d'une dissolution com-
plète et prochaine, pour des causes que nous allons
brièvement exposer.
La volonté expresse de Robert , en fondant un
tel ordre, fut que l'homme y obéît à la femme ; soit
qu'il voulût, en agissant ainsi , réaliser les paroles
tombées des lèvres du Christ mourant : « Mère,
> voilà ton fils ; fils, voilà ta mère ; i> soit, et c'est
notre opinion, qu'il ait cru, par cette organisation,
assurer à son ordre une plus longue durée. En
effet , près de mourir , d'Arbrissel ne voyait au-
tour de lui que des moines sans inteUigence, sans
caractère , et pour lors incapables de lui succéder ;
mais , à côté d'eux , des femmes du plus haut
* Sainte-Famille, t. III, p. 559. Nous avons emprunté un
^i^d nombre de documents inédits, à ce manuscrit du P. Jean
Lardier, ouvrage qu'un obligeant ami a bien voulu mettre à notre
disposition. C'est un in-folio de 1214 pages, intitulé : f VolumelII
» de la Saincte Famille de Font-Evraud^ faict par le P.Fr. Jean
» Urdier, religieux dudit ordre, 1650, pour la bibliothèque de
» Saint-Jean-de-l'Habit, de Font-Evraud. »
' Dom Lobineau, Hist, de Bret:, U I, p. 669.
^10 —
mérite : Hersende de Champagne, le véritable archi-
tecte des bâtiments de Fontevrault, morte trop tôt
et à laquelle Une put confier que le poste de grande
prieure ; Pétronille de Chemillé, son amie, la con-
fidente de ses pensées, la collaboratrice intelligente,
énergique, de ses créations, et à laquelle, lui fonda-
teur, devait tout naturellement léguer son autorité,
sous peine de voir briser l'œuvre qu'ils avaient si
laborieusement édifiée.
Cependant cette bizarre organisation si contraire,
il faut l'avouer, aux lois de la nature, fournira plus
tard prétexte aux reUgieux pour commencer une
lutte qui durera de l'avènement de Marie de Bretagne
jusqu'en 4641 environ.
Sous le gouvernement des premières abbesses de
Fontevrault, qui presque toutes appartenaient à
des familles puissantes, les moines obéirent, ou
du moins, s'ils protestèrent, aucune trace de leurs
protestations n'est venue jusqu'à nous. L'ordre,
grâce aux mains fermes qui le dirigèrent, grandis-
sait ; le nombre des reUgieuses et des frères deve-
nait chaque jour plus considérable; les offrandes,
les donations arrivaient de tous côtés à la maison-
mère. Dans les prieurés qui en dépendaient, le même
mouvement de progrès se fit sentir ; de nombreuses
jeunes filles, riches et nobles, prononcèrent leurs
vœux et acceptèrent la règle telle que l'avait faite le
fondateur. Mais vint le moment où l'ordre, gouverné
par des femmes dont l'histoire donne à peine les
noms, et à l'existence desquelles l'écrivain conscien^
— 41
cieux ne peut qu'appliquer l'épitaphe de l'une d'elles:
€ A vescue religieusement, est morte saintement, * »
vint le moment, dis-je, où Fontevrault fut sérieuse-
ment menacé dans son existence. Ces pauvres reli-
gieuses, soit par faiblesse, soit par incapacité, lais-
sèrent tomber en désuétude le pouvoir si habilement
exercé par leurs devancières; pouvoir que s'empres-
sèrent de saisir, si non officiellement, du moins en
réalité, les religieux, alors un peu plus capables,
mais brisant par cette usurpation le pacte fonda-
mental. Dans ce nouvel état de choses, sœurs et
frères ne voulant plus obéir — l'abbesse était impuis-
sante à leur appUquer une règle qu'en sa faiblesse
elle avait violée — vont vivre en toute liberté, et ce,
je l'affirme, au grand préjudice de la morale reli-
gieuse. Quant aux prieurés, la plupart ruinés par
les guerres incessantes qui désolaient la France,
même désordre chez eux que dans la maison-mère :
le temporel et le spirituel n'existent plus. La note
ci-dessous montre du reste ce qu'avaient été ces
couvents vers 4209, et ce qu'ils étaient devenus
lorsque Marie de Bretagne prit des mains inertes de
Marie de Montmorency la crosse abbatiale *.
* H. Nicquet, Hist. de Fontevr.
' État de quelques Prieurés
En 1209.
SiiioUAi^au, 60 religieuses, 2 reli-
gieux, 2 dercg.
Ad Breoil, 52 religieuses et 9 frères.
A Saiote-Croix , 75 religieuses ,
3 clercs, 2 lais.
En 1460.
Pas de religieuses ni religieux; enl436,
un prieur ; revenu, 600 livres.
Une prieure et 4 religieuses ; revenu,
900 livres.
ni religieuses ni religieux ; le prieur
. de Saint-Aignan était prieur ; ro<
Tsna, 3,000 Uvrts,
— 42 —
Le premier acte de la réformatrice après avoir
fait constater exactement cet état de choses, fut de
solliciter du pape Pie II l'autorisation « de coupper
3> pied à ce mal, qui alloit comme im chancre, gai-
2) gnant les plus saines parties de l'ordre. » Le chef
de l'Eglise s'empressa d'accueillir favorablement
cette requête et députa en 1459 Guillaume Chartier,
évêque de Paris, les abbés de Gormeri et d'Airvaux
et le doyen de l'église de Paris, avec pleins pou-
voirs pour dresser « des Statuts et Gonstitutions
» selon qu'ils jugeroientêtre propre pour le bien do
D grand monastère et des prieurés *. »Ges députés,
après s'être fait rendre un compte exact de la for-
tune de l'ordre, furent obUgés de supprimer quel-
A L^Espinasse, 100 religieuses, Une prieure seule, demeurant à Loq-
3 clercs, 3 lais. gages, et un prieur, habitant Tou-|
louse; retenu, 800 livres.
Au Paravis, 69 religieuses, 3 prôlres, La prieure et 3 religieudes ; retenu,
I clerc, 10 lais. liSOO livres.
A Vanpillon,66 religieuses, 1 prêtre, 8 religieuses; revenu, 600 livres.
II lais.
A Saint-Laurent, 76 religieuses, 4 religieuses ; revenu, 3,000 livres.
3 religieux, 32 lais.
A Boulauc, 70 religieuses, le prieur, Vn prieur , une prieure ; revesuj
3 prêtres, 1 clerc, 31 frères lais. 1,000 livres.
A Longages, 79 religieuses, 4 reli- * La prieure et 8 religieuses ; revcauj
gieux, 4 frères lais. S,COO livres.
A Mommère, 60 religieuses, un cha- Une prieure et 7 religieuses, dool
pelain, SO frères lais. 4 guerroient pour Dieu; ud prieur {
revenu, 300 livres.
En 1389, à TEnclollre, en Gbauffuuruois, il y avait iO religieuses, le prieur
3 frères lais et 16 serviteurs. Eu 1460. un religieux et une religieuse
{Sainte Familhf X. III, pp. 800-860.)
1 H. Nicîuet, p. 473.
— 13 —
ques maisons trop pauvres pour subvenir à leurs
besoins. Ensuite, ayant par eux-mêmes constaté
l'état moral des religieuses et des religieux, ils pen-
sèrent qu'il fallait user de grands ménagements et
faire une nouvelle règle aussi douce que possible.
Afin de donner un exemple , entre autres , de leur
indulgence, disons qu'ils permirent aux religieuses
de sortir sur une simple autorisation de la prieure,
persuadés que ces sorties pouvaient apporter un
véritable soulagement à leur profonde misère.
Forte de ce nouveau pouvoir légalement obtenu,
Marie, entourée d'auxiliaires fermes et dévoués,
commence son œuvre de réformation. En 4460,
année même où le duc François II, son frère, était
venu la voir à Fontevrault , elle donna mission au
grand prieur de Saint-Jean-de-l'Habit , Guillaume
deBailleul, de visiter les couvents de l'ordre, d'y
dresser un état exact du temporel et du spirituel,
puis d'y réformer tout ce qu'il jugerait nécessaire.
Cette visite dura treize mois, mais ne produisit pas
tous les bons résultats qu'en attendait l'abbesse ^
1 Guillaume de Bailleul , « de l'illustre et florissante famille
■ des Bailleul de Paris » (B. Pavillon, p. 527), aida puissam-
ment Marie de Bretagne par sa haute intelligence et sa ferme
volonté. « Vener. religiosus , ' humilis prior Fontis Ebraldi, de
■ nobUi genus procreatus, qui nobis multa bona faecit. » (Mar-
tyrolog. Font. Ehral.) Le 11. juin 1445 Guillaume fut nommé
grand prieur après avoir été grand prieur de Tusson, où il y a
encore (dit le P. Lardier) un fort beau calice où sont ses armes.
En 1452 il fut gouverneur du château de Lerné. Trois ans après,
comme administrateur de la chapelle de Sainte-Catherine de
Barbeneuve (près Loches), il partagea avec le curé de Saint-
Senocti, Jacques Melin, • un drap de veloui* noir qui avoit esté
— u —
En 4462 elle reçut sur sa requête, du pape Pie II,
une bulle par laquelle il mandait « aux officiaux
» de Narbonne, de Tours et d'Angers, de re-
» mettre en droit et propriété dudit monastère ce
» qui a voit esté moins que duement aliéné. »
Cette même année elle ordonne « à tous et cha-
» cun des prieurs de l'ordre de comparoître, le
» 6 mai , au chapitre général qui se tenoit à Fon-
» tevrault , » espérant , dans cette réunion , faire
partager à tous ses pieuses idées. Elle envoie la
même année son grand prieur assister aux grands
» donné à ladite chapelle par M. le comte de Foix, pour estre
» mis sur la fosse de M. le vicomte de Lautrec, son frère, en-
» sépulture en ladite chapelle. » (Angers, Archives de Fontevr.,
carton Barbeneuve.) Il visita plusieurs fois, à titre de commis-
saire apostolique, les couvents de son ordre. Le pape lui accorda,
par diverses bulles, l'autorisation d'accepter dix riches béné-
fices, ce qui explique toutes ses libéralités.
Comme grand prieur, Guillaume de Bailleul acheta en 1460
c un baston pastoral pesant 5 marcs 1/2 d'argent. Ayant fait
» racommoder celui de son prédécesseur, il y fit mettre une
» dent de saint Christophe, à quy il estoit fort dévot , U fit
» faire les chaires du chœur de l'Habit, pourquoy on s'est obligé
» à un anniversaire à perpétuité. A fait faire les bancs et tables
» du réfectoire, les pilliers massifs du cloistre, douze chanabres
» au dortoir, et la danse Macabre en peinture, quy lui cousta
» 27 livres, n fit faire le chef de saint Nicolas de sa vaisselle
» d'argent, et y mit une relique dudit saint, dont il fust guerry
» miraculeusement des gouttes. H fit faire le cloistre de la Mag-
» delaiue. ■ (Paris, Bibliothèque imp., Cartulaire de Fontevr.^
t. I, folio 521.) Le Père Sébastien Ganot, sous-prieur, fit fondre
en 1633, pour faire six cloches en ut, ré, mi, fa, sol, la , « deux
B superbes et riches colonnes, et deux anges, le tout de cuivre,
» tenant chacun un chandelier en main, avec les armes de
• Guillaume de Bailleul, lesquels estoient aux deux costés de
• l'ancien maistre autel. • Vandale de Père Gasnot !! {Sainte-
— 15 —
jours d'Anjou. En 4463 le prieur de Relay ne veut
pas reconnaître son pouvoir, et proteste. Marie sol-
licite alors, et obtient de Paul II une bulle enjoi-
gnant à l'abbé d'Orvaux de connaître du différend
existant entre Tabbesse et ce frère, nommé Jean
Busche, différend qui se termina à l'avantage de cette
princesse. Elle fit ensuite lever sur tous les prieurés
la somme nécessaire pour obtenir de Rome la con-
firmation des privilèges de l'ordre, et cessa de
payer aux papes deuxbesants de cens, qu'ils perce-
vaient sur l'abbaye depuis 1249*. Enfin^ dans le but
Famille, t. IH, p. 681.) Dans le vitrail d'une fenêtre d'une cha-
pelle de la grande église, on voyait le portrait de ce personnage ;
il était à genoux aux pieds de sainte Ancildis.
On ne connaît pas au juste l'année de sa mort, qui toutefois
arriva après 1490, car j'ai vu sous cette date un bail de lui.
Guillaume de Bailleul fut enterré dans le chapitre de Saint-
Jean-de-l'Habit, « où sont encore sa tombe et sa figure, avec de
• nombreuses inscriptions latines. »
U existe à Paris (Bibliothèque impériale) un superbe sceau de
ce religieux. Au milieu, saint Jean, debout ; à sa droite, un ange
portant les armes des Bailleul; à sa gauche, un évêque ; aux
pieds de saint Jean, un moine à mi-corps, un bâton pastoral à la
main ; à droite et à gauche du moine, deux aigles éployées ;
autour, l'inscription : SigilL Guillelm, de Bailleul, prioris Fon-
lis Ebravdi,
Un moine du nom de Philippe de Bailleul fut en 1458 receveur
de ITiôtel de Rets, prieur du couvent des Cerisiers jusqu'en 1483,
puis en 1501 secrétaire du Grand -Moutier de Fontevraud. (An-
gers, Arch. de Fontevr._, Invent, des titres, t. VI, pp. 39 et 87.)
Colette de Bailleul , femme de noble homme Jean de Cre-
milles , seigneur de la Giraudière ou Girardière , vend au
couvent de Saint-Jean-de-l'Habit, en 1494, 46 s. de rente sur
cette propriété, (/rf., ibid., t.VI, p. 56; et Anciens titres, n® 790.)
Ces deux derniers étaient probablement frère et sœur de
Guillaume.
i Sainte-Famille, t. III, p. 469.
— 46 —
de surexciter encore le zèle de son troupeau, elle
fonda la confrérie de Saint-Gabriel. Pleine d'ardeur,
cette abbesse allait, quand la nécessité l'exigeait,
visiter ses maisons accompagnée de religieuses
dévouées. Ainsi, en 1471, elle demeura huit mois à
Orléans, qu'elle ne s'empressa de quitter que pour
courir à l'Encloître, couvent où la maladie sévissait
avec violence, prodiguer les soins, les consolations
d'une véritable mère ^
Ce fut aussi l'année 1471 que plusieurs reli-
gieuses et moines, ne trouvant pas cette première
règle assez austère et voulant s'imposer une plus
étroite observance de la vie religieuse, décidèrent
Marie à délaisser Fontevrault, dont presque tous
les membres se contentaient de cette douce réfor-
mation, pour la Madeleine-lez-Orléans, qu'elle ne
devait plus quitter. La noble fugitive emmena six
compagnes qui toujours l'avaient entourée : Jeanne
de Marigny, Marguerite de Beaumont, Jeanne des
Loges, Jeanne delà Rivière, Marie le Jeune et Marie
Groussouin, auxquelles, en récompense de leur fidé-
lité et des services rendus à l'ordre, elle donna une
pension à prendre sur les revenus de sa propriété
privée, le château Fromont, près Nantes. Ces pen-
sions, à la mort des titulaires, devant faire retour à
l'abbaye, formèrent plus tard ce qu'on y appelait
rentes sur le domaine de Nantes '.
La Madeleine d'Orléans , lors de l'arrivée de
Marie et de son petit troupeau, se trouvait dans un
* Sainte-Famille.
« Angers, Archives de Fontevr, .
- 17 -
état déplorable. Ce prieuré avait été presque entiè-
rement détruit le 30 décembre 4438, lors du siège
d'Orléans par les Anglais ; aussi s'empressa-t-elle
« de faire construire tout à neuf, tant l'église des
» religieuses que des religieux, les cloistres, les
» édifices et laclosture ; » en ayant soin d'éta-
blir une séparation entre les sœurs et les frères, ce
qui n'existait plus depuis longtemps.
A peu près convenablement installée, l'abbesse
va tenter d'imposer une seconde fois la réforma-
tion, à l'aide d'une règle fixe, stable, et plus en
rapport avec l'intention du fondateur *. Dans ce but,
1 La Madeleine-lez-Orléans.
Vers 1113 Robert d'xVrbrissel , faisant construire le prieuré
de Tusson, fut invité par Jean H, évéque d'Orléans, à venir
prêcher dans sa ville épiscopale. Le célèbre prédicateur s'em-
pressa d'accepter cette invitation, et séduisit tellement la popu-
lation par son éloquence, qu'elle supplia l'évêque d'abandon-
ner au nouveau fondateur les bâtiments d'un hospice destiné à
lecueillir les pauvres filles étrangères, bâtiments situés sous les
murs de la ville, au faubourg Saint-Laurent, pour que Robert y
établisse un couvent de son ordre. Jean II, du consentement de
son chapitre, obtempéra aux désirs de ses diocésains, et par une
chartre non datée, mais qui doit être de 1115, donna cette
maison à l'ordre de Fontevrault. Plus tard, quand les reliques
de sainte Madeleine y furent déposées, l'ancien hospice reçut
le nom de cette sainte. (B. Pavillon et Angers, Archives de
Fontevr.)
La donation de Jean fut confirmée en 1123 par le roi Louis le
Gros , et en 1182 par Manassès , dit de Garlande , 68e évéque
d'Orléans.
La première prieure de cette maison, Marsilia Riveria, en
1135, « prit à cens la place de Saint-Aignan d'Orléans, qui
» avoit du côté du cloistre , 128 pieds ; vers Saint-Mesmin, 86
» I»ieds ; de la voye publique vers Saint-Mesmin, 84 pieds, à
* condition de payer tous les ans 23 deniers de cens, durant la
— 18 —
elle prescrivit à quelques-uns des moines intelligents
et instruits qui étaient près d'elle , de réunir sous
forme de recueil les observations des visiteurs et
réformateurs apostoliques, les constitutions et sta-
tuts du bienheureux Robert, les règles de saint
Benoît et saint Augustin. Ensuite elle chargea des
religieux appartenant à différents ordres, de faire
sortir de ce premier travail une règle définitive ,
» messe de Saint- Aignan. » (Angers^ Archives de Fonte vraull.)
En li65 Louis le Jeune lui fit don « de la dixmedu pain et du
» vin qui sort de la table du Roy et de la Royne, quand ils sont
s à Orléans. » (Id., xbid.)
Philippe- Auguste, en 1189, « donna au couvent de l'hospice
» de la Magdelaine d'Orléans, le droit de chaufiFage de 2 chartées
» de bois, par chacun jour, en la forest d'Orléans, à présent
B (1650) converty en argent sur le domaine du Roy. à [Sainte-
Famille, t. m, p. 367.)
En 1207 Etienne de Lié donna une maison à ce couvent.
Le roi saint Louis, en 1248, « donna à l'hospice d'Orléans (qui
9 s'appelle mauitenant le couvent de Sainte-Madgdelaine) ,5 s.
• parisis par chacun jour de l'an, à perpétuité, et qui sont encore
9 payé maintenant (1650), à quatre termes, sur le domaine
» d'Orléans, à 114 livres. » (Idem, t. III, p. 468.)
Mathilde d'Anjou, deuxième abbesse (1149 à 1154), étant à vi-
siter ce monastère, fit, à la pressante requête des religieuses,
bâtir paroisse de Saint-Pierre de Meung une chapelle nommée
aussi la Madeleine. Elle acheta la moitié du moulin de la Ni-
velle, près cette chapelle, et donna plus tard 100 s. parisis pour
réparer les graves dégâts survenus à ces moulins. La chapelle de
la Madeleine était , par sentence du 23 février 1483^ exempte de
toute juridiction et droit de cure de Saint-Pierre de Meung.
Elle lut reconstruite en 1632. (Angers, Archives de Fontevr.)
Le monastère de la Madeleine-lez-Orléans, malgré tant de
libéralités royales, était encore fort pauvre, vu le grand nombre
de ses religieuses. < Simon, légat du Saint-Siège et cardinal de
9 Sainte-Cécile, exposa en 1275, devant le pape Grégoire X, au
concile gênerai de Lion, que le couvent de la Magdelaine d'Or-
— 19 —
•
qu'elle s'empressa, mais un peu trop vite, d'appli-
quer au couvent de la Madeleine. En 1474 elle
présenta une requête au pape Sixte IV, pour en
obtenir la confirmation. Le chef de l'Église s'em-
pressa, comme l'avait déjà fait, en 1459, un de ses
prédécesseurs (Pie II), de députer, par une bulle
du 28 avril 1474, l'archevêque de Lyon, qui se fit
remplacer par Jean Berthelot, ceux de Bourges et
» léans consistoit en 180 personnes religieuses, tant de Tun que
" de l'autre sexe, qui vivoient si austerement qu'elles n'avoient
>» de légumes et de vin qu'aux jeunes solennels de TAvent et
i Caresme, et aux autres jours usoient de pain et d'eau seule-
» ment ; et qu'une partie alloit mendiant de porte en porte.
» Ensuite de quoi le dict couvent fut exempté du payment des
» subsides exigés par le Saint-Pere sur l'Eglise, pour les guerres
» d'Outremer. » (Sainte-Famille, p. 487.)
Ce monastère fut à peu près détruit le 8 octobre 1428, lors du
siège d'Orléans paV les Anglais. Mais Marie de Bretagne, nous
l'avons déjà dit, le réédifia presque entièrement quand elle vint
l'habiter.
Vers la fin du xv« siècle le confesseur du roi Charles VIII,
Jean de Relly, évéque d'Angers, qui avait une nièce religieuse
dans cette maison, y donna un riche reliquaire d'argent, conte-
nant une partie de l'épaule de sainte Madeleine , à la condition
de dire pour lui et les siens une messe à. perpétuité. (S. Guy on,
Hist. de Végli&e d'Orléans.)
L'an 1562, pendant les guerres de religion, l'église de ce cou-
vent fut complètement détruite (la Madeleine comptait alors
33 religieuses de chœur et 6 converses), il n'en resta que les
quatre murs ; aussi célébra-t-on les offices dans la sacristie jus-
qu'en 1609, époque où l'église fut réédifiée par le couvent, et
surtout à l'aide des largesses de M. Pierre Fougeau, sieur des
Cures, conseiller du roi, et intendant des turcies et levées. Il fit
construire à ses frais le dortoir, comme le constatait une ins-
cription en lettres d'or, placée dans ce lieu.
En 1623, sous le second priorat de sœur Madeleûie Martin, le
tloitre fut rebâti à l'aide des deniers donnés par M. Jean Begon,
I
— 20 —
de Tours, les abbés de Cormeri et de Saint-Lau-
mers de Blois, avec faculté à l'abbesse de choisir
deux députés. Marie désigna Guillaume de Bailleul
et fr. Chaumart, prieur de Saint-Lazare.
Le pouvoir de ces commissaires apostoliques
était fort étendu, absolu même : ils ajoutaient,
corrigeaient, retranchaient ce que bon leur sem-
blait à la règle déjà faite, puis devaient « en dresser
2> un volume authentique, revêtu de leurs sceaux, j»
sieur d'Asenes, conseiller du roi et trésorier général de France
au duché d'Orléans. Un marbre placé dans le cloître mentionne
cette libéralité du sieur d'Asenes, père d'une religieuse, Made-
laine, prieure en 1636. (Angers, Archives de Fontevr.)
Le 14 juillet 1614 Louis XIII, sortant d'Orléans pour aller aux
Pays-Bas, fut visiter la Madeleine et y entendit la messe. (Ibid.)
Nous possédons sur cire rouge un petit sceau de ce monastère :
il est rond ; au milieu, Madeleine debout, tenant un vase à la
main ; autour, l'inscription : La Magdelaine.
Ce prieuré, l'un des plus importants de l'ordre, a été presque
entièrement détruit pendant la révolution. M. de Vauzelles, an-
cien premier président de la Cour impériale d'Orléans, y fit bàtii
vers 1835 une maison habitée aujourd'hui par son fils , conseil-
ler à la même Cour, et qui se propose de publier incessamment
la monographie de ce lieu, où reposa le corps de Marie de Bre-
tagne.
Voici les noms des principaux Prieurs de la Madeleine :
Odo Rufin, du temps de Pétronille, l»"" abbesse ; il était encore
prieur en 1161. — 1176, Robert. — 1195, Barthélémy. — 1202,
H***. — De 1368 à 1375, Adam de Meaux, Jean Molin, Nicolas le
Picart. — 1404 et 1411, Adam de Congy. — 1441 et 1447, Jeiui
Olivier. — 1466, Jean Gamauld , mort en 147 L — 1467, Benoit
Preud'homme. — 1472, Pierre Brassart.
En 1474 Guillaume Sauvage, Nicolas de Velly, Pierre Raymo-
net et Guillaume Roger furent les seuls qui acceptèrent la ré-
forme. Il y eut toujours douze religieux à ce couvent, jusqu'en
1562, moment où la maison fut détruite. (Angers, Archives de
Fontevr.)
— 21 —
Ce qui fut ponctuellement exécuté. Ces graves pré-
occupations n'empêchèrent pas Marie de surveiller,
du mieux possible, ses prieurés, même les plus
éloignés. « En 1474 elle reçut information de dame
> Thérèse de Cucmons, admirale d'Espagne, contre
> Catherine-Alphonse , prieure de Sainte-Marie de
> Vega de la Serana, en Espagne. i> Aussitôt elle
donna une commission à l'abbé de Saint-Claude,
prieur de Villeneuve (Espagne) , pour examiner les
A ces noms , nous ajoutons ceux de quelques mères
Prieures :
1135, Marsilia Riveria. — 4167, Idonea. —1176, Helvidis. —
1202, V***. -* A la fin du xp siècle, Agnès» de Courtenay, fille de
Pierre de Courtenay, et petite-fille du roi Louis le Gros, fut reli-
gieuse à la Madeleine (Sorize , p. 209). — 1404, Magdelaine de
Casne. — 1460, Jeanne de Parthenay, nièce de Jeanne de Sou-
bise ; elle était fille de Jean de Parthenay, noble du diocèse de
Poitiers. M«n« Marie de Harcourt lui donna le voile à Fontevrault,
en 1451. Après avoir été prieure de la Madeleine, elle le devint
successivement de Foicy et de Bonneuil ; elle mourut en 1499.
(Sainte-Famille, X. UI, p. 532.) — 1504, Anne de Théligny. —
15(fô, Marie Beaufils. — 1528, Jeanne des Comptes ; il y avait
alors 66 religieuses. — 1539, Marie Mairat. — .1546, Magd. de
VAubespine. — 1564, A. le Febure. — 1566, Eléonore de Bour-
bon, qui fut la trentième abbesse de l'ordre. — 1575, Marie
Vaillant. — 1580, Michelle le Vassor. — 1586, Marie Serin (ou
Sain). — 1592, Charlotte Prieur. — 1597, Sœur Damilli. — 1601,
Charlotte Prieur. — 1604, Espérance Nourry et sœur Magdelaine
Stanapier. — 1608, Suzanne de Mecastel. — 1611, Marthe Ri-
botieau. — 1616, Magd. Martin. — 1619, Anne Luillier. — 1622,
Magd. Martin. — 1625, Marie Ronflard, six années. — 1631,
Augustine de Basche. — 1634, Anne Luillier. — 1636, Magd.
Begon, six années. — 1679, Marie de l'Amyrault. — 1721, sœur
Froissart. — 1730, sœur Cousinet. — 1738, Elisabeth de Beausse;
(Angers, Archives de Fontevr.)
i
- 22 —
dires de la dame de Gucmons et déposer, s'il y avait
lieu, la prieure ^
Le 23 juillet 1475 les religieuses et religieux de
la Madeleine acceptèrent la nouvelle règle. La
première prieure élue sous Tempire de ces consti-
tutions, fut sœur Antoinette Cendre. Peu de temps
après, deux autres prieurés, Fontaine-en-France ' et
1 Sainte-Famille, p. 565. — Le prieuré Sainte-Marie de
Véga, diocèse de Léon, ayant été séparé de Fontevrault en 1479,
lui paya un marc de subside. U avait été donné à rordre en
1125, par Alphonse, empereur d'Espagne, et par sa femme Be-
rengère. (Angers, carton Espagne, pièce n» 4.) t En 1138,
» 5 octobre, bulle du pape Innocent II (à Saint-Jean-de-Latran),
» contenant confirmation à Fontevraud du monastère de Vel-
p gua, avec Teillar et Albunes, donnés par Urraque et par le roi
» Alphonse. » (Même carton, pièce n* 6.)
* Le couvent de Fontaine-'en'-France, situé dans le diocèse
de Meaux, fut fondé en 1124 par Thibault, comte de Brie et de
Champagne. Bouchard, évéque de Meaux, ayant obtenu de ce
personnage les meubles du prélat dernier décédé, et qui étaient
la propriété du comte, les donna à ce monastère. En 1225 le
légat du pape accorda des indulgences à ceux qui feraient des
aumônes aux religieuses de Fontaine, pour réparer leur église,
presque détruite. Ce prieuré devint très-riche. En 1782 il avait
40,000 livres de rentes , et seulement 30 religieuses. Antérien-
rement leur nombre avait été plus considérable , car en 1668 il
s'élevait à 78, tant dames de chœur que novices. Ces religieuses
envoyaient chaque année, comme aumône, 18 setiers de fro-
ment à l'Hôtel-Dieu de la ville de Meaux.
Noms de quelques Prûjwres ; 1499, Marguerite de Boisjourdan.
— 1508, Marie de Mareil. — 1564, Jacqueline d'Anne! . —
1578, Renée le Petit. — 1638, Jeanne du Buisson. — 1713, sœur
Briconnet. — 1727, sœur de Baussan. — 1731, sœur de la SaDe.
— 1736, sœur Cousinet. (Angers, Arch. de Fontevr., carton
Fontaine'en''France. — De Bréquigny, t. V, p. 32. — Pavillon,
Hist de Robert d'Arbrissel, p. 466, et Saintê^FamiUe.)
— 23 —
Chaize-Dieu \ imitèrent la Magdelaine; puis,en 4479,
les délégués du Saint-Père rendirent, par décret,
* Chaize-Dieu , prieuré situé paroisse du même nom ,
SUR l'Yton, diocèse d'Evreux.
En 1132 Richer de l'Aigle ayant donné à des ermites gou-
vernés par Hugues du Désert, une terre dans sa forêt de l'Aigle
pour y construire un couvent et une église, Hugues et ses
frères transmirent deux ans plus tard (1134) cette maison à
Tordre de Fontevrault, et des religieuses vinrent l'occuper vers
H38. A douze kilomètres de ce nouveau couvent s'en trouvait un
autre qui en 1208, après la donation qu'en firent le prieur Henry
et les frères Durand, Richard et Raoul, ne forma qu'une seule
maison, sous le nom de Chaize-Dieu, avec celle donnée à l'ordre
en 1134. (Pavillon, Hist. de Robert d'Arbrissel, p. 188.)
Hugues du Désert contribua puissamment à établir plusieurs
des nouveaux prieurés de la pieuse institution fondée par d'Ar-
brissel.
En 1209 Gilbert de l'Aigle, sa femme Elisabeth, leurs fils Gil-
bert et Richer, confirmèrent le don fait par leurs père et grand-
père. {Id.yïbid., p. 575.)
Les seigneurs de l'Aigle abandonnèrent aussi à Chaize-Dieu
une terre noble nommée Nogent-le-Sec , des rentes, soixante
acres de bois dans leur forêt, et, chaque année, mille harengs.
Les armoiries de cette famille se voyaient sur la grande porte du
monastère ; dans l'église existaient les tombes de deux dames
de l'Aigle ; et, sur l'une d'elles, cette inscription : « Hic jacet
» Odelina, domina de Aquila, filia comitis de Sancta-Suzanna. »
(Angers, Archives de Fontevr., carton Chaize-Dieu.)
- L'an 1279 Robert, seigneur de Fontenilles, donna des prés,
des bols situés dans son fief de Courteille et Petiteville. Les
seigneurs de Cheranvillié, de Cherné et d'Ecublé firent aussi
d'importantes libéralités à ce monastère. Les religieux de
Conches, en Normandie, contribuèrent également à la fondation
de Chaize-Dieu. {Ibidem.)
m
Ce prieuré devint si peuplé, qu'on dut répartir les religieuses
dans trois autres maisons : à Clairruissel, Foumuchon et Aquiny,
toutes da diocèse de Rouen. Chaize-Dieu, quoiqu'ayant été un
des premiers couvents réformés , fit néanmoins souvent une
— u —
cette réforme obligatoire pour tout l'ordre de Fon-
tevrault*.
Marie de Bretagne, brisée de fatigue, usée avant
l'âge par les émotions d'une vie aussi agitée, mou-
rut le 19 octobre 4 477, âgée de 53 ans et vénérée
de tous ceux qui l'avaient connue. A peine eut-elle
fermé les yeux, que les religieuses de Fontevrault
et de la Madeleine se disputèrent le bonheur de
posséder son corps. Après de longs débats un ar-
rangement se fit le 20 octobre 4477, par lequel les
parties consentirent, mais jusqu'à nouvelle décision,
à laisser les restes de la grande réformatrice là même
où elle avait expiré '.
opposition très-vive à la maison-mère. Ainsi, en 1523, Renée de
Bourbon ordonna de visiter ce prieuré, mais^ les religieuses re-
fusant de recevoir le visiteur, l'abbesse aussitôt opéra la saisie
du temporel de la maison , et , devant cette mesure, on céda.
[Ibidem.)
Noms de quelques Prieures : 1444, Louise d'IUerins. — 1499,
Georgette Stuard. — 1504 et 1523, Jeanne Dumont. — 1526,
Renée des Barres. — 1541, Anne de Thieuville. — 1667, Marie
de Bretignières. — 1696, Magdelaine de Combelon. — 1711 , de
Cheveitre d'Haboville. — 1720, Angélique d'Osmond. — 1722,
le Cornu de Balivière. — 1727, sœur de Balivière. — i731,
Anne d'Osmond. — 1735, de Boucey de Nocey. f Ibidem.)
^ Nicquet, Hist. de Fontevr., p. 340.
* Acte fait après sa mort: « A tous qui, etc Antoine
» Roillau, licencier ez lois, garde de laprevosté d'Orléans, saluU
» Comme très vénérable dame Marie de Bretagne, abbesse de
» Fontevraud, soit allée de vie à trespas dans son couvent la
> Magdelaine-lez-Orleans , le 19 octobre , après lequel ti'espas
» S"" Jeanne de Maurrigny, celeriere de Saint-Benoist, et S^ Mar-
» guérite de Beauvau, prieure de Saint-Ladre, lesquelles, avec
» ladite abbesse, estoient naguère venues aud. couvent, reque-
• rans que le corps de lad. abbesse fust [porté à Fontevraud
— 25 —
Le duc François, frère de Marie, ordonna à sa
cour de prendre le deuil de celle qui fut non-seule-
ment une illustration pour Fontevrault, mais aussi
» pour y estre mis en sépulture, ainsi qu'elle desiroit, que de
■ raison se devoit faire. Les prieure, S" et couvent du dit prieuré
» de la Magdelaine disant, au contraire, qu'attendu qu'elle estoit
» trespassée aud. couvent de la Magdelaine, elle y devoit estre
» enterrée et demeurer. Scavoir faisons que lesd. parties, à scavoir
» lesdites celeriere de Saint-Benoist et prieure de Saint-Ladre,
» avec elles S"^» Marguerite de Montejean , Antoinette de la
» Rivière, Jeanne de la Gauberderie, Marie d'Almagne et Louise
» de Marconnay, toutes religieuses dud. monastère de Fonte -
» vraud, d'une part, et lesd. prieure. S" et couvent dud. prieuré
» de la Magdelaine, d'autre part, assemblées aud. prieuré en
» la présence de Louis Serin, clerc notaire juré du Chastellet
> d'Orléans, à ce appelle et requis, ont reconnu et confessé
» avoir approuvé sur ce que dit, et en telle manière que le corps
» de la Reverande mère abbesse sera mis en terre aud. couvent
X de la Magdelaine, au chœur des sœurs encloses, sans que la
» fosse soit dessus pavée, jusqu'à ce qu'il soit advisé où led.
» corps doit estre et deument ensepulturé'; et se trouve est que
» de raison led. corps doit estre porté en lad. abbaye de Fonte-
" vraud, lesd. prieure, religieuses et couvent de la Magdelaine
» le laisseront librement emporter; et s'il doit demeurer aud.
» couvent de la Magdelaine, pourront lesd. prieure et couvent
» faire paver sur led. corps et y faire mettre et asseoir telle se-
» pulture que bon luy semblera ; en suppliant par lesd. parties,
» au duc de Bretagne et à Madame la duchesse d'Orléans, pro-
» chains parents de lad. deffuncte, que ce qui sera trouvé devoir
» estre fait en cette matière soit exécuté le plus honorablement
» que faire se pourra.
» Promettant lesd. parties, et chacune d'elles à son regard et
» bonne foy, par devant led. notaire, entretenir led. appointement
» selon sa forme et teneur. En témoin de ce, nous, au relay
» d'icelluy notaire , avons fait sceller ces présentes lettres du
» scel aux contrats de lad. prevosté. Ce fut fait et accordé aud.
• couvent de la Magdelaine, le lundy 20 octobre 1477.
Signé : « SERIN. »
[Sainte^Famille, t. III, p. 566.)
3
— 26 —
pour la Bretagne *, et de laquelle on a pu dire avec
justice :
« Abiit, non obiit; dissessit, non decessit. »
Les armes de Marie de Bretagne, étaient : d'her-
mine au lambel d'azur, semé de fleurs de lys d'or.
I Extrait du deuxième compte de P. Landoys, trésorier et
garde-robier du duc :
« Octobre 4477. Pour le duc, une robbe et chapperon de be-
• guin, pour le trespas de feue Madame sa sœur, Tabbesse de
j) Fontevrault, 5 aulnes de fin noir* Au sire de Qisson, pour
9 robbe et chapperon de béguin, pour feue Madame de Fonte-
» vrault. A Messire Dolus, pour robbe et chapperon de béguin,
9 pour la mesme. A la petite dame sœur dudit Messire Dolos,
9 pour une robbe de dueil à grant queue. » (Dom Lobineau.
t. II, p. 1502.)
II existe à la Bibliothèque Impériale un portrait de Marie de
Bretagne, mais sans caractère et tout de fantaisie ; c'est pour-
quoi nous n'avons pas cru devoir le reproduire en tête de ce
travail.
ANNE D'ORLÉANS.
Si la première réformatrice de Fontevrault ne
put voir l'entière réalisation de ses projets, elle
légua du moins à celles qui vinrent après elle l'obli-
gation de continuer son œuvre. Nous constaterons
que plus la résistance sera grande, plus les efforts
pour la vaincre seront énergiques, persévérants.
Quelques-unes de ces remarquables religieuses ne
reculeront devant aucun obstacle pour atteindre
un tel but; et l'ordre, enfin remis par leurs soins
dans sa voie primitive, vivra de nouveau, puissant,
estimé, jusqu'au jour où, comme tant d'autres, il
disparaîtra sous la tourmente révolutionnaire.
Anne d'Orléans, sœur de Louis XII, proclamée
abbesse à l'unanimité, marcha sur les traces de
Marie de Bretagne, sa cousine-germaine. Le pape,
les rois Louis XI et Charles VIII faciUtèrent, par
leurs bulles et leurs dons, l'accomplissement de la
tâche de la nouvelle élue. Sixte IV, en 1483, pen-
sant que les moines de cet ordre avaient sans doute
encore besoin de sérieux ménagements, les dispensa
de l'office canonial et des jeûnes de l'ÉgUse, sur
simple avis de médecin et de confesseur *. Cette
* Héliot, Hist, des ordres relig., t. VI , p. 96,
— 28 —
même année il accorda à Tabbesse la permission
d'élire un confessent* pour absoudre tous les cas
réservés au Saint-Siège. Une autre bulle Tautori-
sait, elle et ceux ou celles sous sa dépendance, à
manger « lacticines et chair en caresme, » du con-
seil du médecin ou du confesseur. Puis il permit à
Anne « de faire dire la messe sur un autel portatif,
j^ dans un lieu honneste, par tel prestre qu'elle
» advisera \ » Louis XI, le 15 octobre 4479, con-
firma tous les privilèges de Tordre *. En 1483 le
roi de France, comme son prédécesseur, concéda
cette même faveur et donna à Fontevrault le mo-
nastère des Filles-Dieu de Paris, fondé par saint
Louis, mais qui malheureusement n'avait plus à cette
époque Taustèrité des premiers jours. Charles VIII
ne se contenta pas de se montrer généreux envers
Fontevrault, il vint en 1487, avant de se rendre à
Nantes, demander l'hospitalité à la sœur de
Louis XII, montrant par là le vif intérêt qu'il portait
à cette princesse '. Aussi Anne d'Orléans put-elle
introduire la réformation dans trois de ses prieurés :
l'Encloître en Gironde * — Foicy en Champagne
— Variville en Beauvoisis — et faire reconnaître
son autorité par les monastères les plus éloignés ;
à ce point qu'en 1486 Alière Fischer , prieure
t Sainte-Famille, t. HI, p. 570.
• Angers, Archives de Fontevr.
• Dom Lobineau, Hist. de Bret., t. I, p. 763.
• L'an 1488 , Anne donna 10 livres de rente à ce prieuré,
pour célébrer le 4 janvier de chaque année les anniversaires du
duc d'Orléans et de sa femme, ses père et TCiQte.^Sainte'Familk,
t. m, p. 572.) .
— 29 —
d'Ambresbury S lui envoya, en signe de soumis-
* Ambresbury , monastère bâti vers 98© par Elfride, belle-
mère de saint Edouard, était situé dans le comté de Wiltshire,
sur une petite rivière, près la ville de Salisbury.
Henri II en chassa les trente religieuses, « qui se gouvernoient
1 mal, » et le donna à Audeburge, troisième abbesse, qui envoya
des sœurs en prendre possession. Une des premières prieures lut
Jeanne de Genis. — Aliéner, nièce du roi Jean sans Terre, y fut
enterrée. (Sainte-Famille, t III, p. 350.)
Il y avait en 1256, dans ce prieuré, 77 religieuses de chœur,
7 chapelains et 16 frères convers. — On y trouvait aussi 59 Char-
tres, tant de rois que d'évêques et autres ; 4 calices, 2 coupes,
2 croix, 2 encensoirs d'or et d'argent ; et, comme réserve alimen-
taire, 200 bœufs, 20 porcs, etc. (Angers , Archives de Fontevr.,
Invent, des titres, t. VI, p. 609.)
L'ordre de Fontevrault possédait encore en Angleterre les
prieurés suivants :
Etonne, diocèse de Coventry, fondé par Robert, comte de
Leicester ; en 1256 il y avait 86 religieuses (Sainte-Famille^
p. 476, et Pavillon, p. 576) ; — et Wert-Woode.
Les souverains d'Angleterre de la maison d'Anjou-Planta-
genet furent très-généreux envers l'abbaye de Fontevrault. Lés
nombreuses rentes qu'ils avaient constituées en sa faveur n'ont
pas cependant toujours été régulièrement payées, car Blanche
de Harcourt, vingt-deuxième abbesse, se vit obligée d'user de
la protection du ^oi Charles VI, son cousin-germain, pour en
toucher les arrérages. Nous avons même retrouvé la lettre que
ce monarque écrivit à ce sujet à Richard II, son gendre :
« A très hault et puissant prince R., par la grâce de Dieu roy
' d'Angleterre, nostre très cher et très amé filz, Charles, par
» ycelle mesme grâce, roy de France, salut et parfaicte dilection.
» Très cher et très amé filz. Blanche de Harcourt, abbesse de
» Fontevraux, vostre et nostre cousine i, nous a faict exposer
» comment vos prédécesseurs roy s d'Angleterre, dont les corps
» gisent en l'église dudit lieu, donnèrent et aumosnerent à
» l'augmentacion de la fondation des dictes église et abbaye
^ Blanche de Harcoort, fille de Jean II, comte de Harcourt, et de Cathe-
rine de Boarbon, fat ahbesss de 1391 1 1431 .
— 30 —
sion, un anneau d'or garni d'une améthyste, et
» et pour le salut des âmes d'eulx et de leurs successeurs, cent
» marcs d'argent de rente annuele et perpetUele, à les prendre
» et avoir par la manière que ensuyt ; c'est assavoir : LX marcs
» sur la ferme de vostre ville de Londres, quarante marcs sur
» la ferme de la cité de Wicester, et cinquante solz d'esterllins
» sur vostre eschiquer, dont plusieurs arrérages sont deuz ; et
» pour tant, très cher et très amé filz, que la dicte abbaye,
» laquelle est de fondacion royale, a esté tellement opprimée
» par le faict et occasion des guerres, que à présent vostre et
» nostre dicte cousine, et les religieuses d'icelle abbaye, ne
• peuvent bonnement avoir leurs nécessitez ne supporter les
» grans fraiz et charges qu ils ont à soutenir et faire, à cause
« des maisons et édifices qui sont aussi, comme touz, deperiz el
■ cheuz en ruyne ; par quoy le divin service, qiii est faict et
» célébré dans la dicte église pour le salut des araes de vos
» dictz prédécesseurs et autres, pouroit estre delaissié ou dimi-
> nué très grandement.
» Vous prions et requérons très instamment, et de cuer , très
» cher et amé filz, que pour amour et contemplacion de nous
» et des choses dessus touchées, vous vueillez vostre et nostre
j» dicte cousine faire paier et contanter des dictz arrérages, et
» aussi la dicte rente, doresnavant. Et avecques ce, ordonner et
B faire que certaines églises, prieurez et maisons assises en
» vostre royaume, desquelles et des religieuses, prieuses, prieurs
» et gouverneurs d'icelles, la visitacion, correction, punicion,
» institucion et destitucion lui appartient à cause de la dicte
» abbaye, elle puisse doresnavant visiter et faire visiter, y mettre,
» instituer, destituer, ester, punir et corriger, comme il appar-
» tiendra, les religieux et religieuses d'icelles, ainsi et par la
• manière que ces prédécesseurs l'ont faict et accoutumé de
» faire en temps passé, paravant les dictes guerres, et qu'elle
» le faict es aultres prieurez et lieux de sa religion estans en
» nostre royaulme.
» Et en ce, très cher et très amé filz, vous ferez, se nous
» semble, vostre devoir, le bien et proufit de la dicte église, et,
» à nous, parlaicte plaisance. Et en vueillez tant faire, que nous
» et elle vous en soions et doions estre tenuz, et que elle puist
9 appercevoir nos prières lui avoir valu envers vous.
» Dofiné à Paris, le XXUI* de mars. :»
— 31 —
une bourse de soie à l'œuvre d'Angleterre \
Anne d'Orléans légua en mourant, à son ordre,
des joyaux précieux, des vases d'or et d'argent, et
Au dos est écHt : « Ytem, sur l'Eschiquier de Londres ,
» L solz d'esterUins que donna Jehan, roy d'Angleterre, filz de
» la royne Alienor, et les donna à la chapelle de Saint-Laureans;
» et sont deuz à la feste saint Michel. »
(Angers, Archives de Fontevr., carton Angleterre.)
La reine Philippe adressa à l'abbesse de Fontevrault la lettre
suivante, à propos du prieuré d'Ambresbury :
« Philippe, par la grâce de Dieu, reine d'Angleterre, dame d'Ir-
» lande et duchesse d'Aquitaine, à nostre chère en Dieu...,
» Abbesse de Fontis Evral., salutz. Parce que sire Jehan de
» Cholet, darrein priour de vostre maison de Ambresbury, est à
» Dieu command, et ladite maison purroit o leggierement en-
» coure grant domage si elle ne fust, par temps, pourveue d'un
» prieur sufficeant, comme elle en ad bien busoign ; nous, con-
» siderantz les vertuouses condicions et les grantz cens que
» reluisent en la personne nostre bien amé sire Williams, de
» Ambresbury,chapelein, que long temps ad supporté les charges
• et les travaulx du gouvernement de la maison desus dicte ;
» pensant que ce seroit grande prouffit à ycelles, s'il en ust la
» cure et la gouvernance, vous prions chèrement que mander
» veulez voz lettres de licence à la prioresse de vostre maison
» avant dite, quelle puisse rescevoir et establir, par vertue de
» vostre mandement, le dit sire Williams en priour de Laeniz ;
» à quoi nous pensons qu'elle se assentera bien pour son prouffit,
» de si corne elle conoit le bon lieu q[u'il a tenuz et tient à la
» maison avant dite, et qu'il est à cette office habile etsufQceant.
» Dieu vous eit en sa garde.
> Donnez à Wodestobury *, le second jour de décembre *. »
1 Woodstock, Tille où se trouvait un château bâti pur Henri H.
s Copié sur l'original, à Angers, Archives de Fontevr., carton Angleterre.
— Celte lettre n*est pas datée ; nous la croyons de Philippe de Halnault, pre>
mière femme d'Edouard UI. Le nom de l'abbesse à qui elle est adressée, est
resté en blanc. Elle est scellée, en cire ronge, aux armes d'Angleterre.
* Angers, Archives de Fontevr., Petit CartuL, p. 345.
— 32 —
plusieurs autres objets de prix; pour la grande
église, des tapisseries d'or et des livres « utiles et
y> ornés K »
Pour consacrer la mémoire de cette seconde
réformatrice, morte le 9 septembre 1491 ', Renée
de Bourbon fit ériger en 1498, au milieu du chœur
du Grand-Moutier, une magnifique tombe en cuivre,
du poids de cinq cents livres ^
* Nécrologe de Fonte vr.
2 P. Anselme, 1. 1, p. 208.
8 Sainte-Famille, t. III, p. 572.
RENÉE DE BOURBON.
Renée de Bourbon, fille de Jean II, comte de
Vendôme, et d'Elisabeth de Beauvau \ fut reçue
professe en 1483 par Anne d'Orléans ; elle eut en
même temps deux abbayes, celle de la Trinité de
Caen , et celle de Fontevrault dont elle prit posses-
sion le 30 octobre 1491 *.
Comme on vient de le voir, elle n'a pas été la
première réformatrice de son ordre; si on lui
donne souvent ce titre, c'est à raison du grand
nombre de prieurés qu'elle réforma, et surtout
pour la victoire complète qu'elle remporta sur ses
religieuses indisciplinées.
D'une nature frêle et délicate, cette princesse
était douée d'un esprit vif et pénétrant , d'un carac-
tère ferme et énergique, dont elle donna des preu-
ves au cours de sa longue et laborieuse carrière.
Renée, pendant les premières années de son gou-
vernement, examina avec soin l'état de l'ordre que
lui cédait Anne d'Orléans. En 1496, revenant,
accompagnée du frère Gentien Hue, docteur en
théologie et secrétaire du Grand-Moutier, de visiter
1 GaUia Chnst.
5 H. Nicquct, Hist. de Fontevr., p. 484.
— 34 —
la Trinité deCaen, elle s'arrêta dans plusieurs cou-
vents de Fontevrault, notamment à la Madeleine
d'Orléans, où elle séjourna huit jours, qu'elle em-
ploya à tout examiner, puis à raffermir chez les re-
ligieuses les principes de vertu que leur avait légués
Marie de Bretagne. Elle fit, avant de partir, réfor-
mer Belhomer, les Filles-Dieu de Paris , et Relay ,
avec des religieuses de couvents où déjà la nouvelle
règle était en vigueur. En 1499 elle visita Rives, la
Puye, la Font-Saint-Martin, Montazais, Bonneuil et
l'église paroissiale de Fontevrault, Saint-Michel *.
i ÉGLISE Saint-Michel.
L'année 1177, à la demande d*Audeburge, abbesse, FAnglais
Jean ITI, surnommé les Blanches-Mains , trésorier de l'églisti
d'York , cinquante-septième évéque de Poitiers, t homme ai-
» mable, généreux et très-lettré , érigea la chapelle de Saint-
» Michel , sise au grand cimetière de Fontevrault , en église
» paroissiale séparée de Saint-Martin de Roiffé. Car le peuple,
» qui s'étoit habitué proche le monastère, s'augmentoit merveil-
» leusementde jour en jour, et se mettoit à defifricher et cultiver
» les terres circonvoisines, de sorte que c'étoit nécessaire de leui*
» mettre un pasteur en titre. » La présentation de ce pasteur ap-
partenait à l'abbesse de Fontevrault, à la condition qu'elle payât
à Roiffé 36 ^^deniers par année, et qu'elle fit prendre les sainteà
huiles à cette église. L'abbesse avait, en outre, puissance siu* le
curé de Saint-Michel comme sur un moine de son ordre.
L'église de Saint-Martin de Roiffé, située entre Loudun ot
Montsoreau, avait été donnée, vers 1109 , à Robert d'Arbrissel
par son ami Pierre, évéque de Poitiers.
Saint-Michel n'offre rien de bien remarquable ; il aurait be-
soin de grandes réparations. Le maître-autel et les deux qui se
trouvent dans la nef étaient autrefois dans la principale église
de ral)baye, comme aussi de nombreux tableaux et reliquaires,
sans valeur sérieuse au point de vue artistique. Une des filles
de Louis XV fit don d'un Saint-Jean assez médiocre ; ses armes
sont au bas de ce tableau. Tous les ans les abbesses de Fonte-
— 35 —
Pendant onze ans Renée fit tous ses efforts pour
amener ses religieuses et ses religieux à accepter
volontairement la réforme, qu'elle essayait surtout
vrault allaient entendre le messe dans cette église, elles y assis-
taient dans une tribune placée à droite du chœur et s'y ren-
daient, sans rompre la clôture, par Bourbon, leur maison de
plaisance, appartenant aujourd'hui à M»» veuve Barré, riche
propriétaire qui a fait don de fort beaux vitraux à cette paroisse.
Noms de quelques curés de Saint -Michel : 1260, fr. Denys
Andoques. — 1297, Denis de Verron ; il fit construire dans cette
église la chapelle Saint-Martin, où le grand prieur de Fontevrault
donna souvent l'habit de l'ordre à des frères. — 1390, Petrus de
Castro ; — Robertus d'Esprenon. — 1436, fr. Geoffroy Mousnier.
— 1457, fr. Jean Perdriau, qui fut en même temps gouverneur
de Rocheteau, fief de Fontevrault. — 1472, fr. Jean Moreau,
prieur en même temps de Boisgoyer ; ses vicaires à Saint-Michel
<'*taient : fr. Jean d'Aubigneon et fr. Jean Hurtault. — 1488, fr.
Mathurin Berthomieu, visiteur des prieurés de la province de
France. — 1504, fr, Gabriel Dreux. — 1554, René Guerrier. —
1564, Louis Gastebled ; il eut cette année-là de graves différends
avec son abbesse, M»»* Louise de Bourbon ; conduit dans les pri-
sons de l'officialité de Poitiers, il fut condamné sévèrement et fit
appel de cette sentence devant le parlement de Bordeaux. —
1566, M« Antoine Corbineau. — En 1574 l'abbesse ordonna au
curé de Saint-Michel de célébrer tous les dimanches une messe
qu'avait fondée Gaucher de Sainte-Marthe, sieur de Lemay, mé-
decin des dames de Bourbon. — 1580, M* Jacques Aubry. —
1581, M« Antoine Cerbonneau. — 1593, Louis Cherbonneau. —
1596, Gille de Vaugiraud. — 1597, Jean Maisondieu. — 1637, Jean
Heschier. — Vers 1641, Michel Cosnier, auteur d'un ouvrage
destiné à favoriser la canonisation de Robert d'Arbrissel, et fait
d'après les ordres de l'abbesse Jeanne-Baptiste de Bourbon. —
1085, le P. Vacher ; vicaires : Cirier et Garnier.
Enfin le dernier curé de cette paroisse , avant la révolution,
fut le Père Alexandre Guerrier, dont nous publions à la fin de
ce volume l'étrange profession de foi républicaine. (Sainte-Fa-
mille, pp. 248 et 349. — Gallia christ,, t. II, pp. 335 et 1180. —
Angers, Archives de Fontevr., Trésor de l'ordre, t I, p. 372-373.
— Ibid., Inventaire des titres, t. VI, p. 4.)
— 36 —
d'établir par la douceur et Ja persuasion. Mais le
mal était trop grand, les habitudes de désordre trop
enracinées pour qu'on écoutât les sages avis de
Tabbesse ; il lui fallut donc se décider à agir avec
rigueur. En 1502 elle va à Paris solliciter de
Louis XII et du Parlement la puissance qui lui man-
quait pour briser toute coupable résistance. De re-
tour à Fontevrault en 1503, munie des arrêts né-
cessaires, elle s'empressa de les faire exécuter,
puis résolut de s'entourer d'auxiliaires sûrs et
puissants. A cet effet, « elle assembla plusieurs
i> grands personnages savants et de sainte vie, tant
D de religion que séculiers , à gros frais , mises et
y> dépends , au lieu de céans ; c'est à savoir : le
» grand prieur de Glugny , Rollin ; Bourgoin , abbé
3> de Chazal-Benoist ; frère Yves Morisson, abbé de
» Saint-Vincent du Mans, et M^ de Besançon, i»
Sa première pensée était de séparer les filles,
du monde extérieur ; de poser entre elles et le
dehors, des grilles et des tours.Voilà ce qui se passa
lorsqu'on exécuta cette réforme : «, La vigile de
» Saint André fut mise la grille du grand moustiers ,
» fut empeschée l'assiette du tour , posée par
» M^ de Besançon , qui le faisoit par ordre du
» Roy. Ensuite fut fait proces-verbal, et le Roy
» envoya monseigneur le prince de Taillemont et
» monsieur de Montbazon, capitaine des souisses de
» la garde, lesquels assistèrent ledit Bezançon, qui
j> jetta hors la thresoriere, sœur Blanche de Mont-
> beron ; la prieure de la Magdelaine, sœur Marg.
^ de Caumont ; la prieure de Fontaine , sœur
— 87 -
ï Rolline Musset , chantre du Grand-Moustiers ; la
» prieure de Villesalem , sœur Jeanne le Roux ; la
> prieure de la Lande , sœur Marie Solar, accom-
» pagnée d'autres religieuses , lesquelles Madame
> fit conduire par des religieux, en litières et
> charriots, à ses dépends, et les dits sieurs firent
» asseoir la grille et le tour *. »
Les religieuses qui restaient dans le monastère
n'étaient pas plus disposées à recevoir la réforme
que celles qui venaient d'en être si justement expul-
sées. Le 20 mars de la même année, voilà effecti-
vement ce qu'elles firent : « La nuit furent, par les
> religieuses demeurées et certains hommes du
> bourg, rompus les grilles et le tour, dont fut fait
> information. i> On envoya une partie de ces re-
belles dans les couvents déjà réformés, « pour y
» faire le service divin et y user religieusement le
> reste de leurs jours ; » puis l'abbesse appela en
1504 quarante-deux religieuses réformées pour rem-
placer dans son abbaye les terribles émeutières *.
Ce que Renée venait de faire dans son Grand-
Moutier, il fallait l'accomplir dans le couvent des
moines, à Saint-Jean-de-1'Habit. Au mois d'août
1504 elle en remplaça le grand prieur, fr. Guil-
laume Rousseau, auquel, en compensation, elle
donna le prieuré de Saint-Laurent, par le fr. Phi-
lippe Fontaine, son confesseur, lequel prit posses-
sion de sa nouvelle charge, escorté de dix frères,
* Angers, Archives de Fontevr., Trésor de Vabbaye^ t. I,
p. 186-187.
Biblioth. imp., CartuL de Fontevr»
3
f
I
— 38 —
qui firent immédiatement le service selon la règle
de Marie de Bretagne ; les récalcitrants furent' ré-
partis dans les prieurés non réformés \
La paix semble, après l'exécution de ces salu-
taires mesures, vouloir régner; et Tabbesse en
profite pour recevoir des religieuses, qui accourent
de tous côtés s'enrôler dans sa sainte milice. Des
princesses des maisons de Valois et de Bourbon,
des jeunes fiUes'appartenant aux premières familles
de France, viennent vivre à l'abri de la crosse de
cette réformatrice. Renée, pour être bien maîtresse
du troupeau confié à sa garde, va l'entourer de
hautes et fortes murailles. Cette même année 1504,
<r voulant laisser tout Testât quy lui appartenoit,
» veu sa noble lignée et dignité, et la noble maison
» dont elle estoit, elle vendit sa vaisselle d'argent,
» dont ordinairement elle se servoit, » et fit, avec
la somme que cette vente produisit, faire par Gé-
rard Breban, Antoine Rousseau et Yvon Heurtault,
« le grand circuit de pierre qui entoure l'abbaye.
» Madame descendit elle-même aux fondements e
» y assit la première pierre, qui est à l'endroit du
» mur qui est devant la porte de l'église de la Mag
» delaine ; il y a soubz lad. pierre une grande ar
j> doise, où est le nom, les armes de lad. dame, e
3> les noms de plusieurs dames religieuses *. »
i Sainte-Famille, t. IH, p. 587.
* Cette muraUle, car eUe existe encore, « est longue de fôl
» toises, haute de 3, large en fondations de 3 pieds ; elle coust:
9 210 ecus d'or, 3 pipes de vin, 3 septiers de mouture, san
I» compter les charrois ; etc. • {Sainte-Famille, t. m, p. 589.)
— â9 —
Le 20 juin 1504, après de vives résistances,
elle fit poser la grille qui fermait l'entrée du
chœur \
Les nouveaux statuts ordonnaient à tous de faire
vœu de clôture. Renée, voulant donner l'exemple
de soumission à la règle qu'elle allait rigoureuse-
ment appliquer, fit la première le sacrifice de sa-
liberté. Le 13 juin 1505 elle accomplit ce devoir
entre les mains de son frère naturel, Louis de
Bourbon, évêque d'Avranches ; M^® Clerée, confes-
seur de Louis XII, représentait le Saint-Père, [dont
la bulle fut lue par le Père Yves Morisson, abbé de
Saint-Vincent du Mans. Etaient présentes à cette
imposante cérémonie : la reine Anne , nièce de
Marie de Bretagne ; la comtesse de Nevers ; la du-
chesse de Valois, tante du roi ; M^^® de Foix, nièce
de Louis XII ; M"^® de Penthièvre* et plusieurs
autres dames '. Deux jours après, les religieuses,
au nombre de quatorze, imitèrent leur abbesse '•
Ces pauvres moines eurent quelques mois plus tard
une rude épreuve à supporter. Ce qui s'était passé
lors de l'installation de la réforme eu 1504, au
grand monastère, va recommencer, mais à Saint-
Jean-de-l'Habit : « L'an 1505, le 12 octobre, les
ï religieux non reformez resistans au bon vouloir
> de l'abbesse, revindrent, sans son sceu et co-
» gnoissance, se remettre aud. prieuré de l'Habit
» et en expulser le prieur et les religieux reformez.
* Sainte-Famille, t. III, p. 547.
* H. Nicquet, p. 486.
* Bibliotii. imp., CartuL de Fontevr.
» Ce que voyant, lad. abbesse envoya quérir un
» des conseillers de la cour de Parlement pour
» expulser lesd. religieux rebelles. Aussy lui
» envoya de Taide, M. le prince son frère, par ses
» gentils hommes ; et lad. dame diligenta tellement
» ses affaires , que la vigile de Noël ensuivant , et
» aud. an 1505, les religieux rebelles comparurent
* devant elle, à la grande grille du Grand-Moustiers,
> lesquels, présent le lieutenant de Saumur et
» autres, luy requièrent pardon; auxquels ladite
* Dame, vivement et vertement remonstra leurs
» deffauts, et après les receut à miséricorde et
» envoya en obédience aux prieurez , comme
» devant. Ensuite de quoi furent enlevez dudit
» couvent de l'Habit, tous les titres, Chartres,
» reliques , argenterie et ornements d'église, qui
» furent transportez au dedans de la closture par
» lesd. conseiller et députez du Roy \ »
Enfin victorieuse. Renée, le 16 juin 1507, « fit
a mettre et poser le décret de rèformation en lad.
» abbaye et monastère de Fontevrault ; et l'y mit
» l'archevesque de Lyon , délégué du Saint-Siège ,
» François de Rohan ' , avec Yves Morisson, sub-
» délégué de l'archevesque de Tours ; aussi y
» etoient le procureur du Roy de Saumur et autres
» gens de conseil*. » Quatre-vingt-deux religieuses
* Angers, Arch. de Fontevr., Anciens titres, MantMcrit de la
sœur d'Avoise.
« Fils de Pierre de Gié, maréchal de France ; il fut abbé de
Saint-Aubin et évêque d'Angers; mort en 1536.
• Sainte-Famille, t. m, p. 592.
— 41 ^
professes et dix novices acceptèrent ce décret,
ainsi que les religieux de l'Habit \
Fontevrault devint alors « une véritable académie
» de reformation, » où les religieuses de plusieurs
ordres vinrent apprendre à conduire leurs troupeaux
indisciplinés. François I^^ comme l'avait déjà fait
Charles VIII en 1487 , visita cette abbaye * et
complimenta la courageuse princesse. « L'an 1517,
» le 16 juin, qui estoit un vendredy, vint en ce lieu
» de Fonte vraud le roy François 1®^, faire son
» entrée et voir ladite dame abbesse et son
> monastère ; avec luy la reine Claude, fille du roy
^ Louis XII, Madame la Régente, sa mère, Louise
» de Savoye et plusieurs autres seigneurs et dames
* du sang, et bailla le Roy, entre les mains de lad.
» dame abbesse, sa sœur naturelle, Magdelaine
'> d'Orléans, abbesse de Jouerre, pour l'instruire
» et enseigner en la reformation '. »
Renée , à peu près maîtresse dans sa grande ab-
baye, grâce à ses persévérants efforts, n'était pour-
tant pas au bout de sa pénible tâche : il lui fallait
introduire la réformation dans de nombreux cou-
vents plus que jamais mal disposés à la recevoir ,
puis anéantir les prétentions des moines des prieurés
réformés, prétentions s'appuyant sur un concordat
signé par elle en 1*504, par faiblesse ou habileté.
* H. Nicquet, Hist. de Fontevr,, p. 486.
* Renée, en 1529, donna 800 livres pour contribuer à faire la
rançon des enfants de François I«', prisonniers en Espagne.
(Angers, Arch. de Fontevr., carton la Nouzillette.)
» Sainte-Famille, t. m, p. 996.
La règle de Sixte IV dit au chapitre de la puissance
de Vabbesse, qu'elle ne jouira de sa pleine et entière
juridiction sur tout l'ordre , qu'après l'introduction
de la réforme au grand monastère. Parlant, les re-
ligieux , craignant de perdre ce jour-là l'autorité et
le pouvoir qu'on leur avait accordés par provision ,
lui firent une rude opposition, lui adressèrent même
des menaces pour enrayer l'inexécution de son pieux
dessein. Ils envoyèrent des personnes influentes lui
offrir la paix en échange de la confirmation du droit
qu'ils possédaient. L'abbesse, sans doute pour écar-
ter de la lutte de dangereux adversaires, et surtout
affaiblie par une cruelle maladie, signa le 15 avril
1 504 ce concordat, mais évidemment avec la pensée
de le faire, plus tard, déclarer nul ; autrement elle
eût signé sa proche déchéance.
En effet, < de chef d'ordre qu'elle étoit, elle devint
» chambrière et servante ; elle devoit être visitée
» par ses inférieurs , qui avoient pouvoir même de
» la suspendre , voire de la déposer de sa charge ,
» si le cas échéoit *. » On vécut ainsi , de part et
d'autre , jusque vers 1509 , époque où l'énergique
abbesse, pressée de réformer des couvents tombés
au dernier degré de l'immoraUté, et s'indignant à la
pensée de tolérer plus longtemps les désordres, les
dépravations de toute nature qui souillaient des
demeures jadis consacrées à la vertu , à la prière,
révoqua tout d'abord son imprudent concordat, puis
obtint une bulle de Léon X et des lettres-patentes
> Nic^uet, Hist, de Fontevr,, p. 587.
— 43 —
de François P^ Ainsi armée, elle va commencer une
régénération radicale, quand soudain se dressent
devant elle les religieux qui, le concordat à la main,
veulent arrêter son action. Tremblantque le pouvoir
de Tabbesse se substituât au leur, ils s'empressèrent
de demander au Parlement l'homologation de l'acte
qui faisait toute leur force. Renée, des religieux an-
ciens et le procureur général, concluent de leur côté
à l'annulation de cet engagement, comme contraire
à l'esprit qui avait présidé à la fondation de l'ordre.
Ce procès fut pendant à la cour, de 1508 à 1518. La
justice était lente, au xvi® siècle ; mais François P"^
fil évoquer l'affaire à son grand conseil, et, après avis
d'un commissaire et de religieux d'autres ordres ,
rendit à Romorantin , sur leur rapport , le fameux
arrêt du 18 mars 1520, qui cassait ce concordat et
rendait à l'abbesse sa première puissance.
Le pape Clément VIII confirma en 1523 cette
sentence, si conforme à la volonté du fondateur. A
partir de ce moment, le calme se fait dans l'abbaye
et Renée va donner désormais ses soins à la réfor-
mation générale.
On ne peut se figurer l'état d'exaspération de
quelques religieuses, qui furent jusqu'à solliciter des
sentences d'excommunication contre leur supé-
rieure. Pour mettre fin à ce scandale, le pape
Jules II ordonna par bulle, aux évoques, aux doyens
de Tours et d'Angers , « de prendre cognoissance
» de certaines poursuites par contumace, sentences
» d'excommunication qui se faisoient par-devant
» certains officiaux contre Madame Renée, à la re-
" ' — 44 —
» queste de quelques siennes religieuses , qui ne
j> vouloient souffrir reformation qu'elle vouloites-
i> tablir en tous ses couvents *. j>
La résistance désespérée de ces dernières sœurs
ne peut s'expliquer que par la vie blâmable qu'elles
menaient depuis longtemps , et que voulait à tout
prix changer leur digne abbesse. Pour montrer
combien il était urgent d'agir ainsi , nous transcri-
vons littéralement partie d'une enquête faite d'après
les ordres de Renée, et sommes convaincu que tout
cœur honnête , après en avoir pris connaissance ,
louera la conduite énergique de cette vénérable
religieuse :
« Maistfe Austrillé de la Soumaigne, prothono-
» taire du Saint-Siège apostoUque et curé de Saint-
» Marc, âgé de 22 ans ou environ, après le serment
i) par lui fait , dit , sur ce requis , qu'il connoissoit
» les reUgieuses dudit Ueu de Blessac ', et que plu-
» sieurs d'icelles estoient ses cousines et proches
» parentes. Dit aussi avoir plusieurs fois été audit
» heu de Blessac , parce que leur maison d'Aube-
» perre , où il se tient , n'est loin dudit Blessac que
1 Sainte-Famille, t. III, p. 592.
« Monastère situé paroisse de Blessac, dans la Marche, diocèse
de Limoges. Ce prieuré, fondé en 1108 pour des ermites, par
Raymond, vicomte d'Aubusson , accepta vers 1112 la règle de
Fontevrault ; et ce, à l'instigation de Ja mère du fondateur,
prieure du couvent de Tusson, de cet ordre. Blessac fut un des
prieurés les plus importants ; il eut jusqu'à cinq cents religieuses ;
deux auteurs disent même neuf cents. Il fut toujours difficile à
gouverner. (Angers , Arch. de Fontevr., cartons Blessac ; — et
Pavillon, Mist, de d'Arbrissel, p. 575.)
— 45 —
> de 2 lieues ou environ. Dit aussi , sur ce requis,
> que la prieure dudit lieu portoit souventesfois une
* cotte de samyn * blanc et des manches de satin
> blanc, frangées et ouvrées, et attachées par le
i> dessous à laz et gros boutons de soie ; la chemise
> soufflée par le dessous , en la manière des plus
» mondaines qu'on sauroit voir. Portoit aussi, ladite
» prieure , en ses doigts , plusieurs bagues et an-
> neaux; comme tout ce, il, qui dépose, dit avoir
» ouy-dire à une femme nommée Marguerite de
ï Pontcharault , laquelle il dit lui avoir dit souven-
> tesfois avoir vu ladite prieure en Testât que
• dessus. Dit aussi, ledit déposant, que aujourd'hui
î à quinze jours son frère aisné, nommé Lyonnet de
> la Soumaigne, seigneur dudit heu d'Aubeperre,
» en venant dp Râteau , qui est une place à lui ap-
» partenante, passa et fut à la commanderie de
» Chambereau , distante dudit Blessac de 2 Ueues
» ou environ, auquel lieu il trouva avec le comman-
» deur dudit lieu, trois des reUgieuses dudit Blessac,
» Tune desquelles s'appeloit Marguerite d' Aubusson,
1 autrement de la Feuillade ; et des autres ne sait
» le nom. Comme ce il déposant dit savoir, par le
» rapport que lui en fit sondit frère , tantôt après
» qu'il ftit arrivé en ladite maison d'Aubeperre. Dit
3> aussi , sur ce interrogé , ledit déposant , que le
> bruit est tout commun que Charles d' Aubusson ,
1^ seigneur de la Borne , entretient la prieure dudit
5> Blessac, et qu'il fréquente avec elle comme si elle
1 lUche étoiïè'de soie.
3*
— 46 —
» etoit sa femme , et ne bouge ordinairement dudit
» prieuré, parce que dudit lieu où il se tient jusques
» audit lieu de Blessac , il n'y a de distance que de
» demie-lieue ou environ ; outre qu'il a tant fre-
» quenté avec ladite prieure , que c'est une voix
» commune qu'elle a eu de lui trois ou quatre en-
» fants. Et que non-seulement ladite prieure a bruit
» de mal se gouverner, mais aussi plusieurs, et la
» plus grande part desdites religieuses sont notées
» d'incontinence et de lubricité; et ont eu aussi des
» enfants. Dit outre, ledit déposant, que pour l'a-
» mour de sesdites parentes, qui sont religieuses
» audit lieu, il, et sondit frère, voudroient qu'il leur
» en eust cousté beaucoup de leur bien et que ledit
» prieuré fust bien reformé. (F^s 34, 35, 36 et 37.)
» Et de là nous transportasmes au cjiœur desdites
» religieuses, lesquelles y trouvasmes assemblées,
» savoir est : sœur Françoise d' Aubusson, prieure ;
» Jeanne de Rebere , prieure du cloistre ; Margue-
» rite de Saint-Domain, celleriere ; Louise de Saint-
» Georges, sous-prieure ; Jeanne de Saint-Georges,
» secrétaire ; Marguerite d' Aubusson , infirmière ;
» Delphine du Fou ; Jaquette de Saint-Julien ;
» Jeanne d'Ussé. Apres, demandasmes à ladite
» prieure si c'etoit toutes les religieuses dudit
» prieuré. Qui nous fit réponse qu'il y en avôit en-
i> core une, nommée Gabrielle de Persac, qui etoit
» absente il y avoit six semaines , ou plus , par son
» congé et licence. » (F^s 42 et 43.)
« Apres, tirasmes et parlasmes à part , en ladite
:» chambre ^ à sœur Marguerite de Saint-Domain ,
• ■' < V '-
»
— 47 —
celleriere dudit lieu , et après à plusieurs parti-
culièrement des autres religieuses, chacune des-
quelles se plaignoient fort dudit M^® d'Aubusson
et de ladite prieure , et de leur méchant gouver-
nement, en disant que ledit d'Aubusson les laissoit
presque mourir de faim et ne leur donnoit comme
rien pour vivre et s'entretenir, au moyen de quoi
etoient contraintes , la pluspart du temps , aller
vivre chez leurs parents. Nous dirent aussi, plu-
sieurs desdites religieuses avec la prieure du
cloistre, que ladite prieure etoit fort sujette à ses
complexions et plaisirs mondains, et qu'elle por-
toit ordinairement habillements trop dissolus et
exquis , et qui plus appartenoient et convenoient
à dames, damoiselles et autres femmes séculières,
que à religieuses; comme anneaux en grand
nombre, patenostres trop précieuses et curieuses,
cottesdesamynetdesatin, robes de serge et demie-
ostade, manches de satin et de velours de couleur
blanche, et autres, fendues par dessoubs, et souf-
flées de la chemise, à la mode qui a cours aujour-
d'hui au monde ; rubans colorez en saincture,
soulliers escoUetez, et plusieurs superfluitez
mondaines.
* Et de fait, ledit jour, vismes ladite prieure ayant
vestu une cotte de samynblanc, la queue traisnante
en façon de damoiselle et bordée par le dessoubs,
de noir. Avoit aussi, ladite prieure, par dessus
ladite cotte , une robe de drap noir , doublée de
demie-ostade, comme aperçûmes, parceque ladite
robe etoit troussée par le dessus tout autour, à la
— 48 —
> mode des séculiers. Avoit aussi, ladite prieure,
» des souliers escoUetez, larges et cornus par le
» devant , en la manière que à présent les portent
» lés séculiers; de laquelle façon et mode de
» souliers portoient aussi toutes les jeunes religieuses
ï dudit lieu ; à aucunes desquelles vismes des
» anneaux en leurs doigts , mesmement aux dites
>■ Jeanne de Saint-Georges, de Rebere et Marguerite
» d'Aubusson, autrement appelée de la Feuillade.
» Les voiles et accoutrements de la teste desdites
> religieuses etoient de toile fort déliée, mais petits
» et hautement et curieusement accoustrez, et tous
3» les autres habillements et accoutrements de leurs
3> personnes, en sorte que un chacun, à les voir,
» ne les jugeroit estre religieuses, mais plutost da-
» moiselles et séculières. Trouvasmes pareillement
» toutes lesdites religieuses vestues de cottes blan-
» ches, aucunes desquelles etoient bordées de noir;
» et aucunes desdites religieuses avoient robes
» doublées de demie-ostade et troussées comme
3> celle de la prieure. Et nous fut dit lors, par
i> aucun de la compagnie dudit d'Aubusson, dont
» ne pûmes savoir le nom, que les habillements que
» lors portoient lesdites religieuses, n'etoient que
» les habillements des jours ouvriers, et que, les
» festes, elles en portoient bien d'autres plus riches
» et somptueux \ i>
* €ôpié textuellement sur la minute du procès - verbal
(juin 1530) des frères Jean Lamy et François Pelletier, commis-
saires envoyés pour réformer ce prieuré. (Angers, Archives de
F(Hitevr., cartons Blessac,)
— 49 —
Le 9 octobre 1534 Renée meurt avec le légitime
orgueil d'avoir contribué plus que toute autre à réfor-
mer l'ordre dont elle était le chef , et la douce consola-
tion de transmettre sa crosse à sa nièce Louise de
Bourbon, son élève bien-aimée. Elle laissait alors 34
maisons réformées : 28 par elle , 6 par Marie de
Bretagne et Anne d'Orléans. Dans le Grand-Moutier,
83 religieuses de chœur, 40 sœurs laies, 30 novices
ou voiles blancs ; et à T Habit,! 50 moines. Ce fut donc
avec justice qu'elle plaça dans ses armes quatre R,
répondant aux mots ou devise : Renée, Religieuse
Réformée, Réformatric« \
Son corps repose, avec ceux de sa nièce Louise
et sa petite-nièce Eléonore de Bourbon , sous une
tombe de cuivre placée ^u milieu du chœur des
religieuses , et sur laquelle sont gravées leurs trois
figures •.
Onze ans après sa mort, parut à Poitiers une très-
longue épitaphe en son honneur, de laquelle nous
citons seulement les vers suivants :
« Cy dessoubz gist la perle singulière
» De Fontevrault, de l'Ordre la lumière,
» Dame Renée, au surnom de Bourbon,
» Et du sang mesme où rien n'y eut que bon ;
» Qui descendit de Loys roy de France,
» Canonizé pour son humble souffrance,
» Ses grans vertuz, sagesse et saincteté. »
1 H. Nicquet, Hist. de Fontevr., p. 492.
> Le P, Anselme, t. I, p. 325,
LOUISE DE BOURBON.
La grande prieure Louise de Bourbon, aussitôt la
mort de sa tante , envoya M® de Saint-Marthe , son
médecin, porter à François l^^ la lettre suivante :
« Sire,
A II a pieu à la bonté divine ce jourd'huy retirer
» de sa part l'ame de Nostre Révérende Mère
» Abbesse , ma bonne tante , quy a laissé la pauvre
» compagnie de céans bien désolée. Je vous supplie
» très humblement. Sire, par vostre grande bonté
» et charité , avoir vos très humbles et obéissantes
» servantes et religieuses por très humblement re-
» commandées en vostre bonne grâce, et de myeuk
» en myeulx metterons peine de continuer les
» prières qu'elle nous ordonnoit faire pour vostre
» bonne prospérité et longue vye ; ayant espérance,
» Sire , que Famé de nostre bonne mère, que Dieu
» absolve, est en lieu où elle nous fera service ; car
» elle , estant en ce monde, vous a eu en singulière
» affection devant Dieu, luy présentant toutes vos
» bonnes intentions.
» Et quant à moy, Sire, qu'y vous a pieu, indigne,
» mettre au lieu et charge de feue Madame bonne
i> tante, metteray peine , suivant sa doctrine , offrir
» journellement devant Nostre Seigneur ma petite
— 51 —
> prière à ceste fin, comme la plus obligée de toutes
> celles qui vous doibvent très humble obéissance
• pour la très grande bonté dont il vous a pieu user
> envers moy, quy supplye le Créateur, Sire^ vous
> donner, en santé, très bonne vye, et longue *.
> Vostre très humble et obéissante servante et
» subjecte,
» Sœur LoYSE de Bourbon, j»
Notre nouvelle abbesse prit possession de sa
charge le 9 janvier 1535, après avoir été reconnue
dans le chapitre, « ce jour-là fort richement tendu
> de tapisseries, et le siège abbatial accoustré de
» drap d'or, ainsi que le pupitre ; » et bénie par le
cardinal de Bourbon, son frère, archevêque de Sens,
qui différa son entrée dans son archevêché pour
accomplir cette pieuse cérémonie. « Madite Dame
> fist advertir W^ et dames ses parents et parentes,
» aussy autres, barons, clers et gentils hommes
» voysins de cette abbaye, priant leur y trouver, sem-
> blablement les Ueutenants et officiers du Roy des
* villes d'icy près, où ils'en trouva un grand nombre,
» et principalement M^^ la princesse de la Roche-
î sur-Yon, tante de mad. Dame, M"^® de laTremoille,
» M^ le prince de Thallemond, son filz. Servoit de
> diacre à mondit seigneur le cardinal, M'' l'abbé
> de Suilly, et soubz diacre M^ l'abbé de Noyers.
> Les deux abbés de Marsmoustierz et Bougmoys
> estoyent crossez et myttrez , assistants aux deux
* Biblioth. imp., Cartul, de Fmitevr.y t. IL
— 52 —
i> costez de Tautel, assis en deux chaires parées et
> couvertes \ »
Cette princesse, élevée dès l'âge le plus tendre à
Fontevrault, qu'elle ne voulut jamais quitter, ne
connaissait rien de la vie du monde extérieur ;
aussi avait-elle une piété sincère, mais ombrageuse.
Malgré la bonté de son cœur et l'intérêt très-vif
qu'elle portait à son troupeau , elle faillit dans une
mémorable circonstance, embrasée d'une foi trop
ardente, amener la destruction de son abbaye.
Le but constant de la vie de Louise fut de
maintenir ses turbulentes compagnes dans les
véritables principes de la religion catholique ,
d'améliorer le sort de ses vassaux et de réparer
autant que possible les ruines de ses maisons. Mis-
sion difficile, car la France était à cette époque en
proie aux sanglantes guerres de reUgion. Les pro*
testants , vivement pourchassés par les catholiques,
se ruaient sur les couvents, en pillaient et incen-
diaient les bâtiments, puis forçaient les religieuses
à chercher ailleurs quelque abri protecteur, s'ils
n'avaient pu les amener à partager leurs croyances.
Malgré tous ses efforts pour lutter contre d'aussi
dangereux ennemis , la pieuse abbesse eut souvent
la douleur de voir ses filles, reniant la religion de
leurs pères, embrasser avec ardeur les doctrines de
Luther.
Encore sous l'influence du souvenir de Renée,
Louise porta d'abord ses soins sur les prieurés noq
* Sainte-Famlle, t. m[, p, 609.
— 53 —
réformés. De 1537 à 1558 elle eut le bonheur de
voir, en réformant douze monastères, la règle de
Marie de Bretagne à peu près acceptée par tout
l'ordre. Comme sous le règne de sa tante, elle reçut
les vœux de nombreuses jeunes filles qui venaient
à Tenvie augmenter sa sainte milice. La duchesse
de Guise, Antoinette de Bourbon, sa sœur, lui
amena sa nièce, la jeune reine d'Ecosse Marie
Stuart. La duchesse nous apprend ce fait dans une
lettre adressée par elle, en 1548, à son fils François
de Lorraine :
« Mon fils, je vous envoyé des lettres que Madame
» de Fontevraulx, ma sœur, m'a escriptes ; vous
» luy ferez, et à tous ses couvents et sugectz, tout
» l'ayde et support que pourrez. Je suis bien marye
> que ne vous ay rencontré en passant pour vous
>-veoir. Je arrivay devant hier icy, et bientost après
• nostre petite Reyne, en aussy bon point qu'il est
» possible ; et vous asseure, mon filz, que c'est la
> plus jolye et meilleure que ce que vous veiste
> oncques de son aage. Je la meyne par Fontevraulx.
» Vostre tante a grande envye de la veoir...
> Escript à Milley S le XXVIP jour de septembre
» M V« LVm.
» Vostre bonne mère,
» Antoinette •. j>
* MiUy, château près Saunmr, appartenait alors à la famille
Je Maillé-Brezé. Ce (ut Arthus de Maillé, seigneur de Brezé,
qui, d'après l'ordre d'Henri II , alla chercher en Angleterre
Marie Stuart, future épouse de son fils François. Nous possédons
cet ordre, magnifique pièce historique.
* Louis Paris, Cabinet historique.
— 54 —
En 1549 Louise obtint d'Henri II l'autorisation
de créer deux foires dans le bourg de Fontevrault,
dont elle était châtelaine. En 1550 elle nomma un
maître d'école pour instruire les enfants pauvres
de la paroisse. Elle prtt ensuite, avec l'autorisation
de l'évéque de Poitiers, une partie du cimetière
public pour bâtir une halle ; accomplissant ainsi
tous les actes d'un habile administrateur *.
Le couvent de la Madeleine d'Orléans, qui
contenait la dépouille mortelle de Marie de Bretagne,
fut malgré cet égide un des prieurés dont Louise
eut le plus à se plaindre.
« Le 19 février 1559 elle assembla devant le
» cardinal de Bourbon plusieurs personnes de
> distinction , et Madame fit remonstrance de
» l'accident de ravissement des religieuses de la
» Madgdelaine lez Orléans ; et fut conclud qu'on
j> feroit venir le confesseur, les prieure, dépositaire,
» bourciere et autres, qui pouvoient estre chargées
» d'avoir favorisé ou dissimulé, afin de cognoistre
2> l'origine de l'entreprise et envoyer un autre
» religieux fidel, et des religieuses *. >
En 1560 l'hérésie a pénétré dans la retraite de
la première réformatrice de l'ordre ; aussi Louise
est obligée d'envoyer des personnes éprouvées pour
en extirper le germe.
« Le 26 juin fut faict acte de profession de foy
> catholique, que firent 40 religieuses du couvent
1 Sainte-Famille, t. m, p. 625.
« Idem, t. m, p. 626.
— 55 —
> la Magdelaine, en présence de Madame Renée de
» Bourbon, religieuse de Fonte vrault, abbesse de
> Chelles, envoyée exprez par Madame Louise,
> sa tante, pour mettre règlement audit couvent ;
> présents le P. Martial Esparvier S confesseur de
> M""® Renée, fr. Jaques Souessoneau, fr. Jean de
> la Haye et frère Gabrielle de Puyherbault ,
» visiteur*. »
Malgré tous leurs efforts, vingt-quatre religieuses
« se rendirent hérétiques. »
En 1563 elle fut obligée , pour maintenir son
autorité sérieusement menacée, d'user de rigueur
contre les religieuses indisciplinées. Voici la lettre
qne son neveu le cardinal Charles de Bourbon,
alors tout puissant, adressa à cet effet au gouverneur
de la ville d'Orléans :
« Monsieur de Monstrueil ,
» Ayant Madame de Fontevrault, ma tante,
» congneu la rébellion et inobedience dont pre-
» tendent user envers elle ses religieuses du
» prieuré de la Magdelaine lez Orléans, mesmement
» quelz la voulent mescongnoistre, et desavouent
» pour leur abbesse et supérieure, a obtenu une
» commission du Roy en ce privé conseil, pour en
» faire transporter quelques unes. Et parce qu'elle
» doubte qu'il luy soit besoing de main forte, je
» vous priray, Mons. de Monstrueil, vous y vouloir
» employer d'aussi affectionnée volunté qu'est la
Grand prieur de Fontevrault en 1556.
' Angers, Arch. de Fontevr., carton Madeleine d'Orléans,
4
— 56 —
» prière que vous en foys ; dont m'asseurant, je ne
» vous la feray plus longue, si non pour pryer Dieu
» vous donner, Mons. de Monstrueil, la saincte et
D digne grâce et l'accomplissement de voz désirs.
» À Meulant, ce XXVII® de septembre 4563.
(Et de sa main) » Vostre bien bon amy,
» CHARLES, Cardinal de Bourbon *. »
Il y eut cependant dans Tordre de Fontevrault,
à cette époque de troubles et de défections, d'éner-
giques natures qui préférèrent la mort à l'abjura-
tion.
« L'an 1562, le 18 décembre, le père Jaques
» Mollet, confesseur de Belhomer, fut tué par les he-
» retiques, qui allèrent environ cent aud. couvent,
i> vers les 9 heures du matin, assaillir l'église, la bri-
» seront et emportèrent tout, prirent ce bon père
» et le mirent à mort, luy traversant le corps d'outre
1^ en outre en plus de six endroits; luy bruslerent
» sa couronne et firent sortir la cervelle ; demeurant
» ferme dans sa foy, sans vouloir se rendre, faisant,
» tout navré qu'il estoit, le signe de la croîx^^t
» demandant pardon à Dieu pour tous. Il rendit
» son ame à Dieu par un coup d'arquebuze *. »
La dévastation des maisons religieuses continue.
En 1569 le prieuré du Brueil fut brûlé par Gabriel
1 Charles de Bourbon, archevêque de Rouen, né le 22 dé-
cembre 1523, légat du pape en 1565, fiit fait roi de France par la
Ligue, sous le nom de Charles X, et mourut à Fontenay-le-Comte,
en 1590.
« Sainte-Famille, t. III, p. 627.
— 57-
de Montgomery *, puis rétabli en 1574 par les soins
de la prieure Gabrielle de Layllière. Cette même
année 1 569 on incendia également le monastère de
Rives, perte estimée 4,000 livres '. En 1570 sœur
Françoise de la Rivière , prieure de l'Espinasse, vit
toute sa maison mise en flammes par Onofre le Brun,
condamné plus tard pour ce fait, par arrêt du Par-
lement , à être traîné sur une claie dans les rues de
Toulouse et à payer 4, 000 livres d'indemnité. Quelque
temps après ces tristes événements , toutes les reli-
gieuses, excepté la prieure, sœur Hélène de Luzi-
nan ' et trois autres, furent menées dans un chariot
à Montauban, et s'y firent protestantes. Elles avaient
eu soin d'emporter tous les titres du couvent *.
Orsan, où expira Robert d'Arbrissel, subit le même
sort en 1572; toutes les religieuses, chassées, se
réfugièrent au domaine du Chastelet.
Louise, craignant que les doctrines de Luther ne
fussent acceptées par les personnes quirentouraient,
mit à exécution l'édit du 6 mai 1569, eo ordonnant
à tous ses officiers, fermiers et domestiques, d'aller
faire profession de foi catholique à Saumur et à
Loudun ".
L'abbaye de Fontevrault dut elle-même soutenir
un véritable siège, à la suite de circonstances que
* C'est ce gentilhomme qui tua le roi Henri II dans un tour-
noi ; U accepta la religion réformée et fut décapité en 1574.
* Sainte-'Familley t. III, p. 628.
' EUe a été abbesse de Sainte-Claire de Nérac en 1594.
* Sainte-Famille, t. III, p. 629,
B Ideniy p. 629.
— 58 —
nous devons rapporter : Charles IX étant venu visiter
cette princesse, elle eut, comme nous l'avons déjà dit,
l'imprudence, en se jetant à ses pieds, d'appeler
toute la sévérité de ce fanatique monarque sur ses
deux neveux ^ alors près de lui, le suppliant de punir
leur apostasie. L'un deux, plus tard, pour se venger
de l'abbesse, assiégea le grand monastère, et l'at-
taqua vivement ; mais il fut, dit l'historien Nicquet,
protégé par l'apparition- « de dix mille martyrs ! »
Nous croyons, nous, que les catholiques du bourg
et les troupes rassemblées par Louise, auxquels
elle donna partie de la somme de 12,000 livres que
lui avait prêtée Jean Deschamps, ont été les seuls,
les vrais libérateurs de cette célèbre abbaye.
Louise , comme toutes les abbesses de la famille
de Bourbon, embellit considérablement Fontevrauit,
employant avec intelligence des sommes importantes
reçues des familles de ses nobles religieuses et de
la munificence des rois et reines de France. Ainsi
Catherine de Médicis, étant près d'elle en 1567, lui
donna 10,000 livres ' pour achever le grand dortoh-,
conmiencé par Renée. On doit à Louise, entre autres
monuments , la salle du chapitre , reconstruite sur
un plan nouveau ' et décorée de peintures murales
exécutées au prix de 219 livres 13 s. 3 d., par
Thomas Pot *.
* Le roi de Navarre et le prince de Condé.
« Sainte-Famille, t. III, p. 628.
8 Gallid Christ,
4 Biblioth. imp., Cartul. de Fontevr, — ^obligeant M. Chris-
taud, ancien directeur de la maison centrale de Fontevraulti et
*.- ^*« . ^
- 59 —
Presque octogénaire, elle demanda pour coadju-
trice Eléonore de Bourbon, sa nièce, grande prieure
de Fontevrault et prieure de Prouillé, à qui elle céda
un pouvoir qu'elle avait habilement exercé pendant
près de quarante années.
Elle mourut le 21 septembre 1575. .
maintenant curé de la Madeleine d'xVngers , ayant fait réparer
cette salle, y installa un prétoire. Sur la porte d'entrée se voient
deux écussons armoiries : l'un est celui de Louise de Bourbon
de Lavedan, et non de Louise de Bpurbon dont nous venons de
parler ; l'autre, deux clefs surmontées d'une vierge^ passe pour
représenter les armes de l'ordre, uniquement par suite d'une
erreur formelle qu'a commise M. l'abbé Barbier-Montault, dans
une savante publication à laquelle M. l'abbé Christaud a cru
pouvoir emprunter ce renseignement (Répert, arc h. de V Anjou,
année 1863, p. 356). Le pape Clément IX, pour reconnaître les
services rendus au Saint-Siège par le duc de Vivonne, devant
Candie, en 1670, lui permit de porter dans « l'écusson de ses
> armes, pour lui et sa postérité, le gonfanon de l'Église. » Or,
Françoise de Rochechouart, fille du duc de Vivonne et 34e ab-
besse de cette communauté, ayant tout naturellement porté
mêmes armes que son père, les pièces nouvelles dont elles étaient
chargées en chef, ont seules causé la méprise de M. Fabbé
Barbier. Ignorant la concession faite par Clément IX, cet archéo-
logue a pensé que Madame de Rochechouart avait introduit
comme brisure, dans l'écusson paternel, les armoiries de l'ordre
qu'elle gouvernait, et pour lors il l'a dit, sans plus amples infor-
mations. (Voir les biographies du duc de Vivonne.)
ÉLÉONORE DE BOURBON.
Eléonore , fille de Charles de Bourbon , premier
duc de Vendôme, et de Françoise d'Alençon, morte
au château de la Flèche, naquit au Louvre le 18
janvier 1532. Elle prit le voile à Notre-Dame de
Soissons *, fut quelque temps au Calvaire , près la
Fère, puis, le 8 mai 1549, se rendit à Fontevrault,
où sa tante Louise la reçut professe. Après avoir été
prieure de Tusson et de la Madeleine d'Orléans * ,
elle devint grande prieure de Fontevrault. Le roi et
Catherine de M-édicis portaient à cette excellente
princesse une vive amitié ; aussi vers 1 569, quand
le riche prieuré de Prouillé ' devint vacant par la
Le P. Anselme.
• Sainte- Famille, t. III, p. 624.
• Prouillé, monastère de Tancien diocèse de Saint-Papoul, et
situé à 20 kilomètres de Carcassonne , fut fondé en 1206 par
saint Dominique. L'archevêque de Narbonne, Tévéque de Tou-
louse et d'autres grands personnages, firent à saint Dominique
d'importantes donations, ce qui lui permit d'élever prompte-
ment ce superbe^monastère. En 1251 Raymond, comte de Tou-
louse, abandonna à ce prieuré la villa Saucenet. Le célèbre
chanoine d'Oxma aimait à instruire lui-même les religieuses de
ce couvent, que Madeleine de Bourbon, sœur d'Eléonore, gou-
verna vingt-cinq ans, et où elle fut enterrée devant la grille du
chœur. En 1598 Eléonore résigna ce prieuré. Sœur Antoinette
d'Ambres la remplaça. L'abbesse de Fontevrault se réserva,
comme pensionnaire, le revenu des seigneuries deSauzains,
— 61 —
mort de sa sœur Madeleine , firent-ils tous leurs ef-
forts pour le lui faire obtenir. Il y eut de grandes
difficultés à vaincre pour amener le pape à lui dé-
livrer ses bulles. Eléonore, comme professe de
Fontevrault, suivait la règle de Saint-Benoît, entiè-
rement distincte de celle de Prouillé. Puis il fallait
surtout détruire dans l'esprit du saint-père l'effet
produit par les dénonciations calomnieuses ,de la
sœur de Saint-Germier , qui désirait vivement pos-
séder ce monastère. Charles IX s'adressa, mais en
vain , directement à Grégoire XIII , puis écrivit , le
23 avril 1570, à Tévêque du Mans, son ambassadeur
à Rome * , le priant de faire toutes les démarches
nécessaires pour obtenir du pape cette faveur. Il
envoya en même temps la lettre suivante au cardinal
de Fer rare, dont l'empire sur l'esprit du saint-père
était notoire :
• 2S apvril i510.
» Mon Cousin , saichant en quelle recommanda-
» cion vous avez toujours heu ce qui est venu de
^ ma part, et dont je vous ay requis, s'offrant pre-
» sentement l'occasion de vous emploier en mon
ï nom envers Sa Sainteté , pour faire pourvoir ma
» cousine Eleonor de Bourbon, seur de mon cousin
» le cardinal de Bourbon , du prieuré de Prouilhé ,
Abran, la Forsatte, Remondains, la villa Savary, la Cassaigne,
el Castel Renoux, louées par elle 900 écus sols. {Gallia Christ.
— Le révérend P. Touron, Vie de saint Dominique, p. 63. —
Angers, Arch. de Fontevr., carton Prouillé. — Dom Vaissette,
Eist. du Languedoc^ t. m, p. 109.)
1 Charles d'Angennes, 73« évéque du Mans, cardinal de Ram-
bouillet.
4
- «2-
» vacuant par le trépas de deffancte MagdaUene
j> de Bourbon, aussi sa seur, je vous prye, mon cou-
» sin, vous emploier et tenir la main envers Sa dicte
j> Sainteté, que son bon plaisir soict pourvoir ladicte
» Eleonor de Bourbon dudit prieuré de Prouilhé ,
» comme je désire ; et, en ce faisant, la dispenser,
* comme il a faict plusieurs aultres , de ce qu'elle
» est de Tordre de Sainct-Augustin, et ledit prieuré
» de l'ordre de Sainct-Dominique. Les grandz et
» recommandables services de mon dict cousin le
j> cardinal de Bourbon pourront induire Sa dicte
9 Sainteté à ce faire, joinct qu'elle ne sauroit faire
» meilheure ellection, ny de personne qui s'acquicte
» mieulx de ceste charge , que ladicte Eleonor de
» Bourbon , ayant esté esleue par les plus notables
^ relligieuses dudict prieuré. Et estant asseuré que
> vous y tiendrez la main de vostre pouvoir , je ne
9 vous en diray daventaige, si non pour prier Dieu,
j> mon Cousin, qu'il vous tienne en sa saincte et
> digne garde.
» Escript à Chasteaubriant , le XXUI® jour d'ap-
. Yril 1570.
» CHARLES.
{Et plus bas) > De Laubespine '. »
«
Catherine de Médicis, le 2 mai 1570, écrivit aussi
à ce sujet, à son cousin le duc de Toscane, une
pressante missive terminée par ces mots, tracés de
* Angers, Arch. de Fontevr., carton Prouillé,
— 63 —
sa main : « Mon cousin, je vous prie qu'elle
> connoisse que nos dictes recommandacions luy
> auront servi.
» Vostre bonne cousine,
> Caterine *. J>
Il entrait sans doute dans les plans politiques de
la mère de Charles IX de s'attacher par la recon-
naissance la sœur du cardinal de Bourbon, qui joua
un si triste rôle pendant la Ligue, et peut-être
aussi la tante d'Henri de Navarre ( plus tard
Henri IV), dans laquelle ce prince avait une entière
confiance. Enfin, au mois de juin 1572, Gré-
goire XIII envoya les bulles si ardemment désirées '.
Deux années après, sur la demande de Louise de
Bourbon et de toutes les reUgieuses de l'abbaye ,
Henri III, alors à Lyon, nomma Eléonore coadju-
Irice, avec future succession. Ses nouvelles bulles
arrivées de Rome, elle prit, le 6 avril 1575, pos-
session de sa charge. Etaient présents à cette
installation : Messire Claude Barjot , chevaUer ,
sieur de Moussy-Barjot, conseiller du roi, président
en son grand conseil ; M^® Adam de la Barre, cha-
noine, grand archidiacre, officiai de l'évêque
d'Angers ; fr. Ambroise de Bourdigné, docteur en
théologie de l'ordre de Saint-Dominique ; Léonard
de Cossé, vicaire général de la dame abbesse ; fr.
Richard de Riancourt, grand prieur de l'Habit;
Martin de Clerville, sous-prieur ; Jehan Vast ; Yvon
1 Angers, Arch. de Fontevr., carton Prouillé,
• Id,, ibid., carton Bulles de Vahhaye,
— 64 —
Jenissant ; Louis Thibaud ; Jehan Gérémie, tous
religieux de Fontevrault ; W^ Jehan de la Barre,
lieutenant général à Ghinon ; Messire Jacques de
Sainte -Marthe, médecin des dames de Bourbon;
Claude Baillif, secrétaire de M"^® Louise ; Thomas
Galouyns, secrétaire de la coadjutrice, etc.; plus
146 religieuses de chœur, à la tête desquelles
marchaient sœur Aliénor de Lavardin, prieure du
cloître, et Jeanne de Villiers, sous prieure *.
Le 28 septembre 1575, huit jours après la mort
de sa tante, Eléonore fut mise en possession complète
de l'abbaye. Henri III n'oublia pas la nouvelle
abbesse ; dès les premières années de son arrivée
au pouvoir, il la combla de faveurs. En 1577, con-
firmation générale, par ce monarque, de tous les
privilèges de l'ordre ; permission de faire conduire
annuellement , de Chemillé à l'abbaye , douze
charges de sel quittes de tous droits. Eléonor, cette
même année, augmente, avec l'autorisation royale,
le nombre des foires du bourg ; elle les porte à
quatre et fait pour les marchands et les acheteurs
des règlements qui démontrent toute la sollicitude
de la châtelaine pour ses vassaux.
Elle obtint aussi le droit de faire juger toutes les
affaires de l'ordre, « tant pour la réforme que pour
> les biens, » au grand conseil du roi ; moyen cer-
tain de gagner ses procès *. Voulant s'entourer de
moines instruits et capables de diriger ses religieuses,
elle envoya à diverses reprises des frères étudier
^ Aiigers, Arch. de Fontevr., carton Prêuillé,
« Saint c-Familley p. 641.
— 65 —
dans les universités renommées et y prendre des
grades. En 1 576 le frère Claude Copin partit pour
l'Université de Paris, ainsi que les frères Philippe
d'Ecosse, François Cerveau et Antoine Morillon. Le
fr. Léonard Boursin fut à Agen *. Le roi, pour con-
solider la réforme, confirma le 21 juin 1577 le
grand arrêt rendu par François l^^. Les députés de
Pie n avaient été obligés, en 1459, de supprimer
plusieurs maisons religieuses, incapables, vu leur
mauvais état, d'accomplir la réformation. Eléonore
eut le mérite d'en rendre quelques-unes à leur
destination première. Elle fit poursuivre ceux qui
avaient, en 1563, brûlé le monastère de Bonbon *;
puis après avoir, à ses frais, réparé les bâtiments,
elle y établit en 1606 sœur Anne de Cerisay avec
4 Angers, Arch. de Fontevr., Trésor de Vordre, 1. 1, p. 18.
* Boubon , prieuré du diocèse de Limoges. R. d*Arbrissel,
quittant Orsan pour aller prêcher en Limousin, reçut à son
arrivée dans ce pays quantité de dons des seigneurs de Magnac
et Montifroy, entre autres une forêt située à 68 kilomètres de
Limoges, et dans laquelle il fit construire ce couvent. Boubon
ayant été , comme nous l'avons dit , brûlé en 1553 par les
huguenots, ses religieuses se retirèrent chez leurs parents.
Eléonore leur abandonna, pour vivre en commun, une maison
lui appartenant, nommée Cubas, où elles habitèrent jusqu'au
jour où elles purent, réformées, rentrer dans leur ancien monas-
tère, rebâti par les soins de cette princesse. — Noms de quelques
P Heures : 1541, AugustineTannoy. — 1557, Marguerite d'Escars.
— 1575, Louise d'Escars. — 1577, Françoise delà Bastide. —
f^W5, Jeanne de la Vigière. — 1668, Françoise Guiot de la
Grange. — 1710 , sœur du Chassaigny. —1727, sœur de Lam-
bertye. — 1732, sœur de Perrière. —1739, sœur de Saint-Pallais.
(.Vngers, Arch. de Fontevr., cartons Boubon, — Pavillon, Hist,
de Robert d'ArbrUsel^ p. 193.)
4*
/
— 66 —
onze religieuses de son abbaye , pour réformer ce
prieuré.
Malgré la pénurie où se trouvait l'ordre, par suite
de la continuation des guerres civiles qui ruinaient
le pays \ Eléonore trouva moyen, à l'aide de ses res-
sources personnelles , provenant du revenu de son
prieuré de Prouillé, d'une pension de 4,200 écus
que lui servait le roi , et de beaucoup d'autres lar-
gesses, non-seulement de réparer ses monastères, sa
grande abbaye, mais aussi d'être très-charitable.
En 1580 elle fit donner pour 1,800 livres de blé aux
pauvres. Quelques années plus tard son aumônier
dressa , d'après ses ordres , un rôle exact c des
» vieux valétudinaires, des petits enfants au-dessous
2» de douze ans, des pauvres honteux et langoureux,
» des malades, des pauvres femmes veuves, et des
» orphelins *; » le tout afin de pouvoir plus efflca-
1 Pour donner une idée de Tétat où se trouvait en 1589 la
fortune de Tordre, nous transcrivons partie d'une délibération
prise dans le conseil : « U n'y a pas de bledz aux greniers pour
» nourrir le couvent huit jours; que cest inconvénient est advenu
» d'aultant que tous les fermiers demandent rabais de deux
» tiers, ou pour le moins de la moitié de leurs fermes, à cause
» des guerres. Et que ceux qui ont charge des affaires du cou-
» vent, et les officiers, n'osent aUer sur les champs, de peur
» d'estre emprisonnez par les gens de guerre, qui sont de divers
» partis. » Voilà ce que dépensait habituellement, par année, la
maison de Fontevrault : a Froment, 1330 septiers 5 boisseaux. —
Méteil, 76 septiers 4 boisseaux. — Seigle, 121 septiers 4 bois-
seaux 1/4. — Mouture, 369 septiers 4 boisseaux. — Fèves, 27 sep-
tiers 7 boisseaux 1/2. — Avoine, 6220 boisseaux. (Angers, Arch,
de Fontevr., carton Greneterie,)
« ID., IBID., Trésor de Vordref 1. 1, p. 33..
- 67 —
cernent soulager leur misère. Les Carmes et les
Pères Cordeliers de Loudun, malheureux par les
mêmes causes qui frappaient Fontevraull, reçurent
annuellement, par ses soins, dix boisseaux de fro-
ment, en échange de prières. Enfin, à la mort de
M« Nicolas de Nincel , son médecin , elle accorda
une position très4ucrative à M® Alphonse Cosnier,
docteur en médecine, pour qu'il pût donner des
soins non-seulement dans son abbaye^ mais encore
à toutes les personnes du bourg \
Eléonore eut toute sa vie pour son neveu Henri
de Navarre une affection maternelle , affection par-
tagée, du reste, car ce monarque chérissait sa tante,
dans le jugement de laquelle il avait, en outre, une
extrême confiance. Chaque fois qu'il vint en Anjou,
son premier soin fut d'aller la visiter dans son ab-
baye, pour converser à Taise sur les affaires de leur
maison et lui confier ses hardis projets. A peine
éloigné de la bonne princesse il lui adressait les
lettres les plus tendres, les plus affectueuses, mon-
trant le cas qu'il faisait de ses avis, et surtout le
caractère loyal du successeur d'Henri III.
Malheureusement trois de ces lettres nous sont
seulement connues et font vivement regretter la
perte des autres. Dans la première, dul5 marsl587,
le neveu se moque un peu de son oncle le cardinal
de Bourbon, que les Ugueurs avaient enlevé de son
château de Gaillon et conduit à Péronne :
« Ma Tante , pour respondre à vostre petit billet
* Angers, Arch. de Fonte vr., cartons la Lande en Beauchêne»
— 68 —
» et à ce que Madame de Soissons * vous escript, je
» suis bien ayse que vous et elle ayez cogoeu la
j> captivité où l'on destient nostre prochain , cela
3> me servira devant Dieu et les hommes pour ma
» justification. Le bonhomme est bien enjobeliné ,
» mais j'espère que nous le dejobUnerons. Il y a
j> beaucoup qui ne craignent pas que cela advienne,
» comme 'la venue de mes amys, 'qui sera. Dieu
» aydant , un jubilé plus salutaire pour cest Estât ,
» que celuy dont la Royne Mère menace ceulx qui
y> m'ont veu. J'espère, quelque jalousie et mescon-
7> tantement qu'on en ayt , avoir ce bien de vous
» voir encore de brief, et en dussent-ils crever. Sur
D ce, nous en deviserons plus particulièrement ; et
» cependant, faictes antierement estât de l'affection,
2> amitié et obéissance de celuy qui est autant vostre
» que sien.
» HENRY \ n
Quelques mois plus tard , cette même année , à
propos des guerres, il lui écrivait :
« .... Si vous entendez nouvelles particulières
D des brouilleries du monde de delà , je vous sup-
» plye m'en faire part.
» Il seroit bien aveugle , qui ne verroit mainte-
» nant clair aux desseings des ennemys de nostre
» maison. Pour moy , je n'y trouve poinct de reli-
1 Nièce d'Eléonore.
« B. de Xivrey, Recueil des lettres missives d'Henri IF, t. II,
p. 276.
— 69 —
» gion. A Dieu, ma Tante, tenez-moy en vos bonnes
» grâces, comme celuy qui les honore fort, et qui est
> Vostre plus affectionné nepveu, à vous obéir,
D HENRY '. ^
Quant à la troisième lettre, nous la publions tout
entière , car elle a , ce nous semble, une véritable
importance historique :
a Mai 1588,
» A Madame de Fonteyrault,
» Ma Tante, il ne sauroit rien venir de vostre
» part que je ne reçoipve comme de ma propre
» mère. Je scais que les advertissemens que me
» donnez procèdent d'une entière et parfaicte ami-
» lié que me portez ; mais vous scavez quelle est
» ma resolucion, de laquelle il me semble que je ne
» doibs me départir, et que vous mesme ne me le
» devez conseiller, cognoissant (comme je vous ay
» toujours dict) que ce n'est à la religion qu'on en
» veult, ains à l'Estat, ainsi que vous peut assez
» témoigner ce qui est nagueres advenu à Paris, et
» l'entreprise que la Ligue a voulu, ces jours pas-
» sez, faire sur le Roy, qui est plus catholique que
» pas un d'icelle '. Toutes fois , vous voyez si on a
» laissé de le traicter en huguenot. Croyez , ma
» Tante, que ceulx qui ont les armes en la main ne
* B. de Xivrey, Recueil des lettres missives d'Henri IV, t. II,
p. 279.
^ La journée des barricades, le 12 mai 1588.
-70 —
» manquent jamais de prétexte ; et quant à moy
D aussy, jenem'arreste poinçtlà, mais je me re-
» mects en la bonté de Dieu, qui cognoist la justice
» de ma cause et'qui la scaura discerner des perni-
» cieux desseings des meschans. Celuy qui donne
» et conserve les couronnes, conservera, s'il luy
» plaist, à nostre Roy celle qu'il luy a donnée. Il se
» fault resouldre à sa volonté et obéir à ses juge-
» ments, selon que j'escris à monsieur le président
» Barjoi * pour vous faire entendre. Croyez que je
» vous aime et honore comme ma propre mère, et
» que n'aurez jamais plus de part en parent ou
» amy que' vous avez, qu'en celuy qui est
» Vostre affectioné nepveu, à vous obéir.
»
HENRY
Ce que désirait le plus vivement la fervente ca-
tholique, c'était de voir son neveu abandonner la
reUgion protestante. « Elle fit faire des prières con-
» tinuelles pour ces fins, y ayant tous les jours
» deux reUgieuses qui faisoient la sainte commu-
» nion et qui demeuroient tout le jour devant le
* saint sacrement, en prières; ce que faisoient
» toutes les religieuses alternativement. Le dit Roy
» son nepveu la vint visiter plusieurs fois , qui te-
» moigna en toutes occasions combien elle luy
» estoit chère. Estant venu une fois icy, pendant les
i Sans doute le président du conseil du roi, M. Barjot-Moussy,
qui était à la prise de possession de coadjutorerie d'Eléonere.
« B. de Xivrey, ibid., t. H p. 378.
— 71 —
» troubles , avant sa conversion , elle luy fit baiser
une croix, à la porte, avant son entrée au de-
» dans *. »
Cette petite scène de famille , qui donnerait le
motif d'un bien charmant tableau, eut peut-être lieu
au mois de juillet 4579. Henri , alors âgé de vingt-
six ans, vint passer un jour et une nuit à l'abbaye;
nous allons donner le procès-verbal authentique de
cette visite :
« Ordre tenu en la réception et ^raittement
» fait au Roy de Navarre par Madame
j> l'abbesse de Fontevrault, sa tante, le dit
» Roy l' aïant esté visiter en ladite abbaïe .
1» Au moys de juillet de l'année 1579, le Roy de
> Navarre, estant en la ville de Saumur avec toute
9 sa maison, donna advis à M"^® l'Abbesse de Fon-
» tevrault, dame Eléonor de Bourbon, sa tante,
1 soeur aisnée du Roy, son père, quil l'iroit veoir.
» Geste dame, résolue de bien recevoir ce prince,
» ne l'aïant veu il y avoit longtemps, sachant quil
i> approchoit , le vint attendre à la porte de son
j abbaïe, accompagnée d'un grand nombre de ses
B religieuses. Le Roy de Navarre estant à cheval
> dans la cour, et voïant que lad. dame l'attendoit
:p à la porte de l'abbaïe, mit pied à[terre, et, tenant
• son chappeau à la main, la vint baiser les larmes
I» aux yeux. L'ayant saluée, elle luy présenta la
> dame de Lavedan, l'une de ses religieuses, quy
i Sainte-Famille, t. lU, p. 640.
— 72 —
la; succéda en lad. abbaïe> et lors lad. dame lui
dist : € Monsieur mon nepveu, entrez, s'il vous
plaist, dans ceste maison, ou vous donneray à
souper. Et le Roy entra seul.
» En ce mesme temps arriva en lad. abbaïe
Madame la princesse de Conty,,mere de Madame
la comtesse de Soissons, et qui fut receue en
mesme temps que le Roy de Navarre.
> Le soupper fiist faict en une grande salle ten-
due d'une tapisserie de toile de Hollande, par
bandes, recouverte de carrez de point couppé.
Le daiz avec sa queue estoit de mesme.
» Lad. dame abbesse estoit assize au hault bout
de la table , le Roy de Navarre au milieu , et
Madame la princesse de Gonty au bout, tous trois
d'un mesme costé. i
» La viande fust apportée par plusieurs relli-
» gieuses vestues ainsy qu'elles sont lorsqu'elles
» hantent au chœur ; à la teste il y avoit une vieille
» relligieuse qui portoit un baston à la main, comme
» sont les maistres d'hostelz des Roys ; au hault de
» ce baston estoient les armes de la maison de
» Bourbon.
La dame de Lavedan, de laquelle est parlé
» cy - dessus , servoit d'eschanson , aïant à son
» costé deux de ses compaignes, l'une desquelles
» servoit de trenchant, l'autre de servant.
» Le premier service achevé, celle qui servoit
» de M® d'hostel retourna au second service, et
» ainsy au troisième.
» Le Benedicite comme les grâces furent dittes
— 73 —
» par deux relligieuses qui estoyent à costé de celle
» qui servoit de M® d'hostel.
» Le souppé parachevé, le Roy, Madame l'Abbesse,
» la princesse de Conty, devisèrent longtemps, puis
» le Roy de Navarre fust mené par Madame la
n princesse de Conty coucher en une maison où
» estoyt logée lad. dame, qui est en la basse court,
» et qu'on nomme la maison des estrangers ; dont
» il partit le lendemain matin, pour s'en retourner
» à Saumur *. »
La bonne princesse se servit souvent de son puis-
sant crédit sur l'esprit d'Henri IV pour obtenir la
grâce de certains coupables. « Un hermitte déguisé
» et bien disant, qui estoit entré à Fontevrault du
» temps de M°™® Eleonor^ lequel fut pris devers Paris,
» et longtemps prisonnier au Four l'Evesque ; et
» sans lad. dame, qui supplia le Roy pour luy, il
» eust esté pendu, à cause du déguisement d'habits
> avec lequel il fut trouvé faisant le prédicateur et
» le religieux, à un lieu, et le gentilhomme en un
» autre'.
» En 1603, par les requestes et supplications
» continuelles que mad. dame Eleonor fit à son
» nepveu Henry le Grand, il luy accorda le retour
» des R^* Pères Jésuites en France , qui estoient
» exilez depuis neuf ans. De plus, j'ai appris des
» R<*» Pères Jacobins , demeurant au prieuré de
» Prouillhé, qu'ensuite de la mort funeste perpétrée
» contre la personne sacrée du Roy de France
1 Biblioth. imp., collection Dupuy, 92, n» 478.
* Ibid.; Notes sur la Règle de Marie de Bretagne. •
S
* Henry III, par Fr. Clément, religieux du mesme
» ordre , il fut donné au commencement du règne
» d'Henry IV un arrest par lequel le prieur (Fr.
» Bourgoing) des Jacobins de Paris, qui avoit trempé
» en ce crime, fut condamné à estre tiré à quatre
3> chevaux, et tous les religieux de l'ordre à sortir
» du Royaume, mais que mad. dame Eleonor,
» conune prieure du couvent de Prouillhé dudit
!► ordre des Jacobins, ne pouvant pas empescher
> l'exécution du premier, mit empeschement audit
» exil, et me témoignèrent (jne toute la compagnie
9 luy en avoient cette obligation *. »
Ce fut encore grâce à l'influence de cette reli-
gieuse, que le R. P. Joseph put établir à Saumur,
malgré l'oppositiondugouverneurDuplessis-Momay,
un couvent de Capucins, désiré par une partie de la
population *.
Au mois d'avril 1610 l'abbesse de Fontevrault
remplaça la grande prieure, sœur Avoise de la
Chaussée, extrêmement âgée, par M"^® Louise de
Bourbon de Lavedan , qui devait lui succéder '.
Enfin , sentant qu'elle ne ppuvait plus , vu sa vieil-
lesse et ses infirmités, régir son importante mai-
son , elle fit nommer Antoinette d'Orléans pour sa
coadjutrice.
Eléonore , comme ses tantes Renée et Louise ,
dépensa des sommes considérables pour réparer
et augmenter les bâtiments de l'abbaye. Ces som-
» Sainte-Famillej t. lU, p. 645.
« Vie du P. Joseph, t. U, p. 37.
• Sainte-Famille, t. ffl, p. 647.
mes s*élevèrent à 68,418 livres. Elle donna à
Notre-Dame-des Ardillers de Saumur une vierge
d'or du poids de 2 marcs * .
Les religieuses de Fontevrault cachèrent avec le
plus grand soin , à cette bonne princesse , la mort
d'Henri IV pour ' lui éviter peut-être le remords
que lui eût causé le souvenir de la grâce arrachée
par elle à son malheureux neveu, en 1603. Elle
mourut le 26 mars 4611 ', quelques mois après
celui qu'elle avait tant aimé, justifiant par tous les
actes de sa vie ces paroles du cardinal Baronius,
son contemporain : « Eleonor de Bourbon gouverne
> maintenant ce grand monastère, composé de
j deux cents religieuses , outre les religieux , et
> commande à tout l'ordre avec une haute estime
> et une réputation universelle de pieté , prudence
> et sainteté '. »
Ses armes étaient : « trois fleurs de lys d^or, au
> bâton de gueules péry en bande *. j>
* Bodin, t. II, p. 355.
% Nicquet; HisL de Fontevrault^ p. 506.
* Annales ecclésiastiques^ t. XII, année 1117.
* Sainte-Marthe, t. II, p. 130.
ANTOINETTE D'ORLÉANS,
COADJUTRICE.
Antoinette , fille de Léonor d'Orléans , duc de
Longueville, et de Marie de Bourbon, à la mort de
son mari Charles de Gondy, duc de Retz, se retira
du monde âgée seulement de vingt-sept ans, et
laissant sa grande fortune à son fils Henri, qui
épousa Jeanne de Scépeaux \ Elle choisit pour re-
fuge un couvent de Feuillantines de la ville de Tou-
louse. C'est là que vint la trouver sa nomination de
coadjutrice, avec future succession.
Antoinette refusa tout d'abord cette dignité, pré-
férant vivre obscure dans son paisible monastère.
Mais devant une injonction du Saint-Père, il lui
fallut obéir. Elle partit donc pour Fontevrault, où
elle arriva le 25 octobre 1604 '. Après de longues
hésitations, elle prit possession de la coadjutorerie
le 29 septembre 1607 ', avec l'intention formelle
de ne pas succéder à Eléonore de Bourbon, ne trou-
vant pas l'ordre de Fontevrault assez austère ; car
l'abbaye, malgré qu'elle eût accepté la réformation,
était loin d'être revenue à la rigide observance de
• Mainte-Famille, p. 9G7.
• Nicquet, Hist. de Fontevr,, p. 508.
• Trésor de Fontevr., 1. 1, p. 797.
- 77 -"
la règle de Marie de Bretagne. Cependant, comme
la coadjutrice aimait beaucoup la vieille abbessc ,
elle ne voulut s'en séparer qu'après lui avoir fermé
les yeux. Cette cérémonie terminée , malgré les
supplications des religieuses , du roi et de la reine ,
elle quitta le 26 juillet 1611, l'abbaye, après la nomi-
nation de celle qui devait la remplacer : M«^® Louise
de Bourbon de Lavedan,
Antoinette d'Orléans se retira dans un des prieu-
rés de Fontevrault, l'Encloître, en Gironde ; c'est
de ce monastère qu'elle partit en 1617, avec vingt-
cinq religieuses, pour aller à Poitiers fonder un
nouvel ordre : le Calvaire,
11 est une pensée de cette religieuse qui la dé-
peint tout'entière : « Il faut, disait-elle, que la
^victime aille elle-même à V autel, on ne doit pas
> l'y traîner *• d
Elle mourut à Poitiers le 25 avril 1618, après
avoir vécu seulement six mois dans sa nouvelle
congrégation.
1 Hist. de la vie du P, Leclerc de Tremblay, t. I, p. 72.
LOUISE DE BOURBON DE LAVEDM.
Sur rénergique refus d'Antoinette d'Orléans, le
roi et la reine envoyèrent à Fontevrault Armand de
Richelieu, évêque de Luçon, avec la double mis-
sion de coDMnuniquer aux religieuses leurs lettres
portant injonction de choisir, par la voie de l'élec-
tion, une nouvelle abbesse entre la grande prieure
Louise de Bourbon de Lavedan, et la prieure du
cloître, Marie Drouin. Ce prélat devait aussi sur-
veiller les troubles qui pourraient survenir à cette
occasion. Voici la lettre de la reine, alors régente :
« Chères et bien aymées,
» Nous avons eu à desplaisir d'entendre qu'au
» lieu de recevoir quelque consolation de la perte
» que vous avez faite de feu nostre tante de Bour-
D bon, vostre abbesse, vous avez de nouveau sujet
i de vous attrister sur la resolution en laquelle
» est nostre cousine d'Orléans, d'abandonner la
» charge qui luy est écheiie. Nous désirerions qu'il
» fust en nous de la détourner de cette volonté, et
» l'exhortons par nos lettres, autant qu'il nous est
i> possible , de vouloir demeurer en cette dignité ;
» mais au cas qu'elle ne s'y voulust disposer, le
»Roy, nostre honoré s 9^ et fils, vous mande
> quelle est, sur ce, son intention, à laquelle nous
— 79 -
voulons croire que vous ne manquerez de vous
1 conformer antierement, comme vous debvez
» faire et vous en prie , surtout que vous avez à
» désirer sa bonne grâce, avec vostre conservation
ï et repos asseurés ; que cela nous conviera à
> vous les moyenner , et à vostre ordre , selon les
» occasions qui s'en offriront.
> Donné à Fontainebleau, le 27 avril 1611.
)) MARIE \»
L'évêque de Luçon, assisté du P. Claude Coppin,
grand prieur de l'Habit, fit, après avoir donné con-
naissance de cette lettre , procéder dans la salle
du chapitre à l'élection de Tabbesse. Le choix
tomba sur sœur Louise de Lavedan. Aussitôt Ri-
chelieu partit rendre compte à la régente de ce qui
s'était passé sous sa présidence. Il paraît que le
calme ne régna pas précisément dans le monastère,
à la suite de cette élection, car la reine adressa la
lettre suivante aux religieuses :
« Chères et bien aymées,
» En l'occasion du décès de feu nostre tante
»de Bourbon, vostre dernière abbesse, et le
» trouble que nous craignions qu'il en pust arriver
» en vostre ordre , mesme par la resolution prise
>par nostre cousine d'Orléans de s'en retirer,
> nous avions commis au sieur evesque de Luçon
» de vous faire entendre le remède que nous ju-
gions y debvoir estre apporté ; à quoy ne pouvant
* Biblioth. imp., CartuL de Fontevr.
>
— 80 —
> trouver bon d'entendre que quelques unes d'entre
» vous ayent rendu si peu de respect au lieu de ce
» que nous en attendions , veu le zèle que nous
> avons toujours témoigné à vostre conservation et
9 repos, nous voulons croire qu'estant désormais
» plus amplement informé de nostre volonté, vous
» serez plus obéissantes et aymerez mieux gouster
» les fruits de nostre affection et bienveillance, que
> de vous en priver, faisant autrement. Le Roy,
> nostre tres-honoré seigneur et fils, et nous, avons
> nommé pour Abbesse Chef de vostre ordre, sœur
» Louise de Bourbon , vostre grande prieure ,
» comme très capable de la charge ; à laquelle
» nous vous enjoignons 'très expressément d'obéir
» sans contredit et résistance , surtout que vous
» avez à désirer la conservation de nostre bonne
i> grâce ; à quoy nous vous asseurons que ne ferez
> faute.
» Donné à Fontainebleau, le 21 juin 1611.
» MARIE \>
A cette lettre étaient joints le brevet de la nou-
velle abbesse et une autre lettre de Marie de Mé-
dicis, informant Louise de Lavedan qu'elle mettait
à la disposition d'Antoinette tel couvent de l'ordre
qu'elle voudrait choisir. L'ancienne coadjuirice se
dirigea vers l'Encloître (Gironde), accompagnée de
Marie Drouin, de S. Gabrielle de l'Esperonnière ' et
1 Sainte- Famille, t. HI p. 659.
• Morte au Calvaire, à Poitiers, le 21 juillet 1641, âgée de
68 ans.
- n -
(la p. Léonard Boursin, son confesseur, disant un
éternel adieu à son ancienne demeure.
Louise de Bourbon de Lavedan, née le 21 octo-
bre 4548, au château de Moulins \ était petite-fille
de Charles de Bourbon , vicomte de Lavedan , fils
naturel du duc Jean de Bourbon. Sa mère ftit
Françoise de Silly. Louise prit possession de sa
charge le 24 janvier 1612 et fut bénie par l'évêque
de Luçon, RicheUeu, le 29 juillet *. Ayant ensuite
consulté toute sa communauté, elle se fit remplacer
comme grande prieure par Gabrielle de Craon.
Un des premiers soins de la nouvelle élue fut,
aidée par le R. P. Claude Çoppin, prieur de l'Habit,
« homme zélé et expert aux affaires, » de mettre un
peu d'ordre dans les dépenses de la maison, en-
dettée de près de 40,000 livres '. Voulant, comme
Eléonore de Bourbon, relever le niveau des études
théologiques, elle dépensa près de 12,000 livres
pour établir un séminaire de moines à l'Encloître,
sous la surveillance d'Antoinette; tentative qui ne
lui réussit pas , puisqu'elle se vit obligée de Jes
rappeler à Fontevrault, en 1614, où elle les plaça
sous la direction d'un bénédictin anglais. Au départ
de ce dernier, les plus capables des élèves allèrent
continuer leurs études chez les Pères Jésuites de
la Flèche, avec ane pension de 600 livres. Enfin elle
répara les bâtiments du couvent de l'Habit, négli-
gés depuis longtemps.
* H. Nicquet, Hist. de Fontevr., p. 545.
> Sainte-Famille, p. 661.
' Idem, p. 665.
5*
- 82 —
Les religieuses de Fontevrault, appartenant pres-
que toutes à des familles riches, jouissaient de pen-
sions leur permettant de vivre à leur guise et de
se soustraire à la règle, qui prescrit la vie en com-
mun. Louise voulut que définitivement il n'en fût
plus ainsi. Antoinette l'avait également ordonné,
mais sans succès. Puissamment aidée par le grand
visiteur de l'abbaye, le P. Gabriel de Sainte-Marie,
l'abbesse contraignit à la fin ses filles à vivre de la
sorte, ayant soin, pour les y exciter, d'abandonner
au commun le revenu des prieurés de Saint-Bibien,
Lafont-Saint-Martin, Cubas et PontchoUet, dépen-
dant de sa manse abbatiale. Elle imposa par là ce
genre d'existence aux membres des prieurés. Plu-
sieurs personnes étrangères à l'ordre vinrent lui
offrir leur concours pour cette réforme. En 1616
Robert Bonnette, doyen de l'église de Chartres,
donna aux reUgieuses de Belhomer 4,800 Uvres, à
la condition qu'elles vivraient en conunun et ne
retiendraient aucune chose en propriété ^ Le grand
visiteur ayant remarqué, pendant son séjour à
l'abbaye, « que le Saint-Sacrement reposoit sur
j» l'autel , à la mode ancienne , dans une custode
» pendante , ordonna à madite Dame de faire faire
> un tabernacle, ï> qu'elle fit exécuter à Poitiers,
au prix de 640 livres *.
Antoinette d'Orléans conçut, avec quelques-unes
de ses compagnes, le projet de créer un ordre nou-
veau , sans en informer M"*« de Lavedan, Il y avait
* Sainte-Famille^ p. 665,
« Idem, p. 662.
— 83 -
Ik un véritable danger pour Fontevrault, car bien
des religieuses pouvaient suivre l'exemple de celles
de TEncloître. Une telle résolution amena donc une
lutte entre l'abbesse et Antoinette.
Cette dernière , puissamment secondée par René
Brochard, sieur des Fontaines, conseiller du roi, et
par les plus riches seigneurs du Poitou, fit bâtir à
Poitiers , dans le clos Guerrin , paroisse Saint-Por-
chaire, un monastère qui coûta 50,000 livres *. Le
pape Paul V, par un bref du 26 avril 1617, donna
à Antoinette Tautorisation de se transporter dans sa
nouvelle maison. Le roi , le 4 octobre de la même
année, après avoir approuvé le bref du Saint-Père,
écrivit à son sénéchal du Poitou : « Mettez en
> possession, de par nous et nostre autorité, nostre
• cousine et ses religieuses dans le couvent et mo-
> nastere qui leur a esté basty en laditte ville de
> Poitiers.... *. i>
En exécution de cet ordre, le 24 octobre 1617
le sieur Philippin Caraud , doyen de TégUse « Mon-
> sieur S* Hilaire le Grand, » reçoit de Tévêque de
Poitiers la mission d'aller à l'Encloître et d'ame-
ner à Poitiers les sœurs feuillantines. Pour lors,
« .... ladite dame M™® d'Orléans et vingt-quatre
> religieuses sortirent dudit monastère de l'En-
1 cloistre et montèrent en trois divers carrosses
> et une Utiere , avec la dame marquise de Villars
» et dame de Roviget, et nous l'accompagnasmes
> depuis ledit lieu jusqu'en la ville de Poitiers , où
* Angers, Arch. de Fontevr., carton VEncloître,
* Ibid.
— 84. —
> nous arrivasmes vers les 5 ou 6 heures du soir
> (le 25) , avec les susdittes dames marquise de
1 Villars et de Rouget, et les rendismes aux portes
» dud. monastaire, où y avoit grande affluence de
» peuple; où estant rentrées et s'estant rendus dans
> la sacristie d'une chapelle dud. monastaire, nous
» leur declarasmes que nous les mettions en pos-
» session réelle et actuelle dud. monastaire; et, en
> ce faisant , accompUssions la volonté et mande-
^ ment de Sa Sainteté portés par led. bref \ o
Louise de Lavedan, très-irritée en apprenant ces
événements, voulut maintenir intactes ses préroga-
tives ; elle fit alors immédiatement opposition et
appel comme d'abus, le tout signifié le 10 no-
vembre 1617 à l'évêque de Poitiers, à M. Jean
Fillaud , grand-vicaire , à la Révérende Mère dame
Antoinette d'Orléans , au sieur Caraud , doyen de
Saint-Hilaire , au provincial et au supérieur des
Feuillants de Poitiers. Pendant ce temps on se re-
muait beaucoup des deux côtés : d'une part, le car-
dinal de Retz, beau-frère d'Antoinette, et surtout le
R. P. Joseph, l'éminence grise qui fut le directeur
général de l'ordre du Calvaire , soutenaient de tout
leur pouvoir les feuillantines ; de l'autre , le comte
de Soissons et sa sœur Marie de Bourbon, plus tard
coadjutrice de Fontevrault , appuyaient de leur
crédit les prétentions de Louise de Lavedan. Enfin
le 6 février 1618, le roi, voulant terminer ce diffé-
rend, envoya à Poitiers le cardinal François de
Sourdis, archevêque de Bordeaux, avec ordre d'exa-
* Angers, Arch. de Fontevr., carton l'Encloitre,
- 85 —
miner les droits respectifs des dissidentes. Le
prélat , après s'être fait rendre compte exact des
réclamations de chaque partie, dit qu'il fallait prier
le Saint-Père d'interpréter son bref du 26 avril 1 61 7;
puis il ajouta : < Jusqu'à la réponse , nous exhor-
» tons efficacement lesd. Dames de ne rien innover
» sur les formes de vivre des religieuses de l'En-
» cloistre et de Poitiers, et de se maintenir en leur
» coutumier esprit de douceur et d'édification. »
Au mois de mars 1618 l'abbesse de Fontevrault,
apprenant que le nouvel ordre du Calvaire voulait
fonder une maison à Angers , écrivit à l'évêque
diocésain , qui lui fit cette sage et spirituelle ré-
ponse * :
y> Madame,
» J'ai toujours estimé que l'esprit de paix et de
> douceur devoit servir de premier fondement à
» tout établissement qui se fait pour la gloire et
> honneur de Dieu. C'est pourquoi le différend qui
» est entre vous et Madame d'Orléans m'a empêché
> jusqu'à présent d'entendre au dessein qu'elle a
» d'ériger en cette ville un hospice ou couvent de
» religieuses réformées de l'ordre de Saint-Benoist
» ou bien de Feuillantines. Cette considération
» m'ayant retenu jusques à cette heure, vous pouvez
^ facilement imaginer combien je le serai à l'avenir,
> ayant appris par la bouche de votre religieux et
» par les pièces qu'il m'a fait voir, l'intérêt qu'avez
* Angers, Arch. de Fontevr., liasse intitulée : Procédure,
J^Encloilre:
— 86 —
» en cette affaire, laquelle, je vous assure, demeu-
» rera toujours en son état , jusqu'à ce que vous
j> en consentiez l'exécution. Mon devoir me fait vous
» donner ces assurances, etnon les courtoises offres
» que me faites de votre amitié , que je voudrois
» volontiers pouvoir reconnoître en quelque occa-
ii> sion qui me fût toute libre, et non forcée, comme
i> est celle qui se présente, afin que plus clairement
» je vous pusse témoigner, par les effets, rextréme
» contentement que je reçois de votre affection,
» de laquelle j'attends avec autant d'impatience
» cette occasion , qu'avec toute sorte de vérité je
» vous prie croire que je suis, Madame, votre très-
» humble serviteur.
» Guillaume, évêque d'Angers.
» Angers, ce 5® d'avril 1618 S >
Enfin il paraît que de Paris et de Rome arrivèrent
des ordres qu'il fallut exécuter, car le9 juilletl6l9
Louise rendit une ordonnance dans laquelle nous
lisons : «... Et à ceste fin, nous départons de touttes
» oppositions et appelations interjectées ou à inter-
3) jecter, faictes ou à faire, leur donnant nostre be-
» nediction {un peu forcément, croyons-nous), à la
» charge de rendre et restituer les biens , deniers,
D meubles et autres choses quelconques qu'elles
y> peuvent avoir, appartenant à nostre ordre.
Signé : » Sœur Louise de Bourbon '. •
* GuiUaume Fouquet de la Varenne, évêque d'Angers de 1616
à 1621 .
' Revue d'Anjou, Journal Cie Louvet
— 87 —
Le Calvaire d'Angers fut définitivement installé le
27 avril 1619, et pour première prieure il eut sœur
Marie Michel, de Nantes.
Louise, trouvant quelqu'inconvénient à maintenir
ses religieux chez les PP. Jésuites de la Flèche ,
résolut en 1618 de fonder dans cette ville un sé-
minaire. Dans ce but, elle acquit du sieur François
d'Estival une maison au prix de 6;,000 livres, nomma
pour supérieur le P. Monteage, et plaça sous sa di-
rection douze reUgieux écoUers. Le pape , par un
bref du 12 juillet 1621 , confirma cette création, et
accorda à M"*® de Lavedan l'autorisation de leur
donner, outre une pension, le revenu du prieuré de
la Lande en Beauchêne (2,000 Uvres)^ qui dépen-
dait de la manse abbatiale \ Les prieurés les plus
riches de l'ordre contribuèrent aussi, pour une
somme de 2,764 livres, à cette création de l'abbesse.
Jeanne-Baptiste de Bourbon « ayant reconnu par
» expérience qijie cet établissement ne pouvoit pro-
1» duire tous les bons effets que l'on avoit conçu,
» n'étant conforme à la règle et à l'institut de l'or-
> dre % » obtint en 1 645, de son neveu Louis XIV,
d'étabUr un couvent de filles à la Flèche , et tout
auprès un couvent de frères , comme cela existait
dans les autres monastères de l'ordre. Cette nouvelle
maison fut appelée le Petit-Fontevrault '.
> Sainte-Famille, p. 663.
' Angers, Arch. de Fontevr., carton la Flèche,
* T. Cauvin, Armoiries du diocèse du Mans, Les armoiries
de ce prieuré étaient : d'or, à un soleil de gueules et un chef
ffvxiT, chargé de trois fleurs de lys d'argent.
— 88 —
En 1618 Louise, voulant adopter « le Bréviaire
j du concile de Trente, » envoya à Paris le P. Jean
Monteage en acheter les exemplaires nécessaires.
II dépensa 2,000 livres *. Marie de Médicis, allant à
Angers, vint le 42 octobre 1619 visiter à Fontevrault
M™® de Lavedan , et l'encouragea fortement à ter-
miner cette réformation si difficile. L'abbesse, après
le départ de la |reine, restaura trois prieuré;3 qui
avaient été, nous l'avons dit, ruinés par la guerre :
Sainte-Croix, Saint-Aignan et Montmère, puis y en-
voya des religieuses pour les réformer et les remettre
dans leur état primitif*. Cette même année M"^® Marie
de Bourbon, fille du comte de Soissons, fut élue
coadjutrice de l'abbaye, charge qu'elle ne garda pas
longtemps, puisqu'en 1624 elle quitta le voile pour
épouser Thomas, prince de Savoie-Carignan *.
Les reUgieuses et les moines supportaient avec
peine la rigidité de la règle de Marie de Bretagne ,
car ils n'avaient pas encore perdu le souvenir de la
grande liberté qu'elle leur avait enlevée ; aussi en
1621, à force de suppUcations et d'obsessions, ame-
* Sainte-Famille, p. 665.
* Idem, p. 67i.
8 Marie de Bourbon, née à Paris le 3 mai 1606, fut voilée par
Eléonore de Bourbon, le 3 avril 1610, mais ne voulut pas être
professe, quoiqae nommée coadjutrice. Elle quitta l'ordre le 12
octobre 1624 , épousa le 6 janvier 1625 le prince de Carignan,
et, veuve en 1656, mourut à Paris âgée de 86 ans. « Se voyant
» fort incommodée dans ses couches, elle se voua au saint sang
» du miracle de Fontevrault et y fit présent d'une petite vierge
» d'or, longue comme le pouce, représentant une Assomption,
» où il y a six anges qui l'entourent, laquelle est toute couverte
• de diamants, et qui est d'un grand prix. • {Sainte-Familh',
p. 665. — P. Anselme, 1. 1, p. 351.)
— 89 —
nèrenl-ils U^^ de Lavedan à solliciter du pape la
révision de cette règle. Grégoire XV , par diverses
bulles, chargea les cardinaux de la Rochefoucault ,
de Retz et de Richelieu d'y faire les modifications
qu'ils croiraient utiles. Mais, à l'insu de ces com-
missaires , on inséra dans les nouveaux statuts tant
de clauses tendant à la destruction de ^'esprit fon-
damental de l'ordre, qu'ils ne purent être, « quoi-
> qu'imprimés en deux divers caractères, » acceptés
par personne. La plus opposante fut surtout la jeune
coadjutrice Marie de Bourbon. Il fallut donc conti-
nuer de vivre sous l'empire de cette règle si gê-
nante , sauf à la réattaquer avec adresse , à la pre-
mière occasion \
Louise de Bourbon de Lavedan voulant imiter
les abbesses de la famille à laquelle elle apparte-
nait, résolut d'embeUir la principale égUse de son
monastère. A l'instigation de son grand visiteur, le
P. Richer, abbé de Saint-Vincent-du-Mans , elle
s'adressa à M. de la Barre, architecte habitant
cette ville, pouf qu'il exécutât son projet. Il traça
le plan du nouvel autel , aidé d'un autre artiste ,
M. Michel, puis bâtit l'arcade sous laquelle devait
reposer le nouveau tombeau du fondateur. Elle
commanda en 1621, à Paris, « l'effigie en marbre
j» blanc du bienheureux Père Robert, pour le prix
» de 800 Uvres, avec la table de marbre noir qui la
» supporte ; et fut rendue icy le 10 juin 1624 ; et
» après qu'elle fut posée sous lad. arcade, fut baillé
* H. Nicquet, Hist. de Fontevr. — Sainte-Famille, p. 674.
— 90 -
» au maistre, outre 800 livres comme il appert par
> son acquit , 75 livres ; et pour la dépense du
» maistre, 12 livres. > Le grand autel, l'arcade, la
statue et les accessoires coûtèrent la somme de
9,674 livres. La consécration du nouvel autel fut
faite le 28 octobre 1623, par l'évêque de Nantes,
M9^ Philippe Cospeau. « On enferma dans la pierre
» du devant , en un petit coffre de plomb , les re-
» liques du lait et des cheveux de la Sainte Vierge,
» dans une petite phiole ronde d'argent doré ; plus
» des reliques de saint Jean-Baptiste , de saint
» Jean l'evangéliste , de saint Benoist et de saint
» Louis \ i>
Fatiguée, « à cause de sa caducité et grande
» charge qui accompagne son office d'abbesse chef
» d'ordre, » Louise se décida, le 13 décembre
1624, à faire éUre une coadjutrice. Elle rassembla
toutes ses filles dans la salle du chapitre , et leur
dit : « Il y a longtemps que me voyant en sy grand
» aage, j'ay désiré que vous fussiez asseurées pour
» l'advenir de quelque personne capable, qui sceut
» et peust reparer les fauttes que mes incapacités
» m'ont fait commettre en cette grande charge ; et
» ayant sceu de vos propres bouches que si je vous
> permettois d'eslire une coadjutrice, vous seriez
i> toutes portées à la nomination de Madame Jeanue-
> Baptiste de Bourbon, dite de Romorantin, je vous
* Sainte-Famille, p. 672. — Ce grand autel se trouve main-
tenant dans TégUse du bourg de Fontevrault ; Tarcade existe
encore dans la chapelle de l'abbaye ; la statue de Robert faite
en lG2i et Tancienne du 3^ii« siècle, sont perdues.
— 91 —
» raccorde très volontiers pour sa seule personne,
> soubs le bon plaisir du Roy. » La flUe naturelle
d'Henri IV fut élue à la presqu'unanimité, huit voix
seulement sur cent lui furent contraires. Aussitôt
que Louis XIII apprit la nomination de sa sœur,
il écrivit à Fontevrault la lettre suivante :
« Chères et bien aymées,
» L'acte authentique que vous avez envoyé de Te-
> lection capitulairement et cannoniquement faicte,
> par l'unanime consentement de toute votre com-
> pagnie , de la personne de nostre sœur naturelle
i de Romorantin , religieuse professe de l'abbaye
> de Chelles , pour coadjutrice de nostre cousine
> l'abbesse de Fontevraud, ne nous a peu estre que
> très agréable , puisque par là vous nous temoi-
» gnez le zèle que vous y avez eu, et la bonne opi-
> nion que vous avez concile de la vertu de nostre
> dite sœur, que nous vous envoyons ainsi que vous
» le désirez , afin que l'exemple de votre pieté la
» confirme d'autant plus en la bonne nourriture et
> dévotion qu'elle a déjà prise. Nous espérons que
> vous l'aymerez et chérirez comme personne qui
> nous appartient , et qui nous est en singuUere
> recommendation , vous asseurant que nous con-
tineurons de prendre soubs nostre particuUere
protection vostre maison et tout ce qui en dé-
pend.
» A Paris, du 12 de janvier 1625 *.
Signé : » LOUIS. »
* Sainte-Famille, p. 670,
— 92 —
Le Père Monteage, après avoir remis au rc
l'acte capitulaire nommant sa sœur coadjutrice, fu
à Chelles prier la princesse de se rendre le plus tô
possible à Fontevrault. Jeanne-Baptiste partit aussi
tôt, accompagnée de ce religieux. « Lorsqu'elle fu
» arrivée à Tours, il vint à l'abbaye pour en din
» l'heureuse nouvelle, afin qu'on allast au devan
i> d'elle. Madame envoya à Saulmur le dit père soi
» prieur, car le père prieur estoit fort incommodé
» et aussi tous ses officiers, et elle arriva le 23 jan
» vier 4625, qui estoit jeudi, à 4 heures du soir
» et de tant loing qu'on la put voir s'approcher, oi
» fit sonner toutes les cloches, en signe de rejouis-
» sance. Elle entra par la porte de l'église , où
» Madame l'alla recevoir , et tout le couvent estoii
» dans le chœur qui chantoit avec les orgues le Ti
3> Deum ; et après qu'elle eust fait l'adoration au
i> Saint Sacrement , elle fut menée au logis dd
» Madame, où tout le couvent l'accompagna * . «
Au mois d'août, Jeanne-Baptiste ayant reçu Ai
Rome, ses bulles, prit l'habit de l'ordre et fut ins;
tallée dans ses nouvelles fonctions.
Louise et Jeanne réformèrent en 1636 le priei
de Longefond ; elles y envoyèrent des religieux
de Fontevrault, avec la sœur Christine Gél
comme prieure ".
Les moines de l'ordre supportaient avec une a|
parente résignation , comme nous l'avons déjà
certains articles de la règle de Marie de Bi
1 Sainte-Famille, p. 670.
» Idem, p. 683.
- ôâ-
tagne, qui, selon l'expression de l'un d'eux, « contre
> toute nature donne le dessus aux filles et le des-
> sous et subjection aux hommes, rendant les reli-
• gieux, qui estoient maistres, valets , et encore un
• peu moindres ; ce qui a causé et cause encore,
» tous les jours , un grand dérèglement dans l'or-
> dre , tel abaissement des religieux et telle eleva-
> tion des filles ayant donné ouverture aux renards
• d'entrer en cette vigne sacrée, et d'y tout rava-
» ger*.» Ils cherchaient donc avec adresse à détruire
l'omnipotence d'une femme qui leur enlevait indépen-
dance et pouvoir. En 1636 ils décidèrent, par des
raisons en apparence plausibles , la vieille abbesse
et sa jeune coadjutrice à leur céder trois prieurés,
pour élever et recevoir les moines de l'ordre. Les
motifs allégués étaient le manque de logement dans
le monastère de Saint-Jean-de-l'Habit, pour y former
le nombre de religieux nécessaire aux besoins
généraux de l'abbaye et de ses prieurés, d'où pro-
venait l'obligation de s'adresser à des frères étran-
gers ; que du reste Madame restant toujours le véri-
table et unique chef, rien ne se ferait dans ces
nouvelles maisons sans son consentement. Louise et
Jeanne , soit qu'elles ne vissent pas le piège ou ne
crussent pas qu'une telle demande pût être accep-
tée à Rome, s'adressèrent au pape Urbain VIII, qui
par bulle du 23 janvier 1636 permit à ces reli-
gieux de s'établir à l'Encloître (Gironde), à lé Puye
et à Orsan, enjoignant aux religieuses y installées
* Biblioth. imp., Notes sur la Règle de Marie de Bretagne*
— 94 —
de se répartir dans d'autres monastères de l*ordre.
Mais devant l'opposition de ces religieuses , qui
ne voulaient pas quitter leur maison, et la réflexion,
qui sans doute fit comprendre à Louise et à Jeanne
le danger que courrait évidemment le pouvoir de
l'abbesse par cette imprudente innovation , la bulle
du Saint-Père demeura lettre-morte. Nous verrons
toutefois son inexécution engendrer de nouveaux
conflits entre les religieux et les religieuses, mais
qui seront les derniers , grâce à l'extrême énergie
de Jeanne-Baptiste , et tourneront entièrement à
l'avantage des abbesses.
Louise de Bourbon de Lavedan mourut le il jan-
vier 1637, âgée de quatre-vingt-neuf ans; elle fut
assistée à ses derniers moments par le R. P. Jean
Lardier, sous-prieur. M® Henri Arnault, abbé de
Saint-Nicolas , et depuis évêque d'Angers , fit les
obsèques. Les oraisons funèbres de cette remar-
quable abbesse furent prononcées par son confes-
seur , le jésuite Louis Lescazer, et par le P. Sébas-
tien Ganot, moine de l'abbaye.
Ses armes étaient : De Bourbon, à la barre d'ar-
gent brochant sur le tout.
JEMNE-BAPTISTE DE BOURBON.
Si Marie de Bretagne eut le mérite de commencer
la réformation de l'ordre, Jeanne-Baptiste de Bour-
bon , après avoir anéanti les prétentions de ses re-
ligieux, eut celui de ramener à jamais la paix dans
sa congrégation.
Il nous est impossible , dans ce court exposé , de
raconter en son entier la Vie si bien remplie de cette
célèbre abbesse; nous nous contenterons, pour
aujourd'hui, d'en présenter les faits principaux,
ceux indispensables, en un mot, à l'exposition som-
maire des derniers démêlés concernant la réforme
de Fontevrault.
Jeanne , fille d'Henri IV et de la belle Charlotte
des Essarts , naquit le 22 février 1 608 , et fut légi-
timée par lettres-patentes, dans lesquelles nous
lisons : «... Nostre très chère et très amée fille
» naturelle, que entendons estre nommée Jehanne,
> naye et yssue de nous et de nostre chère et bien
> amée Charlotte des Essartz, à laquelle nostre dicte
» fille, oultre l'affection paternelle et charité natu-
> relie que luy portons , tant pour estre extraicte
» de nous et de ladicte dame , que pour les grâces
> singullieres que Dieu et la nature lui ont depar-
> tyes en sa jeunesse , dont nous espérons l'aug-
— 96 —
» mentalion et accroissement à mesure qu'elle
» viendra en aage...*. » Marie de Médicis eut pour
la fille de son mari une vive affection, elle la garda
près d'elle jusqu'à l'âge de dix ans , moment où la
reine la confia à M"^® Marie de Lorraine, abbesse de
Chelles. Saint François de Sales se chargea , dans
ce monastère , de l'éducation religieuse de la jeune
princesse V C'est de là qu'elle partit, à peine en sa
dix-huitième année , pour aller à Fontevrault rem-
pUr les fonctions de grande prieure et de coadjutrice
de M™® Louise de Lavedan, qu'elle remplaça le
11 janvier 1637. Elle fut bénie le 16 juillet 1639 par
Philippe Cospeau,^évêque de Lisieux et de Nantes '.
Jeanne-Baptiste était, comme sa mère, d'une re-
marquable beauté * ; vive , volontaire , mais exces-
sivement bonne et douce , très-savante • et d'une
parole entraînante , éloquente même. Son frère le
roi Louis XIII prenait plaisir à l'entendre exposer
les affaires les plus embrouillées ; il disait : « Elle
» les possède et expose mieux que les avocats.» Elle
« Biblioth. imp., V. g. Colb., f> 144.
1 Lettre de la Grande Prieure, sœur Binet de Montifipoy.
• P. Anselme, t. I, p. 151.
* Nous possédons, dans notre collection de portraits des ab-
besses de Fontevrault, celui de cette princesse ; il est en pied ;
sans la règle, il parlerait.
» L'élève de saint François de Sales était tiès-instruite ; elle
connaissait surtout parfaitement les auteurs sacrés, et composa
pendant ses nombreux voy,iges des Méditations religieuses
estimées. Elle écrivit aussi beaucoup de Pensées de dévotion.
On aurait pu faire quatre gros volumes de ses productions, si sa
grande modestie n'eût défendu de les publier. (Lettre circulaire
de la Grande Prieure.)
i
— 97 —
plusieurs fois dans le grand conseil , notam-
ment dans une circonstance où elle obtint gain de
cause après avoir répondu victorieusement à trois
avocats , ses adversaires , dont l'un était une célé-
brité d'alors \ Elle ne supportait pas facilement la
perte d'un procès , ayant l'amour-propre de ne les
intenter qu'à coup sûr. Un jour elle alla trouver le
premier président Mole , et se plaignit amèrement
d'un arrêt rendu contre son ordre. Cet éminent ma-
gistrat lui répondit d'une manière peu satisfaisante.
L'abbesse, offensée, lui répartit vivement : « Savez-
» vous bien que je suis du sang de France? » — « Eh
> oui, Madame, répliqua Mole, je sais que vous erf
^ êtes, et du plus chaud ! * »
A peine abbesse, Jeanne-Baptiste reçut la visite
de sa nièce, M^^® de Montpensier. Nous transcrivons
le curieux récit de l'extravagante princesse, qui
quitta l'abbaye parce qu'on n'avait plus de folles à
lui montrer, pour la divertir ! ! « Toute cette comédie
* nous fit gagner Fontevrault, où je fus accablée
» de caresses de l'abbesse, qui étoit fille naturelle
> de feu mon grand-père et de feu Madame la ma-
* rechale de l'Hôpital, qui étoit lors Madame des
* Essarts. La raison de la parenté fit croire à toutes
* les religieuses qu'elles étoient obligées de me
» témoigner plus de soins , et de s'empresser plus
» auprès de moi qu'auprès d'une autre de ma qua-
* lité : elles croyoient même me faire grand hon-
> neur de m'appeler la nièce de Madame (c'est ainsi
* lettre circulaire de la Grande Prieure.
' Dalaure, Revue d'Anjou, t, IV, p. 141.
i
- 98 -
» qu^elles appellent l'abbesse) ; el cependant j^étois
» fatiguée de toutes leurs amitiés, et j'en aurois été
» malade si la naïveté de ces bonnes filles ne m'eût
i> souvent divertie. Il fallut premièrement assister
» au Te Deum , et essuyer diverses cérémonies qui
» durèrent longtemps ; pendant lesquelles je n'eus
» d'autre occupation que de souhaiter de rencontrer
» une folle dont j 'a vois ouï parler ; de quoi j'eus
j> bientôt satisfaction par une assez plaisante aven-
» ture. J'étois arrivée lard, de sorte que les cere-
» monies furent si longues que le temps étoit devenu
» obscur. Quand j'entrai dans l'église, Beaumont et
» Saint-Louis, au lieu de me suivre, allèrent se pro-
» mener dans les cours de la maison , où elles en-
j> tendirent des cris horribles. Beaumont eut peur
> et voulut s'enfuir ; Saint-Louis la rassura et lui
:> dit qu'il falloit voir ce que c'étoit. Elles avancèrent
1^ vers le heu où elles avoient entendu ce bruit :
7> elles trouvèrent une folle enfermée dans un cachot
» où il y avoit une fenestre d'où l'on ne pouvoit voir
» que la tête. Cette pauvre créature étoit toute nue,
» et après qu'elles eurent eu quelque temps le
i> plaisir de son extravagance, pour me divertir elles
:> vinrent m'avertir; je laissai l'entretien de Madame
9 l'Abbesse, je pris ma course vers ce cachot, et
» n'en sortis que pour souper. Jefisméchante chère,
* et, crainte de souffrir le même traitement, le len-
» demain je priai ma tante de permettre que mes
D officiers m'apprêtassent à manger au dehors. Elle
> les envoya chercher pour s'en servir ; de sorte
» que ce jour-là et les autres on disna mieux.
— 99 —
î Madame de Fonlevrault me regala ce jour-là d'une
» seconde folle. Gomme il n'y en avoit plus pour
» un autre jour , l'ennui me prit ; je m'en allai,
î malgré les insistances de ma tante. Tous les
> hommes qui étoient à ma suite entrèrent dans
» Tabbaye durant deux jours que j'y fus, à cause du
» privilège qu'ont toutes les princesses du sang, de
» faire entrer qui bon leur semble dans les abbayes
> de fondation royale. Celle-là est d'une dignité bien
» extraordinaire. La grandeur de la maison répond
î bien à une si célèbre abbaye : ce sont trois cou-
» vens dans une même clôture, qui ont chacun une
» église où on officie séparément, comme si c'étoit
» trois maisons séparées et éloignées les unes des
> autres. Il y a bien des villes en France où Ten-
^ ceinte n'est pas si grand que l'enclos de cette ab-
» baye , où il ne paroît pas tant de bâtiments qu'il
» y en a; aussi remarque-t-on qu'elle a presque tou-
> jours été possédée par des princesses, la plus part
» du sang, ou bâtardes de la maison royale. »
La future compagne de Lauzun y retourna en
novembre 1657 ; la chère fut meilleure, paraît-il :
* J'allai passer les fêtes de la Toussaint à Fonte-
» vrault ; ma tante, abbesse de ce heu, avoit fort
» souhaité de me voir ; elle me reçut avec beau-
» coup de joie et de bonne chère ; plus on voit la
» maison, plus on admire qu'une si grande com-
» munauté soit si bien réglée ; on ne peut pas
Ti mieux vivre que l'on fait à Fontevrault. Assure-
» ment l'abbesse a du mérite. Je regrettay beau-
> coup de n'y pas voir mes sœurs, parce qu'elle
— 100 —
» seroient fort bien si elles y étoient, même toutes
» trois. »
C^mme Madame de Lavedan, Jeanne embellit la
grande église de son mootier. Cette princesse se
préoccupa surtout de faire un nouveau cimetière
des rois.. • et d'y rejoindre tous les tombeaux de
> tant de princes et princesses cachez en partie
» par une pierre qui en interceptoit la vue \ »
Nous ne donnerons aucun détail sur ce sujet,
renvoyant le lecteur au remarquable travail de
M. Louis Courajod, qui s'est spécialement occupé de
décrire les tombeaux de ces célèbres Plantagenets,
dont par esprit d'opposition on s'est tant occupé
il y a quelques années. A notre avis ces fameuses
statues de tuf et de bols ne sont utiles que pour
montrer la décadence de l'art au xu® siècle. Mais
afin de contenter les admirateurs quand même de
la statuaire de cette époque , nous publions un
document inédit qui a bien sa valeur :
€ Voila dans Testât et situation qu'estoit ce cime-
» tiere des Roys, auquel l'avoit mis Mad. Renée de
» Bourbon, en l'an 1504, coname nous venons de
» voir. Mais Mad. Jeanne-Baptiste de Bourbon, l'an
* 1638 , voulant poser les fondemens de cette
> excellente et somptueuse architecture, qu'elle fil
» construire et qu'on voit maintenant à la grande
» grille de l'église, scavoir ces deux belles arcades,
> Tune desquelles couvre le cimetière, et toutes
» les deux costoient la grande grille et appuyent
i Biblioth. imp., Abbayes de France, t. IV,
• — m —
î deux autels au dedans du chœur dés religieuses,
> fit remuer ces monuments et fit faire l'ouverture
» de ce cimetière des Roys, où on remarqua et
> admira tout ensemble la façon particulière d'en-
> sevelir le corps de ce prince Raymond, comte de
ï Tolose : c'est qu'il estoit tout bandé et couvert de
> passemens tissus d'or, beaux et luisans à mer-
» veilles, nonobstant la longueur des siècles et la
> pourriture de la chair ; les uns larges d'un doigt,
» les autres de deux, trois et 4 doigts, qui entou-
> roient et bandoient tout ce corps ; depuis les
ï pieds jusqu'à la teste, mesme jusqu'à l'extrémité
» des doigts ; et pour couvrir le sommet de la
> teste, un tissu d'or plus large , en forme circu-
» laire, et d'autres plus petits, pour mettre aux
» coudes et aux rotules des genoux. Il estoit telle-
» ment ajancé et enveloppé dans ces bandes , que
'^ le seul visage paroissoit découvert. On trouva
» aussi deux pointes et garnitures de fin or, pour
* enrichir les deux bouts d'un septre ducal. Sur
> un pillier proche paroissoit, en plate peinture,
» sa figure armée , avec la cotte d'escarlatte ,
» au milieu de laquelle estoit la grande croix de
i> Tolose, pâtée et accompagnée de42besans d'or,
* 3 à chaque pointe. On avoit osté son ancien mau-
* solée de pierre, richement peint et doré, garny
» de divers ecussons de Tolose, de France et d'An-
» gleterre, aux trois léopards d'or, pour monstrer
^ qu'il estoit issu de ces familles ; mais son effigie
* couchée^ se voyoit, richement couverte de veste-
^ ments azurez, et parsemez de petits ecussons de
— 102 —
» gueuUes à deux griffons affrontez d'or , et de
» plusieurs croix euvrées de cette sorte. » (Après
ce mot sorte, se trouve dessinée, delà main du Père
Lardier, une petite croix ayant à sa base une
espèce d'ancre.) » De la main droite il se frappoil
» la poitrine, signe de sa conversion et de sa peni-
» tence , car il avoit trempé longtemps avec son
» père dans Fherésie des Albigeois, et mesme
» s'estoit rendu chef du party contre l'Eglise \ >
La première pensée de Jeanne-Baptiste, en
entrant dans l'abbaye, fut pour le fondateur; elle
résolut d'user de tout son puissant crédit afin
d'obtenir de Rome la canonisation de ce bienheu-
reux. Tout d'abord elle ordonna qu'une lampe
d'argent brûlerait à perpétuité devant son tom-
beau ; puis elle rassembla les documents indispen-
sables pour le succès de la cause qu'elle allait
plaider auprès du Saint-Siège. Par ses soins on
édita la vie de Robert, écrite en latin par Bal-
dric, qui avait été son tontemporain. Elle la fit
traduire par le P. Chevallier. Le R. P. H. Kicquet
publia à son instigation l'histoire de Fontevrault.
Un peu plus tard Jeanne imprima à ses frais la
vie du fondateur , composée par le prieur Baltha-
sar Pavillon « avec beaucoup de soin et d'études. »
Elle fit également insérer dans l'œuvre de Bol-
landus l'apologie qu'en avait faite le P.Jean Lardier.
Enfin, non satisfaite encore de ces diverses publi-
* Sainte-Famille, t. III, p. 472. L'auteur de ce manuscrit
était présent, il fait donc une description de ce tombeau, de
visu.
— 403 —
cations, elle donna une seconde édition de l'ou-
vrage de Baldric, à laquelle le P. Nau, jésuite,
ajouta maintes remarques et une épitre au Saint-
Père, contenant toutes les raisons qui pourraient
décider la cour de Rome à rendre la décision qu'on
lui demandait *. Elle les aida de ses propres re-
cherches ; ce fut ainsi qu'elle écrivit la lettre sui-
vante à M. Duchesne, avocat, pour avoir commu-
nication d'une vie de Robert que son père, historio-
graphe du roi, avait laissée en manuscrit :
I Fontevrauît, ce 20 juin 1663,
» Monsieur,
» J'ay apris que parmy les mémoires de feu
> Monsieur Duchesne, vostre père, il y a une vie
> manuscrite du Bienheureux Robert d'Arbrissel ,
» nostre instituteur, qu'on dit estre jointe à celle
* du Bienheureux Bernard d'Abbeville , abbé de
> Tiron.
» Comme je fais travailler à l'histoire de nostre
» ordre , et que nous espérons recevoir quelque
î lumière par le moien de ce manuscrit, j'ay désiré
* Lettre circulaire de la sœur de Montifrcy, grande prieure.
Avant l'apparition de ces divers ouvrages, avait déjà été imprimée
à Anj^ers, en 1586, la Légende de R. d'ArbHssel, avec le Cata»
logue des abbesses, par Laurent Peltier, sacristain de l'abbaye
de Saint-Nicolas; il était parent de Claude Menars {Illustres
d'Anjou, par Pocquet de Livonnière , p. 108, manuscrit de la
Bibliothèque d'Angers). Sébastien Ganot fit aussi imprimer à la
Flèche, en 1(H8, la tradu(;tion et le texte de la vie de Robert,
par Baldric. En 1586 parut à Angers, sur le même personnage,
l'ouvrage d'Yves Magistri, de Laval, dédié à Eléonore de Bour-
bon, trentième abbesse de l'ordre.
— 104 —
» vous escrire la présente par le sieur de Tor-
1» panne , mon intendant , pour vous demander
> communication de cette pièce et vous prier de
> vouloir la mettre à cette fin entre les mains du
3> sieur Drouet , nostre avocat au Parlement ,
» vostre voisin , qui vous en donnera son récépissé
i» pour tel temps qu'il vous plaira. J'espère ceste
» faveur de vostre bonté, d'autant qu'il s'agit de
j> l'honneur d'un saint , dont feu Monsieur Du-
» chesne a parlé favorablement dans ses œuvres ;
» et que par ce bon office vous obligerez tout
» l'ordre avec moy, qui chériray beaucoup les
2> occasions de le reconnoistre et de vous témoigner
» que je suis
» Vostre affectionnée en Nostre Seigneur.
Signé : ï> J. Baptiste de Bourbon,
3> légitimée de France *. »
Le vif désir d'obtenir de Rome la canonisation
de Robert fit commettre à la trop ardente abbesse
une action blâmable. Pensant que la fameuse lettre
de Geoffroy, abbé de Vendôme, serait un obstacle
si son existence, niée avec énergie jusqu'alors, était
constatée , elle envoya à Vendôme ' deux moines
1 Biblioth. imp., F. Cangé, 142, F. R., t. 6046, 0» 266.
s Le prieur de Vendôme était alors fr. Vincent MarsoUe ; ce
moine naquit à Doué (Anjou), fut religieux de Fontevrault jusqu'à
vingt-cinq ans, entra ensuite chez les Bénédictins, et mourut le
5 septembre 1681 dans l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. l\
avait été plusieurs fois supérieur de cette congrégation (lUuttres
d'Anjou, par Pocquet de Livonnière, p. 154 , manuscrit de la
Biblioth. d'Angers.)
— 105 —
dp Fontevrault, avec mission de lacérer dans le
manuscrit original, conservé à la bibliothèque de
l'abbaye, non pas la preuve de la culpabilité du
futur sainty mais le récit de faits qui, quoique fort
douteux, pouvaient éveiller la susceptibilité du Pape
et lui faire rejeter sa demande. Mais quelle fut sa
surprise , quand on vit « que ce n'estoit pas la
» lettre de Geoffroy qui avoit esté déchirée, mais
> une autre pièce, qui lui touchoit \ »
Les deux envoyés, crainte d'être surpris, se
pressèrent tellement, que ce fut en effet la pièce
roisine de cette lettre, qu'ils arrachèrent, et non le
locument tant redouté.
Après avoir tout préparé, après avoir obtenu le
puissant concours de la France, de ses sœurs Hen-
riette, reine d'Angleterre; EUsabeth, reine d'Es-
)agne ; et Christine, femme de Victor-Amédée ,
iuc de Savoie, Jeanne -Baptiste délégua à Rome le
?, Nicquet, pour commencer auprès d'Innocent X
les débats de cette importante affaire. A la mort de
:e premier mandataire, le P. Richeôme lui succéda ;
nais démarches, supplications, tout devint inutile ;
)n ne put rien obtenir, surtout du nouveau pape
Uexandre VII. Plus tard Clément IX, lui, se
nontra mieux disposé, prêt même à concéder « la
> permission de faire dans l'ordre Toflice du fon-
> dateur , » quand sa mort et celle de Jeanne
lurent anéantir cette espérance. Depuis , on
jssaya de reprendre l'œuvre inachevée de Jeanne-
' L'abbé Simon, Hist. de Vendôme^ t. H, p. 148,
— 106 —
Baptiste, mais sans pouvoir la mener à bonne fin.
La cour de Rome, qui maintenant doit être défini-
tivement fixée sur les mérites de cet homme de
génie, de nos jours donnera peut-être satisfaction,
sinon aux requêtes des puissantes et nobles ab-
besses de Foiitevrault, du moins aux vœux des
humbles religieuses des trois petits couvents de cet
ordre existant encore en France ; car si ces dignes
servantes du Seigneur n'ont pas hérité de la splen-
deur de leurs devancières, elles en ont du moins
conservé toutes les vertus \
Pendant la majeure partie du règne de Jeanne-
Baptiste les religieux tentèrent, soit individuelle-
ment, soit collectivement, de se soustraire à sa
juridiction absolue. Il faut bien avouer que la posU
tion faite à ces hommes, par la règle, était de
nature à les profondément humilier. La seule raiscd
valable à opposer à leurs éternelles récriminationSj
était que connaissant l'organisation exceptionnel^
de l'ordre, quand ils y entraient, ils manquaient i\i
bonne foi en repoussant ensuite ce qu'ils avaien|
accepté.
En 1639 les Fr. François GouUeon et Piern
Tam furent envoyés comme confesseurs au couveii
des Filles-Dieu de Paris ; à peine arrivés, les Bén^
1 Boulauc (Gers), Brioude (Haute-Loire), et ChemiUé \ Main^
et-Loire). Nous avons eu plusieurs fois le plaisir de péru-tr
dans ce dernier couvent, et nous pouvons certifier qno c»!
maison, habilement dirigée par sœur Rose,, non uioins l>..iîl
et aimable que sa coadjutrice, rend de grands services en il
vant avec un soin maternel les jeunes filles du bourg. Les yi
vres connaissent aussi la charité des Vontevriatcs,
-407 —
diclins de Saint-Pharon de Meaux les en retirèrent
secrètement. Jeanne actionna immédiatement le
Fr. Tarisse, supérieur de cette maison, au grand
conseil de roi, et obtint un arrêt qui ordonnait aux
religieux fugitifs de rentrer à Fontevrault, où après
avoir fait amende honorable ils reçurent le pardon
de leur abbesse *. Elle agit de même contre deux
autres moines, les Fr. Jean Chauvin et Claude Chan-
telou, qui s'étaient enfuis furtivement, la nuit, de
Saint-Jean-de-l'Habit, pour aller chez les Bénédic-
tins de Toulouse *. Tous les religieux n'eurent pas
la même répulsion pour cette demeure, car en
1735 le P. J.-B. Henin, visiteur des prieurés de
Gascogne, adressait du Paravis les lignes suivantes
à M. Salmon de la Giraudière , intendant de Ma-
dame : ce .... Comment va le vin gris du R^ P.
> Prieur, et votre excellent vin des cotteaux ? On
> ne se réjouit pas aussi bien ici que nous faisons
» à Fontevraud. Il y a temps pour tout.... ' »
Dans une certaine circonstance le chef général
de Tordre montra jusqu'où pouvait aller son pou-
voir illimité. Nous transcrivons, comme preuve, une
partie des instructions secrètes données par Jeanne
à son argentier, M. Antoine Bidal, chargé d'enlever,
si besoin est, un religieux récalcitrant : c. Après
» lesquelles lettres ainsi données, lad. Mère Prieure
> et led. Bidal exorteront et feront exorter le Père
> Crespart de nous venir trouver franchement, et
* H. Nicquet, p. 531.
s Angers^ Arch. de Fontevr., liasse Mélanges à classer »
Ihid, f liasse Saint-Aignan.
— 408 —
» de son bon gré, ainsi que nous lui ordonnons, et
ï Tasseurer en nostre nom qu'il recevra de nous
» tous les bons et favorables traitemens que nous
» luy avons toujours rendus, et que nous estimons
» estre deubz à son aage et aux honorables emplois
j> qu'il a eu dans l'ordre, sans faire réfleciion sur
» la faulte qu'il a faite de partir d'auprès de nous
» sans nostre congé et permission ; laquelle
» oublierons très volontiers moiénant que fran-
» chôment et de son bon gréilnous vienne trouver ;
j> et luy donner tout le jour et jusqu'au lendemain
j& pour y penser.
» Et en cas que led. PereXrespart ne veuille se
» disposer à nous venir trouver, nous commandons
1) aud. Bidal de lui déclarer, par plusieurs fois,
» qu'au cas où il persistera dans le refus, qu'il a
» charge et pouvoir spécial, de nous, de le con-
» traindre ; lequel pouvoir il lui fera voir, 3t néant-
» moins lui temoignera,en présence du P.Florimont
» de la Haie et autres personnes dignes de foy, qu'il
/» n'a ordre de le faire qu'à toute extrémité. Après
j> lesquelles il exécutera led. pouvoir et se fera as-
» sister de telles et si grand nombre de personnes
» qu'il jugera à propos, pour se saisir de la per-
» sonne dudit Père Crespart, et nous l'amener ei
» ce lieu ; lesquelles personnes nous mandons à h
» Mère Prieure de Tusson de lui fournir avec ar
» gent, autant que besoing sera pour fournir auî
» frais *. i>
* Angers, Arch. de Fonte vr., carton Titëson, no 1.
— 109 —
En 4041, pendant que l'abbesse soutenait en per-
sonne , à Paris, ses droits vivement attaqués , et
tâchait d'obtenir du grand conseil l'arrêt dont nous
allons parler, il y eut au couvent de SaintnJean-de-
l'Habit une véritable débandade. Une partie des
moines quittèrent cette résidence, notanmaent les
frères le Thuillier, Etienne Pinson, Yves Char-
pentier, Jean Poisson, Pierre le Noir et Nicolas
Goupart. Jeanne, apprenant cette grave infraction
aux statuts , ordonne aussitôt aux frères Sébastien
Ganot et David Cordier, ses vicaires généraux, de
saisir les fuyards et de les ramener à Fontevrault,
où le conseil", présidé par la grande prieure, sœur
Jeanne Gallouin, prononcera sur leur sort. Tous s'y
trouvèrent le 20 octobre; « et estant arrivez, les
9 avons présentez a la mère grande prieure pour
> en disposer conformément aux ordres qu'elle en
> avoit reçu de Madame lesquels ont esté mis
» entre les mains du R^ père Louis Potier, soubz
ï prieur de l'Habit, pour les conduire aud. heu et
» les mettre en prisons séparées. Ce qui a esté fait
j> le mesme jour; à scavoir, fr. Pierre le Noir et
» fr. Goupart, chascun dans une cellule du dortoir
> séparées l'une de l'autre, fermées et clauses par
}» le dehors, afin que personne n'y puisse entrer, et
» qu'eux ne puissent sortir. Les frères Poisson et
^» Charpentier dans les prisons ordinaires dud. mo-
\» nastere, pour y estre gardez, selon les formes re-
p gulieres, par led. P. sous prieur; et les deux
» autres, à scavoir les fr. Thuillier et Pinson, ont
Tf esté mis et enfermez dans la prison de la segre-
7
— HO —
» tenerie, lesquels ladite R^® mère grande prieure
» nous a mis entre les mains pour les y conduire et
» enfermer ; ce que nous avons faict »
Le 30 du même mois ces moines comparurent
devant le conseil pour subir un interrogatoire ;
mais ayant avoué leur faute, « et s'estant rendus à
i> miséricorde, » ils rentrèrent pardonnes dans leur
couvent. Voici la lettre humble, trop humble peut-
être , que le fr. le Noir adressa pour lors à son
abbesse :
«f Le iÔ oclohre i64i.
n Madame,
i> Supplie très humblement votre très humble
1» religieux fr. Pierre le Noir , d'oublier et luy
j> pardonner tout ce en quoy il pouroit vous avoir
i> offensé et faire contre l'obéissance et respect
D qu'il vous doit, et principalement en ce qu il
j> auroit sorti de son cloistre et en auroit esté
i> absent par l'espace de 7 à 8 mois ; aussi pris
j> dimissoire pour aller aux ordres du P. Pierre
» le Thuillier , contre vostre intention ; toutes
j> lesquelles choses, quoy qu'il ait faites croyaiil
» bien faire et procéder à la bonne foy, touteflfois,
j> puisqu'il cognoist que cela vous a grandement
j> despleut, il vous en demande très humblement
3) pardon et promet de ne rien faire, à Tadvenir,
i> qui vous offense, et de se maintenir en son
3> devoir de religion.
» Ce considéré il vous plaise. Madame, par^
n donner le tout, ce 16 octobre 1641, et de plui
— m —
» vous demande pardon d'avoir pris l'ordre de
« diacre sans vostre permission.
» Vostre très humble et très obéissant serviteur,
» Fr. Pierre Le Noir \ »
Cet état de choses ne pouvait durer; il fallait,
de manière ou d'autre, rétablir la concorde dans la
communauté, profondément troublée. Ce furent les
religieux qui commencèrent une nouvelle cam-
pagne contre leur chef. Le 20 juin 1639, s'étant,
selon l'usage, assemblés pour nommer le grand
visiteur de l'abbaye, ils profitèrent de celte réunion
pour demander à Jeanne, non-seulement qu'elle
eût à faire réviser la règle par des commissaires
apostoliques et des docteurs, mais aussi qu'elle les
mît en possession des trois couvents accordés par
la bulle du pape Urbain VIII, la menaçant tous, en
cas de refus, de quitter Fontevrault. Le danger était
grand ; Jeanne mena donc cette affaire avec autant
de prudence que d'énergie. Elle répondit aux
moines qu'ils eussent d'abord à élire trois commis-
saires chargés de lui exposer leur demande. Ils
nommèrent les frères Monteage, Pignard et Prévost.
Ces procureurs prièrent Madame de soumettre à
des prélats et docteurs réunis ad hoc les différends
des parties. L'abbesse accepta cette proposition,
mais voulut que tous les prieurés concourussent à
la nomination des commissaires. En conséquence,
elle divisa tous ses couvents en quatre classes,
* Angers, Arch. de Fontevr. , carton Vieux titres.
— 412 —
dont chacune élut un représentant. La classe de
Tusson choisit Dom Jean-Laurent Astruct, religieux
de Saint- Antoine ; celle du Paravis, le P. Etienne
Ferchaut, de l'observance de Saint-François;
Orsan, le P. Chrysostome le Clerc, des Récollets :
ce fut plus tard que la classe de Paris nomma M. de
Monthelon, avocat au parlement.
Au mois de novembre de la même année, les
mandataires des moines et les représentants des
prieurés se réunirent à Fontevrault, sous la prési-
dence de l'abbessc, et, en présence des discrètes
de l'ordre, ouvrirent la conférence.
Mais Louis XIII ayant appris l'existence de ces
réunions, et craignant qu'elles ne fissent naître de
graves désordres, car on était loin de s'entendre,
nomma le 12 novembre 1640 neuf commissaires :
MM. Fremiot, archevêque de Bourges; Gospeau,
évêque de Lisieux ; Seguer, évoque de Meaux ; de
Bignon, de Vertamont, de Laubardemont, conseillers
du roi ; Cornet, Coquerel et du Val, docteurs de la
faculté de théologie de Paris, pour : a Après avoir
i> veu et meurement considéré la Règle, les Statuts,
> Bulles, Arrest, anciens usages et pratiques, et
» coustumes concernant le faict dud. ordre, entendu
j les doutes, difflcultez et questions proposées par
D les ReUgieux, les moyens et les responses qui y
3> seront faittes, ils donnent prudents advis et con-
> seils, pour sur iceux y estre pourveu, par l'au-
» thorité de Sa Majesté, par devant lesquels il veut
j> que toutes les personnes intéressées comparois-
» sent, et que même l'Abbesse se transporte, a
— 443 —
> cette fin, à la ville de Paris *. » Jeanne partit au
mois de décembre, accompagnée de son intendant,
M. Chevreau, après avoir remis ses pouvoirs entre
les mains de la grande prieure , sœur Jeanne
Callouin, et emportant avec elle les originaux des
pièces justificatives des droits de l'ordre. Les pro-
cureurs du monastère et les représentants des
moines s'y rendirent également. On publia de part
et d'autre bien des écrits, bien des mémoires;
entre autres, un « factum pour les Religieux de
ï Fontevrault touchant les différends dud. ordre, i>
écrit qui contenait de blessantes allégations contre
les abbesses. Enfin Louis XIII , sur l'avis des com-
missaires nommés par lui, et sur le rapport de
M. de Vertamon, rendit le 8 octobre 4641, en son
conseil, l'arrêt suivant : « Le Roy estant en son
» conseil a ordonné et ordonne que la dite
> Reigle dudit ordre de Font-Evraud, confirmée
J> par ledit pape Sixte IV, ensemble ledit Arrest
> dudit Grand Conseil, de l'an 4520 , et ladite
> Bulle de Clément VII, de l'an 4523, confirmative
> dudit Arrest, seront gardez, observez et entre-
> tenus par tout ledif ordre Font-Evraud , Reli-
» gieuses et Religieux d'iceluy, selon leur forme et
» teneur, et ainsi qu'il en a esté usé par le passé,
* sans que, soubs prétexte des BuUes de Tan 4624
> et Bref de 4636, et de ce qui s'en est suivy, il
> puisse estre apporté aucun changement à l'obser-
> vance de ladite Reigle de Sixte IV et Bulle de
* H. Niccpiet, p. 537.
— \u —
» Clément VII, usages et pratiques dudit ordre, ny
» que les dites Religieuses ou Religieux y puissent
» contrevenir, ny lesdits couvents de l'Encloistre,
» en Gironde, Orsan et la Puye, ou autres, et estre
» transformez à autre usage que celuy de leur
:» fondation , en quelque manière que ce soit.
» A maintenu et gardé, maintient et garde ladite
» dame Abbesse, et lesdites Prieures et Religieuses
» des couvents dudit ordre, respectivement es
» droits , privilèges et prérogatives à elles attri-
» buez par la dite Reigle et par les autres Bulles
» et Induits du Saint-Siège, Lettres Patentes de
2> Sa Majesté, et Arrest tant du dit Conseil d'Etat
i> que de la dite Cour du Parlement de Paris et
2> Grand Conseil ; mesme , la dite dame Abbesse ,
» au pouvoir , juridiction et correction à elle
» appartenans , et à ses Vicaires et Visiteurs des
» couvents, en l'acte de Visitation, sur toutes les
» personnes dudit ordre ; et d'instituer ou destituer
» le Prieur et autres Officiers de Saint-Jean-de-
» l'Habit , ainsi que bon luy semblera ; et les
» Prieures des couvents en semblable pouvoir, juri-
» diction et authorité sur toutes les Religieuses et
9 Religieux résidents en leurs couvents et monas-
» teres, tant au spirituel qu'au temporel. Mesmes
» au pouvoir appartenant à ladite dame Abbesse
» en tout le dit ordre, et auxdites Prieures en
» leurs couvents, de descharger et déposer les
i> Confesseurs, et iceux establiz, ou leur Coadju-
» teur pour les confessions, en la manière portée
» par la dite Reigle. Comme aussi de pouvoir appe-
— 115 —
» 1er autres Confesseurs que ceux dudit ordre,
* quand besoin sera Sans que lesdits Confes-
» seurs ny autres des dits Religieux dudit ordre se
» puissent ingérer en l'administration du temporel,
» sinon en tant et pour autant q\i'ils y seront em-
» ployez par ladite dame Abbesse, dans son abbaye
» et dans tout ledit ordre, ou par lesdites Prieures
» esdits monastères. Ordonne, Sa Majesté, que ledit
» libelle imprimé soubs le titre de Factum, sera
î lacéré par le Greffier de la commission, et les
» paroles injurieuses et scandaleuses contenues
» esdits mémoires, rayées et biffées en présence
D desdits Procureurs, lesquels seront tenus en
» demander pardon à ladite dame Abbesse , tant
» pour elle que pour toutes les Prieures et Reli-
î gieuses dudit ordre Faict au Conseil d'Estat
» du Roy, Sa Majesté y séant, tenu à Amiens le
5 8«»« jour d'octobre 1641.
Signé : » Phelltppeàux. »
Le 11 du même mois MM. Cospeau , de Verta-
ffion et Coqueret se rendirent vers les trois heures
au couvent des Filles-Dieu, où habitait Madame
Jeanne-Baptiste, pour faire exécuter l'arrêt rendu
le 8.
L'abbesse de Fontevrault les reçut dans l'église ;
elle était derrière la grille, entourée de ses secré-
taires et de toutes les religieuses de ce prieuré,
M. Jean Martenot, greffier de la commission, après
avoir lu l'arrêt, lacéra et rompit le Facturriy raya et
— 416 —
biffa les paroles injurieuses contenues dans les do-
cuments fournis par les religieux ; puis les PP. Mon-
teage, Pignart et Prévost, à genoux, demandèrent,
par la bouche du P. Pignart, pardon à l'abbesse, à
toutes les mères prieures et aux religieuses. Jeanne
ordonna de les faire lever , et leur dit : « Qu'elle
T> leur pardonnoit de très bon cœur, tant pour elle
n que pour les mères prieures et religieuses, et
» souhaitoit que par leur bonne conduite et com-
» portement à l'advenir ils pussent antierement
» effacer la mémoire des choses qui s'etoient
» passées * . »
Jeanne-Baptiste rentra triomphante à Fontevrault
et s'empressa de faire connaître à tous ses prieurés
le succès qu'elle avait obtenu, et leur enjoignit
d'avoir à payer, chacun, partie des frais, s'élevant
à la somme énorme de 17,482 livres '. En 1642 elle
fit imprimer la Règle de Sixte IV, qui contient 74 cha-
pitres pour les religieuses et 16 pour les moines,
puis ordonna à tous les membres de l'ordre de la
suivre ponctuellement.
Ce procès eut un grand retentissement dans le
monde religieux ; aussi les épigrammes vinrent-elles
assaillir les pauvres moines , réduits à un état bien
voisin de la domesticité. Un écrivain , que nous
croyons être l'auteur de la Métromanie, fit surtout,
dans un cantique sur la naissance du Christ, ce
spirituel quatrain, qui raille finement ces pau-
* H. Nicquet, Hist. de Fontevr.
* Carton Blessac,
— il7 —
Tes religieux de leur fausse position auprès de
Madame :
Un Fontevrauld à face ronde,
Comme le plus sot des humains,
S'en vint dire au Sauveur du Monde :
Madame vous baise les mains ^
A. quoi Ton répondit, et peut-être fut-ce un de ces
noines à face ronde :
Dans l'ordre que Robert, en l'honneur de Marie ,
Fonda pour mériter la Céleste Patrie,
L'Homme, contre l'usage, à la Femme obéit.
Cet Ordre seroit admirable
Si chaque femme étoit semblable
A la Mère de Jésus-Christ *.
Les pénibles voyages en toute saison, les vives
émotions, les rudes mortifications , les jeûnes ri-
goureux altérèrent vite la constitution, cependant
forte et robuste, de la fille d'Henri IV. Une épou-
rantable chute qu'elle fit en carosse au mois de
uin 4669, en revenant de visiter son Petit-Fonte-
Tault de la Flèche, ne lui laissa plus un moment de
•épit. Elle s'alita le H janvier 1670, pour ne plus
relever. Les cinq jours que dura son agonie,
anne-Baptiste de Bourbon les employa « à prier, ,
agir et partir; >
* p. de Livonnière, Illustres d'Anjou, manuscrit n« 4068 de
Bihliothèque d'Angers.
[• Extrait d'une Vie inédite de R. d'Arbrissel, faisant partie des
îhives de M. le comte Scévole de Livonnière. On trouve égale-
itces mêmes vers au bas d'un portrait gravé de R. d'Arbrissel,
se dans le manuscrit n« 903 de la Bibliothèque d'Angers.
7*
— il8 —
Par ses ordres, on dressa un autel en face de
son lit ; alors, se sentant mourir, elle s'entoura des
religieuses et religieux de l'abbaye, fit apporter son
drap mortuaire, ordonna d'allumer le cierge pascal
et de placer près d'elle les châsses des quatre mar-
tyrs dont le Pape lui avait fait présent. Puis ainsi
préparée, et tenant un morceau de la vraie-croix,
qu'elle baisait avec frénésie, elle reçut le saint
viatique. Le sous-prieur, selon la coutume de
l'Eglise, lui ayant dit : « Croyez- vous que ce soit
» votre Dieu ? » Surprise de cette question, elle
s'écria avec énergie : « Ah ! de ma vie je n'en ai
» douté ! » Enfin, peu d'instants avant qu'elle
expirât, ce prêtre reposa le Saint-Sacrement —
elle avait désiré l'embrasser — lui demanda
pardon au nom de toutes les personnes de la com-
munauté, et la pria de leur donner sa bénédiction.
Ce qu'elle fit, ajoutant : « Oui, je la donne de grand
» cœur, à tous, sans exception d'aucun * ! »
Un auteur — Amelot de la Houssaie — prétend
que la fin de Jeanne-Baptiste fut moins chrétienne.
Selon lui, le reUgieux qui l'administra , ayant pré-
senté l'hostie en disant : « Accipe, Soror mea,
» viaticum..., » elle lui arrêta brusquement la
main , et répartit avec émotion : c Dites , dites
» Mater; un arrêt vous l'ordonne 1 » — Nous
avouons préférer de beaucoup notre récit, puisé
d'ailleurs aux sources les plus authentiques.
Cette trente-deuxième abbesse de Fontevrault
i Lettre circulaire de la Grande Prieure, — Oraisont
funèbreê des RR. PP. Soriz et Virdoux.
— 419 —
mourut le 16 janvier 1670 et fut enterrée dans le
caveau de la grande église, caveau construit par ses
ordres pour y réunir les corps de celles qui l'avaient
précédée dans le gouvernement de Fabbaye.
Ses armes étaient : De France, à la barre d'or *.
Avec Jeanne-Baptiste de Bourbon finirent les
orages et les révoltes. Un calme à peu près absolu
Ta désormais régner entre les membres de Tordre
et les abbesses qui vont successivement prendre la
crosse du commandement : d'abord la belle, l'intel-
ligente et savante Marie-Madeleine-Gabrielle de
Rochechouart, « la Reine des Abbesses, o qui sut
3iYec tant d'adresse profiter des sentiments d'estime
et d'amitié qu'elle avait inspirés à Louis XIV, pour en
obtenir les plus grandes faveurs lors de ses voyages
à Versailles, ou à l'aide de lettres charmantes. La
spirituelle abbesse avait bien soin de toujours faire
appuyer ses requêtes soit par sa sœur. M™® de Mon-
tespan, soit, à la chute de l'altière favorite, par son
heureuse rivale, M"^® de Maintenon. Dévouée avant
tout aux intérêts de l'ordre dont elle avait la direc-
* Pendant le gouvernement de Jeanne-Baptiste de Bourbon,
l'abbaye avait 230 religieuses, tant de chœur que novices et
converses, plus 50 moines. Par suite de l'arrêt du mois de
mars 1520, qui enlevait l'administration aux hommes, il convint
aux abbesses de prendre à leur service plusieurs officiers et
serviteurs. Aussi la maison de Jeanne lui coûtait-elle, outre ses
laquais , 12,000 livres par an pour les appointements, sans
compter la nourriture et l'entretien des nombreuses personnes
qui la composaient. En 1648 les officiers, serviteurs et employés
de l'abbaye, payés, nourris et vêtus, étaient au nombre de
quatre-vingt-dix, (Angers, Arch, de Fontevr., Invent, des titres^
t. VII, p. 494.)
— 120 —
tion, elle savait faire taire les justes susceptibilités
que devait éprouver sa chaste nature et sa piété
franche et sincère , en se servant du crédit de per-
sonnes dont elle devait blâmer les actions. Voici du
reste quelques-unes de ces lettres :
« A Madame de Montespan,
» Voila encore une malheureuse affaire qui
i> m'oblige à importuner le Roy. Vous jugez bien,
» ma chère Soeur, que la chose est indispensable
» et que sans cela je ne m'en aviserois pas, surtout
» dans un temps comme celui-cy. Je vous envoyé
» ma lettre, avec le placet, dans l'espérance que
» vous voudrez bien les présenter ce soir. Ce
» seroît un terrible embaras pour nous, et qui
» auroit de fâcheuses suites, s'il falloit que nous
j> fussions soumises à la taxe du clergé. Cela n'est
» jamais arrivé à cette maison, et les amortisse-
» ments nous ont déjà assez incommodés. Je ne
» veux pas vous entretenir plus au long de ces
> misères, dont je voudrois mesme ne vous jamais
» parler. Je ne veux pas aussi entamer les autres
» chapitres dans ce billet, qui n'est destiné qu'à
» vous adresser le paquet dont je vous suplie, ma
> très chère Sœur, de vouloir bien vous charger.
» Ma communauté attend cette grâce de vous, et
]^ vous en sera très obligée. Vous savez bien que
» je vous le seray encore bien davantage, et que
> c'est toujours avec bien de la peine que je vous
» fais dépareilles importunitez. Jevais écrire à M""®
» de Maintenon, touchant mon affaire. J'ay pensé
— 421 —
> qu'en de semblables occasions vous m'avez con-
» seillé d'en user de cette sorte. J'écris aussi à
> M. de Pontchartrain, et tout cela pour une grâce
» dont on se croit ici en possession.. Voila la desti-
a née des privilégiez , ils passent leur vie à de-
» mander les choses qu'ils ont déjà, et on croit leur
ï faire à toute heure des presens nouveaux, quoy
» qu'ils demeurent dans leur premier estât ; en-
core n'est-on pas toujours assez heureux pour
y demeurer. »
« A Madame de Maintenon ,
» Vous avez eu 1ë bonté de remarquer, Madame,
» que j'avois besoin d'estre encouragée pour oser
me donner l'honneur d'écrire au Roy, quoique
sur des sujets agréables ; je vous suplie donc de
» juger avec quelle crainte je prends cette liberté,
ï pour importuner de mes affaires. C'est la mal-
» heureuse nécessité où je me trouve presente-
» ment, la taxe du clergé, qui vient de nous estre
> signifiée contre la coutume, m'obligeant à
» demander à Sa Majesté la continuation de la
» grâce qu'elle a toujours bien voulu m'accorder,
» et dont cette abbaye a joiiy dans tous les temps,
» sans aucune interruption. Je croirois. Madame,
» manquer à la confiance que vostre bonté m'a
» inspirée, si dans une occasion pareille je ne vous
> demandois pas la protection que vous m'avez
> promise, et accordée tant de fois. Il ne s'agit pas
> d'une somme fort considérable, mais elle nous
* le paroistroit beaucoup, après les efforts qu'il
— 422 —
» nous a fallu faire pour les amortissements. Et
» d'ailleurs les conséquences pour l'avenir repan-
» deroient icy une furieuse allarme. Comme nous
ï» ne demandons rien de nouveau, il ne paroist pas
» que personne se pust prévaloir d'un privilège
» auquel on est accoutumé, et qui d'ailleurs est
» fondé sur le droit où l'on a toujours cru que
D nous mettoit un ancien échange dont on produit
D les titres. Je vous demande mille pardons,
» Madame, de cet ennuyeux détail ; c'est abuser
» de vostre bonté et de vostre patience ; ce seroit
» vous ennuyer de nouveau, que de vous dire les
» raisons qui peuvent me servir d'excuse. J'ose
» donc seulement vous assurer. Madame, que je
j> suis toujours de la mesme manière, et avec toute
» la tendresse dont vous voulez bien que je vous
» parlfe sans façon, vostre très humble, etc., etc.
» A Fontevrault, le 14 mars 1691. »
i> Sire,
» Je ne ressent jamais si fort la pesanteur de ma
D charge, que lorsqu'elle me met dans l'obligation
> d'importuner Vostre Majesté. Je suis sy éloignée
» par moy-mesme de vouloir me soustraire aux
» loix, que j'ay non-seulement la soumission à
» laquelle je suis obligée, mais encore une admira-
» tion sincère pour tout ce qu'il vous plaist
» d'ordonner. C'est donc. Sire, en me faisant une
3> extrême violence, que j'ose demander à Vostre
» Majesté qui lui plaise exenter cette abbaye de la
> taxe des bois. Dieu m'est témoin, et tout ce qui
— 123 —
» est icy eu pouroit repondre, que j'ay fait les
» derniers efforts pour trouver les moyens d'y
» satisfaire, et que sy la chose n'estoit que très
I difficille, je ne songerois pas mesme à faire
•) connoistre à Vostre Majesté tout ce que je souffri-
» rois pour éviter de luy estre importune. Depuis
> que cette ordonnance est publiée, je résiste aux
> cris de ma communauté, qui me demande d'aller
» me jetter aux pieds de Vostre Majesté et de luy
» exposer la ruine dont cette abbaye est menacée,
» sy par vostre bonté nous ne sommes pas dispen-
> cées de la taxe. Il n'y a point d'exagération dans
9 cet exposé, comme dans la plupart de ceux dont
* Vostre Majesté est fatiguez. J'ay sur cela une
» connoissance plus exacte que mes religieuses,
> et j'ay moins de pente à m'alarmer qu'elles.
Cependant le mal ne me paroist pas moins grand
» qu'elles le publient, et je n'y pense qu'avec
» frayeur. Nous avons ouy dire que l'exemption
* avoit esté accordée à quelques communautez,
> et cette nouvelle a augmenté le blasme qu'on
> donnoit déjà à ma retenue. Je n'ose expliquer
» plus au long tous ces besoins et toutes les perse-
» entions qui justifient la hardiesse que j'ay de
> faire une demande dont je connois très bien
3> touttes les difflcultées. Je n'ay déjà que trop
» abusé de la patience de Vostre Majesté. Je suis
* très convaincue que vostre bonté ne sera pas
» moins touchez de ce que j'expose avec cincerité
» dans cette lettre, que de ce que j'aurois l'honneur à
» devons dire, sy j'estois à vos pieds ; mais rien '
— iU ^
» n'en convaincra ma communauté, que la grasse
> mesme, sy je suis assez heureuse pour l'obtenir
» présentement. Cette circonstance la rendroit,
» s'il ce peut, d'un plus grand prix, et augmente-
» roit beaucoup ma reconnoissance très respec-
» tueuse. Quelque chose qu'il vous plaise d'ordon-
3» ner, je seray toujours, avec un zelle et un
» dévoilement parfait, de Vostre Majesté, etc., etc.»
Il était difficile de refuser une demande si adroi-
tement présentée ; aussi le roi s'empressa-t-il, par
la lettre ci-après, d'accorder l'exemption deman-
dée, à l'abbesse pour qui il avait « une estime, une
> amitié toute particulière : j»
if J'aureis, Madame, repondu plutost aux deux
» lettres que vous m'avez écrites, si je n'avois voulu
» faire examiner vostre affaire. J'ay esté très aise de
» pouvoir accorder ce que vous desirez, et je le
» seray toujours quand je pouray vous faire plaisir.
> Je ne doute point de l'interest que vous avez
)) pris à ce qui s'est passé à Mons, vous le devez
» non-seulement comme bonne Françoise, mais
» comme une personne pour qui j'ai une grande
» estime et une amitié toute particuUere.
> LOUIS.
» A Versailles, le 22® mai 1691. >
Mnae de Fontevrault, s'empressant de remercier
le roi, lui adressa le 30 mai la charmante lettrç
que voici :
— 125 —
« Sire,
> Les nouvelles grâces que je reçois de Vostre
» Majesté sont si considérables et si touchantes,
» que je ne trouve point de termes pour exprimer
» à quel point je les ressens. L'affaire sur laquelle
» vous avez bien voulu écouter mes très humbles
» supplications, avoit causé tant d'inquiétude à ma
» communauté et à moy, qu'il est aisé de juger
j que nous avons une joye et une reconnoissance
> extresme de la voir heureusement finie ; mais
» quelque sensible que je sois à ce bienfait, les
> bontez dont Vostre Majesté m'honore personnel-
> lement, me font une impression beaucoup plus
» vive. J'en ay le cœur véritablement pénétré.
» Faittes-moi, s'il vous plaist, l'honneur de me
> permettre cette expression , et de me croire ,
> avec un parfait dévouement et tout le profond
» respect que je dois,
j> Sire,
» de Vostre Majesté, etc., etc.
» A Fonte vrault, ce 30® may 1691 *. »
La docte abbesse eut l'étrange idée de traduire
le Banquet de Platon. Nous avouons en toute sin-
cérité ignorer le motif qui poussa cette religieuse
à entreprendre un semblable travail, qui forcément
dut la transporter dans ce monde païen aux idées
* Ces cinq lettres se trouvent en copie à Angers, Arch. de
Fontevp.
— 126 —
si opposées à celles que chaque jour elle était
chargée d'inculquer dans le cœur des jeunes filles
confiées à ses soins.
On ne peut comprendre comment une femme
dont la réputation est restée intacte pour tous,
excepté pour M"^° de Sévigné — mais on sait que
la haineuse marquise détestait la famille de M"*® de
Montespan — on ne peut comprendre , dis-je ,
comment une telle femme put terminer une telle
œuvre.
Ce qui nous paraît non moins étrange, c'est que
Madame de Fontevraull choisit pour corriger cette
traduction, le chaste Racine. L'auteur A'Athalie
accepta cette tâche délicate, n'osant sans doute
refuser la sœur de la toute puissante favorite.
Peut-être fut-ce pour reconnaître l'extrême con-
descendance du grand poète, que M°"® Gabrielle de
Rochechouart fit au mois de juillet 1689 représenter
Esther dans son abbaye, où des religieuses et des
princesses de sa famille remplirent les différents
rôles ^ Comme est loin le temps où les Suisses du roi
étaient obUgés de jeter hors du couvent les reli-
* Extrait d'une lettre de M. de Baglion, évôque*de Poitiers,
adressée le 5 juillet 1689 à M"e de Boumevault :
f Je suis bien fâché que passant par Fontevrault vous
» n'aïé pas entretenu Madame, vous auriés trouvé que je luy ay
» parlé sur vostre chapitre. Non seulement on repette V Ester
» (sic) , mais mesme on le représente à Fontevrault. Monsieur
» l'evesquede Sarla (P.-F. deBeauvau) me dit hier qu'il avoit ouy
» prononcer le prologue par la princesse, qui est un éloge du
» Roy que j'ay trouvé admirable. Dès les commencements on
» m*envoia cette tragédie: » (Archives d'Angers, dossier
famille le Jeune.)
— 127 —
gieuses qui brisaient, de complicité avec les gens
du bourg, tours et grilles !
On croit que, l'abbesse de Fontevrault traduisit
presque tout Platon ; ce que nous pouvons affir-
mer, c'est qu'elle traduisit YApologie de Socrate.
L'existence d'un feuillet de cette traduction écrit
en entier de sa main, prouve ce que nous affir-
mons K On demeure convaincu, après avoir lu
cette feuille détachée, que la célèbre religieuse,
comme bien des femmes de cette époque, savait le
latin, mais probablement fort peu le grec. En effet,
ce morceau contient la reproduction en français
d'un passage de la traduction latine de Marcile
Ficin (in Apologiam Socratis), passage commen-.
faut par ces mots : Antiqui gentiam theologi...., et
finissant ainsi : .... perfectissime contineri *.
Voici maintenant la transcription littérale du
feuillet dont nous venons de parler :
« Les anciens Théologiens sont divisés en trois
» sectes, l'une ne sacrifioit qu'aux démons, se
» defflant que les prières des hommes pussent
» arriver jusqu'aux demeures célestes.
(Ici douze lignes rayées.)
> La 2™® secte joignoit à ce culte celui des
« astres, en qui elle supposoit non-seulement la
> vie et l'intelUgence, mais encore une influence
î Biblioth. d'Angers, manuscrit n» 578. Nous devons la con-
naissance de cet autographe de M«« de Rochechouart à notre
énidlt et complaisant ami M. Albert Lemarchand, bibliothécaire
en chef.
< Marcile Ficin, édition de Bàle, 1551, p. 465.
— 428 —
» sur toutes les choses d'ici-bas , comme les envi-
» ronnant de leurs rayons. Elle croyoit de plus
» qu'ils estoient attentifs aux sacrifices et qu'ils
» entendoient les vœux et les louanges des sup-
D pliants, établissant toutefois qu'il ne pouYoit y
» avoir nul commerce direct entre des estre (sic)
» matériels, comme les hommes sont en ce monde,
» et ces dieux qui n'avoient point de corps.
» La S^^ secte reconnoissoit principalement ces
» mesmes dieux, et estimoit que leur puissance,
i> leur connoissance s'estendoient sur toutes les
i> choses divines et humaines. »
Cette abbesse, la plus remarquable de toutes
celles qui gouvernèrent Fontevrault, mourut le
15 août 1704».
£n 1704 Louise-Françoise de Rocliechonart
succéda à sa .tante. Avec un esprit moins lettré,
moins brillant, elle fut cependant un administrateur
ferme et habile, et justifia ou fit naître, peut-être,
le proverbe qui existe encore aujourd'hui dans la
1 Nous nous préparions en 1869 à publier la vie de M"»e Ga-
brielle de Rochechouart , quand nous fûmes devancé par
M. Pierre Clément , de llnstitat. Ce savant , tout récemment
décédé, s'est montré dans ce livre, qui fut sa dernière produc-
tion, écrivain de mérite et historien exact. 'Cependant, comme il
n'a pas exploré l'innombrable collection rassemblée sur Pabbaye
de Fontevrault , aux archives de Maine-et-Loire, beaucoup de
pièces manquent à son histoire de Gabrielle de Rochechouart.
Notre intention est de les publier quelque jour, car tout ce quj
concerne cette éminente abbesse offre un attrait sérieux , tant
pour Fétude des ordres religieux que pour celle de la haute so-
ciété sous Louis Xiy.
~ 189 —
mémoire des habitants du bourg de Fonteyrault :
< Qu*il fait donc bon vivre sous la crosse. i>
Louis XIV, en la nommant abbesse, s'exprimait
ainsi : « J'ay esté très touché de la perte de M"^® de
ï Fontevrault, et j'ay cru ne pouvoir mieux la
» remplacer que par une personne qui luy estoit
> si proche, et qui ayant esté nourrie auprès d'elle
» aura pris ses maximes et profité de ses
» exemples... \ »
Cette abbesse maintint avec énergie les préro-
gatives et les droits de son ordre , même lorsque
les plus puissants personnages les voulaient mécon-
naître. L'évéque d'Evreux ' prétendant entrer dans
l'intérieur d'un de ses prieurés (Ghaise-Dieu), voici
les instructions qu'elle envoya le 26 août 17H à
la prieure, sœur F. de Cheveitre d'Abloville :
« La lettre pour Monsieur l'evêque d'Evreux ne
> luy doit être donnée que lorsqu'il sera prest
> d'arriver à Chaize-Dieu, et déjà dans la cour ;
> s'il ne vient point il faut la garder et la rendre
> au R^ P. Rousselet, visiteur.
» Comme evêque il ne doit point entrer au-
» dedans, la Mère Prieure doit respectueusement
» s'en défendre, et le traiter d'ailleurs comme il est
> marqué dans la Lettre Circulaire. [Quelque
> empressement qu'il marque sur cette entrée, la
* Cette lettre a été publiée par M. Louis Lacours, dans le
ÏÏaine et VAr\jou^ ouvrage édité sous la direction de M. le baron
le Wismes , en 1856. C'est à tort que M. Pierre Clément la
lonne comme inédite, dans la vie de Mme de Rochechouart.
* Jean le Normand, évéque d'Evreux en 1710, mort en 1733 ;
l fut remplacé par Pierre-Jules-César de Rochechouart.
— 130 —
» Mère Prieure doit tenir ferme, et rejetter toul
»> sur les ordres de la Supérieure générale, qui luy
» défend d'ouvrir ses portes.
» S'il déclare venir pour examiner les livres et
» la doctrine, de la part du Roy, la Mère Prieure
» respectera ce nom, et pour sa sûreté particulière
» elle le suppliera de luy montrer les ordres du Roy.
» Si cette demande le fasche, parce qu'on par-
» roistroit douter de sa bonne foy, elle tiendra
» ferme a ne pas donner l'entrée, que M'^ l'Evêque
» ne veiiille au moins luy déclarer par escrit qu'il
j) vient effectivement par les ordres du Roy.
i> Elle assaisonnera toutes ses paroles de beau-
» coup de soumission et de respect, et même de
» chagrin de n'oser faire une chose sur laquelle
» elle pourroit être condamnée. S'il refiisoit de
» donner un escrit, elle tiendra toujours ferme à
i> ne point ouvrir la porte. Enfin si malgré ses
» respectueuses remontrances, il persistoit
» vouloir entrer, elle luy demandera la grâce d
i> consulter Madame son Abbesse, et ne fera poinl
» ouvrir.
» Si M^ l'Evêque entre avec les conditions
» requises, on doit observer qu'il n'y ait rien danf
» les chambres des reUgieuses qui ne soit modeste
i> et éloigné de la vanité du monde K >
Louis XV confia l'éducation de ses filles à Louise-
Françoise de Rochechouart, et la nomma duchessfi
pour qu'elle eût le droit de s'asseoir devant elles.
* Angers, Arch. de Fontevr., carton Chaise-Dieu,
— 131 —
Loaise-Claire de Hontmorin de Saint-Hérem,
successivement abbesse de Mercoire, de Montreuil
et de Port-Royal, vint en 1742 continuer la tache
de Louise -Françoise et terminer l'éducation de ces
jeunes princesses. Louis XV, à l'arrivée de sa fille
Victoire à la cour, écrivit la lettre suivante à Ma-
dame de Montmorin :
« J'ay été très content de ma fille Victoire et
» j'espère qu'elle ne se demantira pas, et qu'elle
j> suivra toujours les bonnes leçons que vous lui
> avez données, et dont je ne puis trop vous
» remercier, ainsy que toute votre communauté,
ï Je ne suis pas surpris que vous luy fussiez atta-
» chée ny que vous ayez esté fâchée de vous en
> séparer ; il vous en reste encore deux, qui
» pourront faire votre consolation, et dont je ne
» doute pas que vous preniez autant de soin de
3 l'éducation, que de celle cy. J'espère que présen-
1» tement la santé de Sophie va se fortifier. Je me
i> recommande toujours à vos bonnes prières ; vous
> avez seurement icy une bonne avocate. * »
Signé: n LOUIS. »
A peine arrivée à la cour , la jeune princesse
s'empressa d'adresser à ses sœurs la relation de
* Angers, Arch. de Fontevr. Cette lettre en copie, et sans date^
est de 1748. Mme Victoire, cinquième fille de Louis XV, partit de
Fontevrault pour Versailles le 10 mars 1748, laissant à l'abbaye
ses deux sœurs Louise et Sophie, qui n'en sortirent qu'au mois
d'octobre 1751.
— m-
son voyage ; voici le naïf récit de cette ex-pension-
naire, pour lors âgée de quatorze ans :
« Lettre de Madame Louise-Victoire
» A Madame Sophie.
» Je suis enfin arrivée en bonne santé, ma chère
i> Sœur ; le Roy et mon Frère sont venus au-devant
3> de moy jusqu'à la montagne de Precy-Piquel.
:& J'ay voulu me jetter à ses pieds, mais il m'a pris
1» par le milieu du corps et m'a ordonné de mon-
» ter; il étoit dans le fond, à droite, et moy à
» gauche, et mon Frère étoit sur le devant, avec la
» Marechalle. Mon Papa m'a fait toutes sortes
» d'amitiés, et pendant que je luy baisois la main,
» le Dauphin s'est jette à mon col et m'a embrassée
>. pendant un quart d'heure. La Reine m'a fort
» bien reçue et mes Sœurs m'ont fait toutes sortes
» d'amitiés ; elles ont esté beaucoup plus embras-
i» sées que moy ; ma Nièce n'a pas criez en me
j> voyant et m'a appelée sa tante ;' je la trouve fort
3> jolie. La Dauphine est fort aimable. Je suis en-
» chantée de tout le monde. Je suis fort lasse; il
» faut que l'on m'ait présenté plus de six mille
j» personnes et que j'ay fait plus d'un million de
j> révérences. Je vous envoyé une lettre de l'in-
i> faute *. Enfin si je t'avois, et ma pauvre Mjmie,
* Sa sœur Marie- Louise, qui avait épousé Philippe de Bourbon,
infant d'Espagne.
— 433 —
» je serois trop contente. Faitte bien mes compli-
» ments à Mimie Macartie et à Courtin K
> Adieu, je t'embrasse de tout mon cœur,
D VICTOIRE \ ^
La conciliante Marie-Lonise de Valence vint
en 4752, du prieuré le Paravis, remplacer la gou-
vernante4nstitutrice des princesses du sang, après
avoir, par la séduction de son esprit et sa haute
intelligence, obtenu ce gouvernement si envié. Une
phrase d'une de ses lettres la dépeint tout entière :
« Lorsque vous vous serez bien mis au fait de
> tout ce cahos de procès , attachez-vous à ne
» suivre que ceux dont le succès n'est pas dou-
» teux, et, dans ceux-là même, employez toutes les
> voyes de conciliation qui paroîtront raisonnables
» à un esprit aussi éclairé et rempli de droiture
î que vous possédez, et qui vous attirera de moi
» en particulier les sentiments d'une parfaite es-
9 time *
• • •
Enfin Julie -Sophie -Gillette de Pardaillan
l'Antin, née à Paris, paroisse Saint -Roch, le
! avril i 724, fille du duc d'Antin et de Gillette de
1 Sœur Macartie et sœur Courtin étaient attachées aux per-
Dnnes des princesses.
* Angers, Arch. de Fontevr. Cette lettre n'y existe pas en ori-
nal, mais en cepie.
* Lettre du 18 septembre 1756 adressée, à Paris, à M. Chariot
Croix. — Angers, Arch. de Fontevr.
8
- iU —
f
Montmorency -Luxembourg, termina la liste des
trente-sept abbesses de Fontevrault.
En écrivant ces lignes devant le superbe portrait
original de cette infortunée religieuse , nous
ne pouvons réprimer un sentiment de tristesse, à
la vue de tant de distinction et de souffrance em-
preintes sur ce noble visage ; on croit lire dans ses
yeux pleins de mélancolie les appréhensions d'un
terrible avenir.
Sentant, comme tous les esprits supérieurs, ap-
procher le moment fatal où tout ce qu'elle aimait
allait être à jamais englouti, elle désire une der-
nière fois, par ses sages conseils, raffermir les
croyances de ses chères reUgieuses et de ses reli-
gieux, croyances déjà bien affaibUes par les idées
nouvelles. Elle envoie donc à tous ses prieurés
cette Circulaire, d'où s'échappe un long cri de dou-
leur et de désespoir :
« Chères Filles et bien-aimées Religieuses,
• •••••••••••••••
» Loin donc de vous, mes chères filles, toute
j) lâcheté, toute dispence et toute reserve, vous
» n'avez dans l'état monastique aucun danger de
» vous perdre, que vos propres penchans . .
D Nous n'ignorons pas que, dans tous les tems,
» l'ennemi du salut n'a cessé de semer l'yvraie
» dans le champ du Seigneur. Mais aujourd'hui
» notre douleur est à son comble à la viie du trisli
j> spectacle de dissipation, de relâchement et d'in
— 135 —
3> subordination qui régnent dans la plupart de nos
> Communautés. La piété, la ferveur, la régularité
» qui les caractérisoient autrefois ne nous laissent
» appercevoir aujourd'huy que les tristes restes de
» leur première splendeur !
> C'est avec la plus vive sensibilité que nous
î voïons l'esprit religieux s'éteindre sensiblement
ï dans ceux qui par la sainteté de leur ministère
» devroient être des modèles parfaits de la plus
> exacte régularité. Plusieurs de nos religieux,
ï plus jaloux de briller aux yeux des hommes que
> de soutenir la gloire et la décence de leur état,
» rejettent avec mépris l'habit respectable que la
3 religion leur a donné, pour luy préférer une
» soutenue et même des habits courts, qu'ils ne
» rougissent point d'étaler dans les parloirs et à la
» table
> Ignorent-ils qu'ils doivent au public l'exemple
» d'une conduite et d'une décence irréprochables?
.. «••••«..•..•••
» Ignorez-vous que dès que les premières pierres
> d'un édifice ont commencé à se désunir, tout
> s'ébranle, tout est sur le point de s'écrouler ! ! * »
Chassée de sa maison par la Révolution, errante
et fugitive. Madame d'Antin sut si bien cacher sa
^retraite, que nul jusqu'ici n'a pu faire connaître
d'une manière certaine le lieu où expira cette der-
* Biblioth. d'Angers, manuscrit n» 792.
— 136 —
nière abbesse * de la somptueuse abbaye surnom-
mée avec orgueil : « Uouvrage de la dextre de
» Dieu — La bien-aimée des Papes — La mamelle
» des princesses et des grandes dames ^, » et qui
fut biea véritablement le Saint-Denis des jeunes *
filles de la noblesse française.
1 Bodin prétend que M«ne d'Antin mourut en 1799 sur un Ut de
THôtel-Dieu de Paris. Nous avons fait compulser avec le plus
grand soin les registres de cet établissement ; il n'y existe au-
cune trace du décès de cette abbesse,
* B. Pavillon, Hist. de Robert d'ArbrisseL
INVENTAIRE
DE FEUE
Mme marie de BRETAGNE.
3 NOVEMBRE 1477,
•>AA/\A«-
INVENTAIRE des Meubles délaissez par de très
BONNE MEMOYRE ReVERANDE DaMME ET MeRE EN DiEU
FEUE Madamme Marie de Bretaigne, Adresse de
Fonteyrault, que Dieu absolve, appartenans au
couvent dud. lieu, fait par religieuses et hon-
NESTES dames SEURSMARGUEteHAUDRY,GRANT PRIEUSE*,
Marguerite de Breczé *, seneliere, Jehanne de Bo-
naffayre *, prieuse de cloistre de font., es
* Marguerite Haudry fut la 45« grande prieure de Fontevrault ;
elle mourut en 1484 , âgée de 80 ans. (Gallia christ. ^ t. II,
p. 1339.) Cette religieuse donna pour son anniversaire un beau
calice d'argent doré, pesant 2 marcs, et plusieurs objets d'or.
{Sainte^Famille, t. III, p. 63.) Comme grande prieure elle fit
toutes les affaires de l'ordre jusqu'à l'avènement d'Anne
d'Orléans.
i Marguerite de Brezé fut en 1492 grande cellerière de l'ab-
baye. (Angers , Arch. de Fontevr. , Inventaire des titres ,
t. VII, p. 481.)
' Après avoir été en 1466 prieure du couvent la Font-Saint-
Martin, paroisse d'Usson , diocèse de Poitiers , cette religieuse
fut grande prieure de l'abbaye ; elle mourut le 5 septembre.
(Gallia christ., t. II, p. 1329.) Elle donna à l'église de Fonte-
^Tault plusieurs volumes , entre autres « unum Breviarium
» luculenter scripium et punctuatum, » et plusieurs objets
feits par ses propres mains. (Sainte-Famille, t. III, p. 64.)
— 140 —
PRESENSES DE ReLÏGIEUSES PERSONNES FRERES GUIL-
LAUME DE BaILLEUL, prieur DE L'AbIT, ET JeHAN
BOUSHERON S PRIEUR DE SAINT LORANS * ; LESD. BIENS
LIVREZ AUX DESSUSD. PAR SEUR JeHANNE DE MaNCU-
GNY *, CELLERIERE DE S* BeNOIST *, QUI d'iCEULX AVOIT
^ Jean Boucheron fut nommé en 1467 prieur de Saint-Laurent
et conseiller de Tabbesse Marie de Bretagne. En 1480 il visita
par mission d'Anne d'Orléans les prieurés de Tordre. (Angers ,
Àrch. de Fontevr., Trésor de V ordre, 1. 1, pp. 16 et 184.)
* Cette chapelle, qui existait encore en 1505, était située dans
Tabbaye de Fontevrault; elle fut fondée en 1180 par Aliéner^
rei«e d^Angleterre, ^ont le fils, le prince Jean, la dota d'une
rente de 50 livres sterlings. En 1199 Aliénor lui fit une nouvelle
donation : 10 livres de rente à prendre sur la prévôté d'Oléron,
à condition que son chapelain, îr, Roger, desservirait la chapelle
et jouirait sa vie durant de ladite rente. Cette princesse donna
encore à Saint-Laurent une maison qu'elle avait fait bâtir à
Poitiers , « juœta portant Comitis. » (Sainte-Famille ^ t. III ,
pp. 357 et 378. — Angers, Arch. de Fontevr., Inventait-^ des
titres, t. m, p. 446.)
' Jeanne de Mancigny était sœur de noble homme Jean de
Mancigny, seigneur de Chantelou, premier échanson du duc
François II, frère de Marie de Bretagne. Jean fut enterré en 1467
à Fontevrault, « du costé du grand autel, en face l'image du
> Crucifix. T> La mère de Jeanne et de Jean, fut « Jeanne de Sancto
» Petro in CampLs, » qui demeura près de M™' d'Estampes
jusqu'à sa mort. Décédée le 25 février 1470, on l'enterra avec son
fils. (Sainte-Famille, t. Ill, p . 70.)
^ L'église de Saint-Benoit était^ dans l'abbaye de Fontevrault,
destinée tout particulièrement aux reUgieuses infirmes. Nous
ignorons l'année de sa construction ; elle existait déjà en 1180,
car un nommé Jean Maumoine donna cette année-là 2 écus de
rente aux infirmes de Saint-Benoit, M»« Brigolente étant prieure
des infirmeries, y furent cellerières : sœur Philippe du Lys en
1378, et sœur Jeanne Tassarde enl482. M.Denis Solimon, secré-
taire de M°»» Louise de Bourbon de Lavedan, mort le 22 janvier
1628, fut enterré devant l'autel de Saint-Benoît. (Saintiî-/î'a-
mille, p. 352. — Angers, Arcb. de Fontevr., Trésor de Tordre
1. 1, p. 190.) '
— 141 —
l'administracion en la vie de lad. defuncte. Com-
jf anse a faire le lundy m» de no^" mil iiij« lx dix
SEPT.
Primo. Reliques et Joyaulx»
Ung tableau d'or, long, garny de xij perlez „V„»g'*«°^®y*
pendant a une chesnette et ung bouton, le tout
d'or, ouquel a une feugle de loryez sur laquelle a
de l'escripture que monsieur saint Jehan flst de
rApocalice ; pesant, led. tableau . . v® w d'or.
IFng aultre tableau d'or, ront, qui se eupvre,
dessus lequel a d'ung des coustez ung camayheu,
et a de l'autre cousté ung ymage de Nostre Dame,
et au dedans dud. tableau une Annunciation ; d'ung
cousté et de l'aultre une nativyté Nostre Seig"" ;
pendant, led. tableau, a une cbesne d'or ; dessus
lequel , des deux coustez , a seze perlez , quatre
sapbirs et quatre balaiz ; pesant , ledict ta-
bleau . \o xiiij esteriins.
Ung petit camail d'or à l'ordre d'Orléans, pes^
ôijo ijur ^, dont il fault le porc epiz ••
Item ung aultre petit tableau d'or, ront, ouquel a de
1 François II, frère de l'abbesse, mort à Coairou le 9 sep-
embre 1488, et enterré le 13 du même mois dans l'église des
larmes de Nantes. Nous voyons cités dans une brochure de
L Stephen de la Nicollière, intitulée « Description d'un grand
nombre de bijoux du trésor des ducs de Bretagne ^ etc.,» plu-
ieurs objets ayant appartenu à cette abbesse de Fontevrault.
* Ordre de chevalerie institué en 1394 par le fils de Charles V,
x)uis d'Oi^léans, à l'occasion de la naissance de son fils Charles
père de la vingt-septième abbesse, Anne d'Orléans). L'emblème
tait un porc-épic. Cet ordre fut supprimé par le roi Louis XU,
Sainte-Famille, t. III, p. 567.)
— 142 —
la vraye croyz et de plusseurs reliques de la Saincte
Ghappelle de Bourges S pesant (poids non indiqué).
La Mix a esté Une paix ronde ', au tour d'or, en laquelle a ung
deiaioe a Orléans grant Aguus Dei, ot dessuz ung Crucifix avecque
les ymages de Nostre Dame et sainct Jehan entail-
lez, pesant iiij^'
Une petite chasse d'argent doré, aux armes de
feue mad. Dame, ouquel a des reliques de saint
Cosme et de saint Eustache.
Ung aultre tableau carré, d'argent doré, ou-
quel a de la vraye croyz de la crèche Nostre
Seigneur et de plusseurs aultres reliques, et au dolx
les armes [en escusson de feue madanune Des-
tampes ' ; pendent a une petite chesnette ; pesant,
led. tableau. ...... (poids non indiqué).
Ung petit livret d'argent doré, ouquel est en
l'ung des coustez l'ymage de saint André, et de
l'aultre saint Jaques, ouquel a de la vraye croyz.
Ung petit tableau ront, d'argent doré, ouquel a
de la chemisse saincte Marguerite.
Ung tableau d'argent, long, ouquel a des reliques
de monsieur sainct Anthoyne et aultres , lequel fut
donné a feue mad. Damme par le sieur de la Sorce.
Une bourse a l'eupvre d'Angleterre, cramoysie,
en laquelle a plusseurs reliques non enchâssées.
Des reUques de saint Biaise, de sainct Cristofle
* Cette chapeUe dépendait immédiatement du Saint-Siégc;
eUe fut fondée par Jean, duc de Berry, frère de Charles V ; le
fondateur y fut enterré dans le chœur, en 1416. {Dictioti. de
Moréri.) y»
* Plaque que le prêtre donne à baiser après YAgnus Bel.
8 Mme d'Estampes, mère de Marie de Bretagne.
— 143 —
et de plusseurs aultres saint , en ung petit chassiz
de boys ront, non enchâssées.
Une aultre bourse bleue, a l'eupvre d'Angleterre,
en laquelle a plusseurs reliques non enchâssées.
Plusseurs Agnus Dei en une bouete de boys, non
enchâssez.
Item plusseurs oultres reUques en une cassette
de boy, non enchâssées.
Toutes lesquelles reUques susd. sont en ung
coffre d'yvuere, de ung pié de long, ou environ,
en l'entour duquel coffre, et au dessus, est hystorié
la vie Noustre Dame ; a ferrure d'argent doré.
Item une croyz de boys estant en ung estuy de Envoyé k u
cuir, en laquelle est entaglée la vie Nostre Seigneur,
au dessuz de laquelle a ungj bouton d'argent doré
et ung agnellet ataché aud. estuy.
Ung tableau de cyprès ouquel a ung Crucifix
d'yvuere.
Ung ymage de nostre Dame dernière, [assise sur
ung siège '.
Item deux petitz coffres paincz , Jesquelx a plus-
seurs reliques non enchâssées.
Ung coffre brodé de soye verte, ouquel n'a riens.
Item quatre chemises de Unge de Nostre Dame
de Chartres.
Ung coffret ouquel a ung Crucifiz d'escalle de
* Marguerite de Foix, deuxième femme du duc François II,
morte le 16 mai 1486, inhumée à Saint-Pierre de Nantes, « lais-
j) sant la réputation d'avoir esté une des plus beUes femmes de
9 son temps, et autant accomplie en bonnes mœurs qu'aucune
» autre de son aage. » (^D'Argentré, p. 952.)
* Portrait de Marie de Bretagne.
- 444 —
perle, et au pié deux ymages de Nostre Dame et de
saint Jehan sur une crois d'argent doré.
Ung petit coffre paint, ouquel a une paiz d'or
dedans, laquelle a ung Dieu de pitié, d'or, et ung
cristal par dessus ; a l'environ de laquelle paiz a
cinq balaiz et six perlez ; pesant iiij^
Elle avoit esté Uuo petite boucto d'or, ronde, semée de gre-
coïîeSi ï'feue nectz, do rubyz, et au dessus une petite esmeraude
î° mbcomT'^pm ^^ laquelle a une esmeraude grande , enchâssée ou
led. cottTeDt. assise en ung agneau d'or ; laquelle bouete et
esmeraude fut donnée par le couvent de ceàns a
feue mad. Dame.
Donné à la Kem uug petit coffre d'or, a huyt perlez, fermant
«agdelaine. ^ ^j^j^ ^^^^^j ^ ^^^ j^^^^^
^^Donné a mad. Uug petit tablcau d'or, ouquel est l'ymage de
saint Sebastien, donné a feue mad. Dame par
Madame Anne de France K
^ Envoyées à la Uues pateuoustros de jaspes et de cassidoynes ',
Duchesse. j , • u' s ^ •
aux armes de la passion, merchees ' de six
signeaux a neu d'epi, d'embre, avecque ung cueur
au hault, une pommecte- es touffe au bas ; le tout
d'or esmaillé de blanc.
Des troys pe- ^^S gfoux dyamcut de iiij" esterL, et troys petiz,
Smde^'^priêusJ ï^ tout enchâssé en quatre agneaux d'or.
"ieu8e"df Saint Uuo osmcraudo en une verge nieglée.
Ladre, l'auitre. ^jug amostlque cu uu vergo d'or.
1 Fille de Louis XI, mariée à Pierre de Bourbon, seigKeur de
Beau jeu.
' Cassidoynes : sorte d'agathe demi-transparente, teintée de
couleur légère et nuageuse.
» Marquées.
^ 145 —
Ung agneau d'or aux armes de la passion.
Ung petit camagheu a une face en ung agneau d'or.
Item troys fermailles ^ a petites chesnectes pen-
dentes, esmaillées de gris et de noir, dont en l'ung
a six perles et ung petit ruby ou milieu ; et en
l'aultre cinq perles, et au hault ung ruby, et ou
milieu ung saphir ; et en l'autre a troys petiz
balaiz, troys bien petiz grenectz de dyament, et ou
milieu une esmeraude a l'euvre du Puy ; pesant
XX esterl.
Item deux grans saphirs non enchâssez.
Ung petit cueur d'or, ouquel a ou milieu une
pierre loupe.
'Ung eul de chapt * non enchâssé.
Ung petit flaquon de verre de pié , enchâssé en
argent doré et aux armes d'Orléans, et au dessus
ung fleur de liz ; estant en ung estuy de cuir.
En ung coffre de cyprès ont esté trouvez les
joyaulx qui sensuivent : c'est assavoir ung tableau
d'or ouquel est enmaillé l'image du Crucifix,
Nostre Dame et saint Jehan ; pendent, led. tableau,
a une chesnecte d'or ; pesant ij™ v^ v9''°^
Item une espronne d'argent doré, ouquel sont
enchâssées cinq langues de serpent '.
Item ung petit gobellet d'argent, couvert, esclissé,
ouquel a une couronne d'argent doré.
^ Fermoir, agrafe, boucle.
* Œil de chat : pierre précieuse transparente, de diverses
couleurs, oblongue, corindon nacré.
8 Langue de serpent : pierrre de couleur rose blanchâtre, de
forme semblable à la langue du serpent.
9
- 446 -
Item unes paternoustres de cristal, merchées a
gros signectz d'or, et en y a en nombre xxij mer-
chez. d'or.
Item unes aultres paternoustres de cassidoyne,
merchées à huyt signectz d'or.
Item unes aultres paternoustres de cassidoyne
et jaspe, merchées a six signeaulx d'or.
Item unes aultres de gest, merchées a xj signeaulx
d'or, de une ymage de saincte Barbe et ung Agnus
Dei.
Item six signeaulx d'or sans paternoustres.
Item unes aultres paternoustres de cassidoines,
a glans.
Item unes aultres paternoustres de grosses
jaspes.
Item unes paternoustres de coural menu, mer-
chée de sept perles de compte, et de xxv pater-
noustres d'or menues, et une croys d'argent doré.
Item unes paternoustres de cassidoine et jaspe,
qui sont plates.
Item unes aultres paternoustres de coural, mer-
chées d'ecaille de perles.
Item deux agneaulx d'or a chacun ung ruby.
Item ung aultre agneau d'or ouquel a une rou-
gecte.
Item ung agneau d'argent doré ouquel a Jehesus.
Item ung aultre agneau d'or couvert d'ambre.
Item une branche de coural.-
Item unes paternoustres d'or, esmaillées de azur.
Item ung tableau de y vueyre , ouquel est entaillé
le Christ pourfiz et Nostre Dame.
-U1 -
Item iiij<> et demye de perles, ou environ.
Item douze chesnectes d'or, esquelles a en cha-
cune d'ycelles xviij perles de compte avecques ung
bouton, et plusseur aultres perles de compte.
Item une paire de couteaulx garniz de poinson et
de forcetes et de pincetes, et y a xvij perles de
compte.
Item une aultre paire de couteaulx ferrés et gar-
nis d'argent doré, de cristal et de jaspe.
Argent Content.
Item a esté trouvé en une bourse de cuir en ung
coffre ront, ouquel sont les chouses dessusd., ce
qui sensuit, c'est assavoir :
Dix nobles a la rose, valant. . . . xl livres.
Vingt nobles de Hanry, dont en y a xviij grans et
quatre petiz demyz , valent Ixxl.
Quinze moutons a la grant layne, chacune piecze
xlv solz, valent xxxiij 1. xv s.
Cinq royaulx, valent . . . . viij 1. xv s.
Soixante dix escus vieulx, a xxxvij s. vj d. la
piecze^ valent vj"xjl. vs.
Dng salut d^or, valent xxxv s.
Deux petiz angeloz Ivj s. viij d.
Une bouecte en laquelle a esté trouvé le seau
d'argent de feue Madame, qui est cassé, et ung
signet d'or de feue mad. Dame, lequel signet a esté
haillé a maistre Girard, secrétaire de feue mad.
Dame.
Item fut encor trouvé par Madame de Saint-
— 448 —
Benoist, par une part, G solz, et, par aultre part,
vij livres, qui est en tout xij 1., envoyez aux frères
de Mirebeau et du Croullay pour prier pour feue
mad. Dame, ainsi qu'est contenu en la mise faicte
pour le service ; pour ce xij 1.
Idem fut baillé par inventaire, au sieur de Mon-
teaux, maistre d'ostel de feue mad. Dame, tantoust
après son treppas, ou compte de la Mag"® lez Orle%
la somme de vij"xviij 1. xiiij s. vj d. obole, que
fut treuvée es coffres et bouectes de feue mad.
Dame, avecque certaine vesselle d'argent dont
sera cy après faicte mencion ou feuillet suepvant ,
et de laquelle somme il a tenu compte, ainsi que
appert ou papyer de la mise de Tobseque ; pour
ce vij"xviij 1. xiiij s. vj d. obole.
Item de Ghasteau Frommont * xl livres avecques
L 1. pour la pension dudict sieur deMonteaux, et pour
lesquelles sommes Mesdames luy ont transporté ce
que leur debvoit le recepveur dud. lieu, conune ap-
pert ou compte sur ce fait, et dont elles ne asseu-
rent icy que lesdites xl 1., pour ce qu'elles asseierent
ou payement de ce que luy estoit deu icelle somme
de : xll.
Item du recepveur de Nantes, pour ce que estoit
deu par luy a mad. Dame, avant son trespas, led.
recepveur a poyé de ses chausses ij^xxxv ^ . xiij s. viij <*.
* Ghasteau Fromont, près Nantes. « En 1542 Michel le Jeune,
» escuyer, forestier de Fontevrault, fut constitué par M"« Louise
» de Bourboh capitaine de sa terre et seigneurie de Château-
» Fromont. » (Angers , Arch. de Fontevr., Trésor de l'ordre,
1. 1, p. 114.)
— 149 —
Aultres deniers pour vendielon d'Or, d'Argent
. a monnoyer, et Perles, Pierres, ete*
Item pour les perles qui ont esté vendues a Macé
Gousson cxvj i.
Item pour vj"^ vj<* et demye d'or, vendu audict
Gousson le pris de vj^lxviij liv. t.
Ledict nombre de vj"^ vj^ et demye d'or est en une
couppe esguiere, ung camail a l'ordre d'Orléans,
une netite chesnete et unes paternoustres ; le tout
d'or"
^150 —
Sensuit laWeeselle d'Argent et d'Or,
Fait le Mardy ensuyvant.
Quatre poctz d'argent, dont en y a deux grans et
deux moyens, le tout aux armes de Madame ; pesant,
le tout xxiiij"^ iij^
Item une couppe d'or, couverte, pesant, ij"^ vj^
Item une esguiere d'or, pesant . . . ij°^ vj^.
Item une couppe d'argent, couverte, godoronnée,
pesant iij".
Item deux essays * d'argent doré, pesant. iij°^iiijX
Item une xij»^® de tasses d'argent, aux armes de
Madame, pesant ensemble xx"^.
Item une tasse martellée , a^pié, ouquelle est le
moys de juillet, pesant troys marcs, ou environ ;
pour ce iij°^.
Item ung dragouez d'argent, aux armes de feue
Madame, pesant v"^ iiij°.
Item troys chandeliers d'argent, aux armes de
feue Madame, et a chacun d'yceulx deux bibe-
rons vj™.
Item six gobellectz godoronnez, dorés a moytié,
pesant v • • • • "j"^ YJ''-
Item cinq poctz d'argent a mectre eau , pe-
sant yiij™.
Item neufs tasses , de ung marc et demy ou en-
viron chacune, pesant ..-..•. xij°^ iiij*^.
* Essai : tasse ou coupe qui servait à faire Tessai des boissons,
chez les princes.
— 151 —
Item une tasse de i"^ iiij^ ou environ, aux armes de
mad. Dame, pesant i™ iiij®.
Item six tasses en estuy, verrées, chacune d'ung
marc ou environ, pesant v™ vj^.
Item deux tasses verrées et a fleurectes, de cha-
cune ung marc, ainsi ij"^; pour ce ... . ij"^.
Item viij tasses petites ; pesant . . vij"^ iiij<>.
Item une grant tasse ou fons de laquelle y a ung
G et ung B , pesant ....... ij^vj^.
Item quatre saUieres verrées, dont en y a deux
couvertes et une a pié; pesant en tout. . . ij™.
Item troys gobellectz dont l'ung est a pié ; pe-
sant ij™.
Item seze cuillères d'argent. ^JiZ .^mll
Item une cuillère a ouster ou a masser cyre, <ïei»Magdeiaine.
pesant vij^iiii^
Item troys tasses, dont en a esté baillé une pour
faire ung calice a la Pignonniere \ et deux a la se-
cretaine, et pour ce ne sont point en somme.
^ La Pignonniere, située paroisse de Saint-Barthélémy, près
Angers : tout ce qui dépendait de cette seigneurie était dans la
ville d'Angers et dans les paroisses de Saint-Barthélémy, Corné,
Saint-Germain de Saint-Laud, Frémur, Villevéque, Corzé, Fou-
don, Pellouaille, Saint-Sylvain et Denée-l'Hermitage. (Angers,
Arch. de Fontevr., Inventaire des titres^ t. V, p. 135.) En 1115
Jean Pignon , Ermangarde sa femme et leur fils Garcin vendi-
rent à R. d'Arbrissel pour 1,000 sols tout ce qu'ils possédaient
dans une terre nommée la Verrerie (Ferraria), vente confirmée
par Foulques le Jeune. Plus tard le gendre de Pignon, Emuf de
Xevers , contesta la validité de cette vente . Pétronille , alors
grande prieure de l'ordre, vint, accompagnée de plusieurs reli-
gieux, Renaud de Cocé, Jean de Posange, soutenir ses droits
devant le comte d'Anjou. {Grand Cartul. de Fontevr., ch. 845.
— Sainte-Famille, t. III, p. 268.) Adélaïde, demoiselle de la
— 152 ~
Era Chapelle de mad. Dame*
Deux grans chandeliers d'argent a mextre flam-
beaux, pesant v™\t
Item deux aultres petiz chandeliers a mextre
sierges, qui sont d'argent doré.
Item une clochecte d'argent, aux armes d'Orléans,
pesant avecques les deux petitz chandeliers, iiij"' iiij^
Item deux basins d'argent doré, pesans iiij"*v<ï^.
Item deux choppines d'argent, aux armes de
mad. Dame i°*iiij^
It. ung calice d'argent doré, pesant ij^j^et demye.
reine Bertrade , entrant à Fontevrault, abandonna ce qu'elle avait
acquis de Pierre de Montsabert dans la paroisse de Saint-Barthé-
lémy. Achard d'Echarbaut attaqua cette donation ; le différeivl
fut terminé moyennant 300 sols et un manteau de couleurs va-
riées, que Tabbaye donna à Achard et à Elisabeth sa femme.
{Sainte-Famille, p. ^. — Michel Cosnier, p. 467.) En 1205 h
comte Geoffroy Martel donna des vigmes à la Pignonnière, peut-
être celles de Frémur, plantées avec du plan de Bordeaux. (An-
gers , Arch. de Fontevr., carton la Pignonnière.) Adam de
Rochefort donna, avec le consentement de sa femme Mahaud et
de sa fille Elisabeth, vingt livres de cens, cinq arpents de vigne.
cinq borderies et toute la terre qu'il avait audit lieu. {Ib'ui,
cartons la Pignonnière; — et Inventaire des titres , t. VIL
p. 472.) Tessende, femme de Hugues Boillou, donna deux
arpents de vignes (Inventaire des titres, t. V, p. 131.) L'an-
née 1228 Guillaume de Hautemulle, fils de Jean le Trec ,
donna deux arpents de vigne, situés «c apud Columbarium
9 reliquum in tandis. » (Ibid.) Alix de Blois, abbesse, ayant
reçu de ses parents des sommes importantes , acquit pour la Pi-
gnonnière dix arpents de vigne, valant vingt-cinq livres dt?
rente. (Ibid.^ Inventaire des titres, t. V, p. 132.)
C'était, comme on le voit, une importante propriété; Tabbess**
y avait droit de haute et basse justice; en 1761 cette seigneuiio
— 153 —
Ilem ung petit benoistier d'argent et ung
asperges . . \'f.
Item ung parement d'autier pour le hault, qui est
de soye, ouquel est la nativité Nostre Seigneur, aux
armes de feue Madame la comtesse d'Estampes.
Item ung bel drap d'or, a roses, qui puet con-
tenir vj aulnes, ou environ, qui est en ung champ
cramoysi.
Somme toute, d'or v"^ iiij®.
Et d'argent. . vj""^xiiijo.
Item une ymage d'argent, de saint Benoist,
pesant v«* et demy, ouquel a du chef de Monsieur
saint Benoist ; lequel ymage couste en faczon et
doreure, iij™ ; dont sera fête apstraction avecques
était affermée»450 livres et 4,110 livres an 1784. n ne reste pres-
que rien de l'antique chapelle, où trois fois, par semaine on cé-
lébrait la messe à l'intention des seigneurs fondateurs; une
colonne et une fenêtre indiquent qu'elle remontait au xii* siècle
et font vivement regretter sa disparition.
Dans la Grande-Claverie, ou Couronnerye , dépendant de ce
fief, se trouvait ime chapelle fondée sous Alix de Blois, vers 1228,
en rhonneur de Blanche de Castille, cousine d'Alix et mère de
saint Louis. Cette princesse fut une des bienfaitrices de l'ordre :
(' Pendant sa vie elle témoigna de grandes affections à Fonte-
» vrault, et dans une pressante nécessité lui fit une aumône de
» plus de 500 livres, maintint puissament les droits, exemptions
î> et privilèges de cette abbaye, et lui laissa mil livres par son
I' testament , comme fait foy son épitaphe. » (Sainte-Famille,
t. III, p. 129.)
La Grande-Claverie est actuellement la maison de campagne
des élèves du grand séminaire d'Angers ; il n'y reste pas le
moindre vestige de la séculaire chapelle de Blanche de Castille.
La Pignonnière, reconstruite en 1551,. appartient aujourd'hui
é M. Paul de Chemellier, propriétaire du château de la Roma-
^erie, dont elle dépend,
9*
— 154 —
l'autre argent ; a porté pour ce, seulement,
yci v^etdemy^
Item a esté recceu du sieur de Monteaux le
nombre de Ij™ iij^ d'argent, qui luy fut baillé a
Orléans, par inventaire après le trépas de feue
mad. Dame, es espèces qui sensuyvent; c'est
ascavoir xij tasses d'argent plaines et d'une faczon,
aux armes de Bretaigne.
Une salliere d'argent, une aultre verre, quatre
aultres petites tasses ;
Deux esguieres d'argent, ung gobellet veré, cou-
vert, neuf cuillères d'argent, ung benoistiez et
esperges d'argent; item deux bassins d'argent;
item deux petiz chandeliers, et aultres pieczes
d'argent ronpu ; deux gobelletz verez et martellés,
deux flacons d'argent ; pesant , le tout ensemble,
led. nombre de. lj™iij°.
eiVsguferej'es! ^u cofifro qul estolt en l'église, sobz les orgues,
MzKiewuull ^ ^^^^ trouvé une couppe aux armes de feue mad.
poir^îèt È; Dame, d'argent, pesant. . . iij"* vj^ et demye.
Laz'îrf i^"°o°ar ^^^^ ^^^ esgulcre d'argout, pesant. . iij°^iij^
Maï^r*''^ <*« Ung essay d'argent doré et une tasse apié a l'ung
des moys de l'an, pesant ensemble, iij™ vj^ et demye.
Item un pié a dragouer d'argent doré et esmaillé,
ayant anges entaillez , pesant iij"^ iij^ ; baillé au
couvent pour l'anniversaire de la feue secretayne.
Une noix d'Inde, a pié et couvercle d'argent
doré ; une aultre a pié d'argent ; pesant, xliij™ iij^
Somme toute d'argent a monnoyezy sans compter
les flacons ijc iiijni yju^
* Saint-Lazare, vm des trois couvents cle Fontevrault.
155 —
MERCREDI ye JOUR DE NOVEMBRE MIL IIII^ LXXVII.
Primo. E.I11GE OU¥Ri:
en ung coffre ront, ferré, de quatres piez ou environ.
Servleetes.
Une xn® de serviectes d'une aulne, a l'euvre de Dosées
a monsieur de
Pavye, estans en une piecze. i*^h ^•
Item deux xii®s a l'euvre de Chapellectz.
Item deux xii®» à l'euvre de Venise.
Item une aultre xii®, dont en a viii a l'euvre de
Paris.
Item demye xii® a l'euvre de^Venise, de bien fort
deliéez *.
Item une xii® 'a l'euvre de Damas.
Item deux xii® d'aultres, qui sont telles quelles.
Item plus une xii® a l'euvre de Chapellet,
Item une xii® dont en a six a l'euvre de Venise,
et six de Damas.
Vingt longeres, dont en y a viii bien déliées, a Des deiiées
l'ouvrage de Venise, et les aultres plus grousses. bimé^Mademoi-
selle Anne de
Rohan, deux ; et
1 Fr. Guillaume de Bailleul. « Marguerite de
Beaavau 4 , deux
s Usées. des gréasses.
3 Sorte de nappe plus longue que large.
♦ Marguerite de Beauvau , prieure de Saint-Lazarre en 1477,
et en 1496 prieure du couvent de l'Ençloitre en Gironde.
{Sainte-Familki p. 579.)
— 456 —
Item quatre aultres grandes^ chacune de ix aulnes
de longueur.
Geste deiyée a Iteui uDe aullre déliée.
esté baillée t _^ . . , • . j
Marguerite de Item XXIII serviectcs plaines, en une piecze de
BeauTsu. . ^ t •
xxiiii aulnes et demie.
Donné denx ftem xviii serviecttes en une aultre pièce, led.
Xll*'.c'esta8sa- '^
voir i^une a M"ie linge estaut en ung coffre de cuir boully, en la
Anne et Taultre ^ ® «^ '
a Hargaerite de cuambro OU est la papegault *.
BeauTao. r i g
Doubliers *.
Deux grans doubliers a l'euvre de Damas, chacun
de IX aulnes, et de aulne demye de lez.
Item ung doubliez a l'euvre de Venise, de cinq
aulnes ou environ, et de ii aulnes i quartier de lelz.
Des iri ta. Item six tabliers de sept quartiers et demy de
baillé ' dêw** a lectz et de y aulnes de longueur, a l'euvre de Venise.
II anit™ * poOT Item deux aultres de troys aulneS de longueur et
sept quartiers'et demy de lé, a l'euvre de Venise.
L'nngdestroys Itom quatro aultres, a l'euvre de Venise, dont
eriptï' Ml pwl l'ung d'iceulx est de v aulnes de long et de aulne
riJns.et poJ"ce et demye de lé, et les troys aultres de quatre aulnes,
mis hors de rin- , mi i i j t x /• j
veniaire. de paraïUo largeur que les dessus dicts, fors deux,
qui sont chacun de cinq quartiers.
En a esté bail- Item ouatro aultres, a l'euvre de Chappelet, dont
lez deux pour • j
Madame. cu y a dcux bous ot les aultres teulx queulx % de
quatre aulnes chacun en longueur, et de cinq
quartiers de lé.
1 Perroquet. M™«» les bénédictines de FontevraïUt avaient,
paraût-U, eUes aussi leur Vert-Vert.
■ Nappes.
• Tels quelSf
— 157 —
Item ung doublier a fleurs de lys.
Ilem six doubliers, dont en a quatre a l'euvre de p^^";®»^ ^^^^^^-i
Damas et deux a l'euvre de Pavie, chacun de quatre f Ma*/*uedîrde
aulnes de longueur et v quartiers de lé. Beauvau.
Item plus ung doublier a l'euvre de Damas, i^euTre^SeDim^J
de V quartiers de large et de troys aulnes de "^J/'l.'yj;^^"^^'^^^
longueur. l'inrentaire.
Item plus une paire de doubliers oupvré, a l'ouvre
de Venise, contenant ix aulnes et m quartiers.
Item une pièce de servietes a l'euvre de Venise,
de XXI aulnes, estans oudict coffre de cuir bouUy
en la chambre dudict papegault.
Draps de E<ict*
Fut trouvé en ung grant coffre ferre estant en la
salle vert :
Troys paires de grans draps de toille de Rains, deViomeJ'poS?
desquelx en y a deux paires de chacune cinq ^*^'°''-
toilles, et une paire de quatre toilles.
Item sept paires de chacune quatre toilles, dont reî^re'JéVîuiô
en y a troys paires de toille de Hollande. îair^^unT^uu';:
Item seize paires de ^draps de chacune troys Be^HiSï^^une
tmllpc aullre paire rl^-
'^"^"^^- pessez pour ser
Item quatre paires de chacune deux toilles et MaSime? ^uue
demye. p""-
Des sezè paires a esté baillé troys paires a Ma-
demoiselle [Anne de Rohati]; une paire a Beau-
vau; a mad. la grant prieuse, une père, et une
aultre père donnée pour le couvent. Item pour Ma-
dame, uiie paire.
— 158 —
En ung aultre coffre estant entre la chemynée et
les fenestres de lad. salle, fut trouvé :
Ung grant pavillon de toille d'orties *.
Item ung aultre pavillon double et ung aultre
petit, ront.
Item un grant ciel garny de trezdolz et de troys
courtines.
Item ung aultre ciel garny de trezdolz et troys
courtines.
Item deux petitz cielz garniz de trezdolz et de
courtines.
liinge Courant.
Douze paires de linsseux, tant de troys teilles,
de deux et de deux et demye.
Item, plus troys paires.
Tappicerles*
Fut trouvé au plancher de dessus la chambre de
feue Madame, ce qui sensuit : premier, une pièce
de veloux bleu, semée de fleurs de lis d'or, servant
d'ung trefdoulx, et dedans le timbre de Milan, de
six letz et quatre aulnes de long.
Item ung ciel de soye semé de fueillage et de
petiz serfz d'or, garny de tresdoulz, de goutieres'
et de franges ; et une couverture apartenant de
mesme es dict ciel.
Item ung aultre petit ciel de sandal tanné, avec
troys couvertures de mesmes.
1 On faisait autrefois de la toile avec des orties.
« Gouttière : pente d'un ciel de lit.
— 159 —
Item une couverture de sandal vert * .
Item une chambre a orenges, en laquelle a ciel
garay de tresdoulx, de troys couvertures de sarge
verte, une couverture pour la couche, et quatre
grans pièces a tandre a l'entour de la chambre.
Item deux chambres bleues, c'est assavoir deux
cielx garnyz chacun de • tresdoulx et de chacun
troys cortines, et de couvertures.
Item quatre pieczes bleues, pour tandre.
Item ung ciel de grosse sarge, garny de trefdolz
et de deux courtines.
Item six tappis grans, aux armines, dont en y a
de XIII aulnes de long.
Troys banchers * vers, esquelx a petitz person-
nages, le tout de layne.
Item ung grant bancher double, bleu.
Item ung petit bancher a chiens courans, et ung
aultre a oyseaux.
Item ung aultre rouge, armoyé.
Item troys banchers rouges et ling noire.
Item Iroys banchers bleuz.
Item une pièce de sarge verte, contenant xiiii
aulnes.
Item deux banchers blancs.
Item quatre quarreaux de veloux noir.
Item deux de broderie à VV et fueillage, sur ve-
loux cramoisy.
Item quatre carreaux de layne, au pellican, a
lieux evidés.
* Sandal : étoiDfe de soie unie.
? Bancher : tapis, couverture de b^c.
- 160 —
Item quatre aultres au pellican, doublez de cuir.
Item quatre au serf, doublez de cuir.
Item huit d'ostade S quatre neufz et quatre
moyens, bleue.
Item quatre d'ostade noire.
Item deux grans tappis veluz, aux armes d'Or-
léans.
Item troys aultres petiz.
Item ung ciel rouge, garny de tresdolx et de cou-
verture.
Item troys pièces d'esquarlette a mectre sur les
litz.
Item cinq aultres petites pièces.
Item deux oratoires de lingette ", l'une bleue et
l'aultre noyre.
Item cinq couvertures blanches, déliées, dont en
y a une de v ou vi aulnes de long.
Draps de Saye.
Ung manteau damas blanc.
Couettes et Lltz.
En la chambre neufve dessus le pré, ung lict en
la grant chambre et ung aultre petit en la petite
chambre.
En la chambre de feue Madame, un lit et une
couche.
En la seconde chambre d'après, ung lit et une
couche.
1 Ostade : étoffe de laine.
> Lingette : espèce de ilaiiclle,
— 161 —
En la basse chambre, ung lit et une couche.
En l'aultre d'appres, ung lit et une couche.
En la chambre de la chapelle, ung lit.
En la chambre des caves, ung lit.
En la chambre de maistre Gilles \ lit et couche.
En la chambre Mons^ de Monteaux ', lit et cou-
che.
En la chambre Maistre Gérard ', ung lit.
Deux litz baillez aux cherpentiers.
Ung aultre lit baillé au maczon.
En la chambre du taint (sic), ung lit.
Wes§elle d'Estainç, de Cuisine.
Sept grans plactz.
Item treze aultres moyens.
Item xxiiii petiz plactz.
Item iiii xii'^^s d'escuelles, le tout aux armes de
mad. Dame.
Item deux burretiers et ung moustardier.
D'Erain.
Deux pelles, chacune de troys seillées ou environ.
Ilem deux aultres, chacune de deux seillées.
Item deux aultres, chacune de une seillée.
Item une aultre, de demye seillée.
Item ung chaudron, de une seillée.
Item ung aultre, de demye seillée.
1 Gilles le Roy fut le serviteur de Marie et de sa cousine Anne
l'Orléans ; il donna à Fontevrault 10 écus d'or pour son anni-
versaire. {Sainte-Famille^ p. 556.)
* Maître d'hôtel de l'abbesse.
3 Secrétaire de Marie.
i
— 162 —
De Fer et d'Acier.
• Item troys pelles d'acier, a queue, dont en y a
deux grans et une petite.
Item deux grans poctz de cuyvre, a cuyre viande.
Item cinq poctz de fer, a cuire viande, tant grans
que petis.
Item cinq grigles, tant grans que petites.
Item deux landiers de fer, a roustir.
Item quatre broches de fer, deux grans et deux
petites.
Item deux chenectz, estans en la cuisine.
Item en la chambre neufve , basse, par dessus
du pré, II chenectz, et deux aultres an la haulte
chambre.
lia liavenderie*
Deux grans pelles d'arain, tenant chacune viii
seillées d'eau ou environ.
Item deux aultres pelles, l'une tenant troys seil-
lées et l'aultre deux.
Item une mermite d'arain a faire chauffer eau,
contenant une seillée d'eau.
Wesselle d'EstaIng pour FOfflce.
Deux brocz.
Deux quartes rondes et une carrée.
Neuf tierces rondes et deux aultres rondes,
basses.
Troys pintes rondes, troys choppines et deux
potz sans couvercle.
Ung bassin a laver mains.
— 463 —
Le Eéinge qui a esté delessé pour Madame.
Quatre doubliers, dont en y a deux de v aulnes
de long et de v quartz de lé, a l'euvre de Venise,
et les deux aultres a l'euvre de Chappelez.
Item quatre paires de linceulx, dont en y a deux
paires de v toilles, de toille de Rains, une paire de
mi toilles et Taultre de troys.
Ce que n'a point esté inventorizé, qui a esté
delessé es lieux cy après deelerei.
PREMIEREMENT.
En la chambre neufve de dessus le pré a esté
delessé en la salle basse :
Ung banc de viii piez de long, lequel est a
rouglete.
Ung dressouer double, ferment a deux clefz.
Ung chaslit de couchete.
Une cheze et ung instrument pour tenir une
escrainne \
Item au hault de lad. chambre : deux chaslitz,
ung pour grant lit et l'aultre pour couchete.
Ung banc, table et tréteaux.
Ung dressouer doublCj ferment a deux clefs.
Une chesze a tresdoulx et une aultre couverte.
Troys escabaux.
J Escrainne : coffre.
— 164 —
SECONDEMENT.
En la chambre vert :
Ung dressouer a deux clefs.
Deux chenetz.
Ung banc de huit pietz ou environ.
Item deux petiz chesnectz en la chambre de
Jehanne de Bloys.
à
— 465 —
AUJOURDUY xï™e JOUR de décembre mil mi* Lxxvn,
A ESTÉ BAILLÉ EN GARDE , POUR LE COUVENT DU GrAND
MousTiER, A Madame du Grant Cellier, ce qui cen-
suiT :
Pr em 1er entent .
Une chambre de tapicerie a orengez ; c'est assa-
voir, ciel tresdolz, couverture, troys courtines et
cinq longs tapiz a tandre autour de la chambre.
Item six carreaulx de tapicerie, es quelx a en
ung chacun, ung pellican.
Item quatre banchers de sarge bleue.
Item ung ciel bleu, ouquel a ung ange et de
petiz oyseaux, garny de tresdoulx.
Item ung ciel vermail, garny de tresdoulx et cour-
tines et couvertures.
Item deux sarges de Can, vermailles, bien fort
longues.
Item ung ciel a bandes, de plusseurs couUeurs,
qui gueres ne vault.
Item deux escarlattes grandes.
Item ung tapiz bleu.
Item une piecze de sarge verte et une aultre
blanche.
Item quatres grans couvertures bleues, qui ne
rallent gueres.
Item deux carreaux de veloux noir.
Item deux carreaux de ostade noire.
Aultre Tapieerie baillée a la Seeretalne.
Deux careaulx de broderie sur veloux cramoysy.
— 166 —
Item deux aultres careaulx de veloux noir.
Item deux grans tapiz veluz et ung moyen.
Item ung ciel de saye, semé de fueillage et de
petiz serfz d'or, garny de tresdoulx, de goutieres
et de franges.
Item une pièce de veloux bleu, semée de fleurs
de lis d'or, servant d'ung tresdolz, et dedens le
timbre de Millan, de six letz et quatre aulnes de
lonc.
Item deux careaux de ostade noire.
Item deulx coûtes pointes de sandal tenné, telles
quelles.
Signé : Jean Chemin ,
Pour avoir esté présent audict Inventaire et
escript de ma main, du commendement et
es présences des Seurs et Frères susdits.
— 167 —
SENSUIT l'Inventaire des Livres appartenans a feue
Madame, qui estoient en ung Coffre en la Cha-
pelle DE SON Hostel.
Premier.
Une Bible en deux volumes, aux armes d'Orléans
etfermouers d'argent.
It. une aultre en parchemin, qui se nomme
losephus.
IL le Psaultier, glozé, en deux volumes couvers
de tappe de veloux rouge , fermouers' d'argent, aux
irmes d'Orléans.
It. ung livre de Vita Christi, ystoriez de deux
lystoires , couvert d'une chemise de cuir rouge.
It. la Légende des Saints, en pappier.
It. les OmeUes S^ Grégoire, en pappier.
It. la GoUacion des Pères, en pappier.
It. ung livre nommé le Chasteau périlleux, en
tarchemin.
It. ung aultre appelle la Cité des Dames, en pap-
ier.
It. ung de Maistre Jehan Sarton, ou sont des
armons de Saint Anthoine et plusseurs aultres , en
archemin, couvert d'une chemyse de cuir.
It. les Epittres et Euvangilles, en pappier, a
usaige de Paris, couvert de noir.
It. ung aultre livre en pappier, relyé, qui traicte
!i gouvernement de Maison.
It. la vie seur Collecte, en pappier.
— 168 —
It. ung petit livre ou sont les Eppitres et Euvan-
gilles de l'an, en parchemin.
It. ung aultre en pappier, ou sont les Euvangilles
et Eppittres de Caresme.
It. ung sermon de la Circoncision, en parchemin.
It. ung aultre, de S^® Marguerite, qui se com-
mance Simile est regnum celorum.
It. ung de la Magdalaine, qui se commance Maria
stabat.
It. les OmeUes de S^ Grégoire, en pappier et
cayers.
It. ung cayer de parchemin , qui se commance
Charité me contrainct.
It. ung aultre livre en parchemin, de Mande-
ritte *.
It. la Vie S^ François, en pappier.
It. l'Exposition de Missis , le Bien commun , et
ung aultre Disputacion, tout en ung pappier. i
It. ung livre de pappier ou est partie de la Pas-
sion et la Vision Tondal. I
It. ung livre de parchemin, ou sont les vu Ar-
ticles de la Foy. i
It. ung livre appelle le Chasteau périlleux, eà
pappier •. i
* Mandrite : religieux solitaire qui habitait une mandre ; c»^
nobite; anachorète, etc.
' Dans le Catalogue des manuscrits de la Biblioth. im/i
p» 44, no 445, nous voyons l'indication de deux ouvrages
» titulés : « Le Chasteau périlleux , compilé et ordonné d'i
» moyne de Tordre Chartreuse pour un nonnain de l'ordre
» Fontevraulx , » commençant par : <( A sa chiere cousine, sui
» et amye en Dieu, Rose, frère Robert, vostre cousin »
finissant par : « Nous puissions veolr l'un l'autre a grant ooi
— 469 —
It. le livre de Matheolule, qui se commanse
Tristis est anima mea, en pappier.
It. ung livre en pappier, en rime , qui parle de
la Joie de Paradis et des Peines d'Enfer.
It. unes Heures de Nostre Dame, enfranczoys,
hystoriées, relyées, fermantes a fermouers d'argent
doré.
It. unes aultres petites Heures a Tusaige de Fon-
tevrault, fermans a fermouers d'argent doré.
It. ung petit livre d'Oroisons, relyé.
It. ung aultre livre relyé, qui se commanse Amis
a toy donne confort ; en parchemin.
It. ung aultre relyé, qui est escript en parche-
min, ou sont les Dix Commandemens de la Loy.
It. ung petit livre de Maistre Pierre de Luxam-
bourt, en pappier, couvert de parchemin.
It. ung livre appelle les Seulz Paroles S^ Augustin,
en parchemin, couvert d'une simple couverture.
It. ung livre relyé^ escript en parchemin, appelle
l'Issue d'Egipte, avec les xii Fruiz Tribulacion.
It. ung aultre grand livre relyé, escript en par-
chemin, qui s'appelle les Méditations S^ Bernard,
îvec plusseurs aultres petis Traictez ensemble.
It. ung aultre livre relyé, escript en pappier,
mquel a plusseurs chappitres de l'Orloge de Sa-
lience, fermant a aguillettes.
It. ung aultre livre en pappier, relyé, parlans sur
paignie de noz amis. Amen. » (Vélin, miniatures, lettres ornées ;
ve siècle ; anc. 7034.) — Le même manuscrit, sur papier fm, du
v« siècle, au n° 1055, page 176, pourrait bien être celui cité
ms le présent Inventaire.
10
— 470 —
Boesse, de Consolacion, couvert d'une chemyse de
toille.
ït. ung aultre livre en parchemin, relyé, appelle
Sermons. •
It. ung aultre gratit livre relyé, couvert de cuir
blanc, escript en parchemin, qui se commanse
Endementiers *.
It. ung petit livret de parchemin relyé, couvert
de blanc, appelle le Calendier de la Royne.
It. ung aultre grant livre de parchemin relyé,
couvert de blanc, qui commanse Sitost que par ses.
It. ung livre relyé, escript en parchemin, couvert
de cuir vert, appelle Boesse, de Consolation.
It. ung aultre Uvre en parchemin, relyé, duquel la
couverture ne vault riens, appelle JuUus César.
It. ung livre de Balades, qui sont de devocion.
relyé, escript en parchemin.
It. ung aultre livre relyé, en parchemin, qui ne
ferme poinct, qui se commanse Qui saige est.
It. ung cayer de pappier, ou est l'Echelle de
Charité.
It. ung aultre petit livre relyé, en parchemin,
qui ne ferme poinct, qui se commanse gloriousf'
Trinité.
It. ung aultre petit livre en pappier, couvert île
parchemin, appelle Thobie, translaté en franczoys.
It. ung aultre livre en pappier, sans couverture,
qui s'appelle le Pastoral S^ Grégoire.
It. ung aultre livre en pappier, couvert d'un;:
* Endementiers : cependant, tandis que, sur ces entrefaites.
— 17i —
couvercle dur, fermant a aguillettes, appelle
Chaton.
It. ung Psaultier avecque les Hymnes.
It. ung aultre livre en pappier, couvert de par-
chemin, fermant a une aguillette, oaquel sont les
leczons de Vigilles, en franczoys, et plusseurs
aultres petiz Traictez.
It. ung petit Traicté en pappier, couvert de par-
chemin, ou est TEschalle de Charité.
It. ung livre en pappier, couvert de parchemin,
qui se commanse A Romme eut jadis ung empereur.
It. ung aultre petit Uvret en pappier et relyé,
couvert de rouge, fermant a aguillettes, appelle le
Mortifiment de vaine plaisance.
It. ung aultre Traicté en pappier, couvert de par-
chemin, qui s'appelle Facet, en franczoys.
It. ung aultre en pappier, couvert de parchemin,
fermant a ung lacz de cuir, qui commanse A tous
ceulx qui ce dit oïront.
It. ung aultre en pappier, appelle l'Adresse de
Povreté et de Richesse.
It. ung aultre qui se commanse Mesdames et mes
Damoiselles, couvert de parchemin.
It. la Vie de Madame Ysabeau de France, en
pappier, couvert d'ung parchemin dur.
It. ung aultre petit Uvret non parfait, a dictz, a
Mademoiselle Jehanne de Laval.
It. la Vie Saincte Pôle, en parchemin, couverte
de parchemin.
It. ung Traicté en pappier, non couvert, ou sont
[es leczons de Vigilles, en franczoys.
— 172 —
It. ung aultre livre en parchemin, relyé, fait sur
les XII Patriarches.
It. ung aultre Traicté en pappier, qui s'appelle
de Sapientia
It. ung aultre petit Traicté, de l'Exultation Letalu s.
It. plusseurs aultres petiz Traictez en pappier,
esquelz sont Oroisons.
Livres Mouveaux.
Le livre de Vita Christi, partie en parchemin et
Taultre en pappier, relyé, couvert de cuir rouge,
fermé et cloué.
It. la Règle S^ Gerosme, en parchemin, cou-
verte de veloux gris.
It. ung aultre livre en pappier, relyé', couvert
d'une hosse de cuir blanc, appelle Rethoricque.
It. ung aultre petit, en parchemin, relyé, couvert
de cuir rouge, de l'exposition Deus misericordîe.
It, ung aultre livre dé pappier, couvert de par-
chemin, appelle le Dialogue et quadrilogue Maistre
Alain Ghartier.
liivres donnei par feue Madame.
Ung livret de parchemin, couvert d'une chemise
de cuir, de la Vie Nostre Seigneur.
It. l'Eschalle de Gharité, en pappier.
It. ung aultre de parchemin, appelle d'Oroison.
It. les OmeUes S^ Grégoire, en parchemin.
It. le Livre des Anges, en parchemin.
It. la GoUalion des Pères, en parchemin.
— 173 —
It. ung sermon de S^ Jehan euvangeliste, en par-
chemin, qui se commanse Sub ombra illius.
It. ung de Maistre Jehan Jaosson, de parchemin,
qui parle des Commandemans.
It. la Passion, en parchemin, sur les iiii Euvan-
gelistes; par cayers.
It. ung petit livre d'Oroisons, en latin, fermouers
d'argent doré, aux armes de Bretaigne.
It. le Livre de Sapience, en pappier, couvert de
vert.
It. le Livre des Troys Voies, en parchemin, et
plusseurs aultres Traictez avec^ couvert d'une che-
mise de cuir et fermouers aux armes de Madame.
It. preste au prieur de S^ Michel les espittres des
Wvans.
It. preste a f® Jehan Selles, la Montaigne de Con-
iamplacion, que il a perdue.
It. XII aultres Uvres, que caiers, que reliez entre
ieux aisz, le tout en parchemin.
It. ung grant mapemonde *.
* Angers, Archives de Fontevrault. Copié sur l'original.
Fin de l'Inventairb.
10^
ÀLIÉNOR DE BRETAGNE.
Il n'y eut pas que Marie de Bretagne qui fut géné-
reuse pour Fontevrault , presque toutes les autres
abbesses eurent à cœur de lui laisser, en mourant,
la preuve de leur profond attachement. Ces legs
faits en partie pour avoir droit à un anniversaire
étaient quelquefois très-considérables ; aussi s'em-
pressait-on de les inscrire avec orgueil dans le Né-
crologe de l'ordre, à la suite de l'éloge du donataire.
Nous ne pouvons , on le conçoit , citer tous les
objets précieux ainsi légués. Nous nous contenterons
seulement de faire connaître, par la traduction
littérale d'un titre latin, ce que laissa à l'abbaye, en
1342, une autre princesse de Bretagne, Aliénor,
seizième abbesse de l'ordre * .
€ On feroit (dit Nicquet) une histoire de ses bien-
j> faits, si grand en est le nombre ; comme on peut
* Aliénor était fille de Jean II, duc de Bretagne, et de Béatrix,
fille d'Henri III, roi d'Angleterre. Béatrix mourut à Londres, en
1277 ; « son cœur fut apporté à Fontevrault et mis au commun
» tombeau des Roys. » '-— Aliénor, sixième enfant du duc Jean
et de Béatrix , petite-fille de la fameuse Aliénor (si généreuse
pour Fontevrault , où elle fut enterrée), naquit en Angleterre,
Fan 1275 ; elle prit le voile dans le couvent d'Ambresbury, y fit
profession âgée de seize ans , puis vint à Fontevrault, dont elle
fut élue abbesse vers 1304. Elle mourut en 1342 , dans sa
soixante-septième année. (Nicquet, Hist deFontevr, — Sainte-»
Marthe. — «SaiM^ç-JTamiWe, t. III.)
— 176 —
» le voir en son éloge , qui est seul capable d'im-
» mortaliser la mémoire de cette très-digne ab-
» besse. »
Objets Divers.
Elle donna et assigna :
Quarante livres de monnaie forte aux sœurs et
aux frères de son monastère , pour faire chaque
année son anniversaire.
Un coffret en forme de navire , ferré d'argent ,
plein de reliques.
Une croix d'or, avec un pied d'argent et des
pierres précieuses ; il y a dedans de la vraie croix ;
estimée 700 livres.
Une coupe d'argent et de cristal , où sont des
reliques de S" Agnitariae (ou Aquitariae).
Un reliquaire de cristal, avec un couvercle d'ar-
gent, où il y a du sang de N. S. Jésus-Christ \
La coupe et le plat dans lesquels fut opéré à Fon-
tevrault le miracle du saint sang , et qui conservent
encore du sang du Seigneur; plus une cuillère
et un petit couteau '.
Quinze anneaux d'or avec des pierres précieuses^
et quatre autres pierres précieuses montées sur
argent.
* Ce reliquaire, qui contenait le saint sang du miracle^ fut
refait par Marie de Bretagne ; il pesait 41 marcs. {Sainte-¥i\-
mille, p. 513.)
* En 1304 , pendant la première année du gouvernement
d'Aliéner, sœur Marguerite de Chamblois ayant reçu de sa mère
un morceau de la vraie croix , eut l'idée, le Vendredi-Saint, de
placer, en présence des sœurs Jeanne de Maguil et Hucdeline
— 177 —
Trois chapelets d'or, dont un vaut.. 100 livres.
Un bâton pastoral en argent , dont le sommet ou
crosse est d'or; estimé. . . . . . 700 livres.
Quatre bassins d'argent doré, dont deux sont aux
armes de Bretagne, les deux autres unis.
Une pinte et deux vinaigriers d'argent.
Quatre chandeliers d'argent.
Deux encensoirs d'argent, avec navette et cuillère.
Un navire de perles, orné d'argent.
Une coupe d'argent et de cristal , avec un pied
d'argent.
Une coupe de perles émaillée, avec un couvercle
d'or. — Aliénor prescrivit de porter, cHaque année,
cette coupe à la procession de l'Epiphanie.
Un petit pichet d'argent.
Un vase de pierre précieuse ou de pierre dure,
pour porter le corps de Jésus-Christ.
Une lanterne d'argent.
Une coupe d'autruche, ferrée d'argent.
Quelques chapelets de grains odoriférants, garnis
d'argent doré.
Un pichet d'émail, estimé. . . . 100 livres.
Une saUère d'argent, émaillée et dorée, du poids
de 5 marcs.
Un petit vase de cristal, contenant des reliques
de Vemois, sous-prieure, cette relique dans un vase plein d'eail
bénite. Ce vase fut porté dans le chœur de la grande église ; alors
on vit sortir des extrémités de ce morceau de bois « une liqueur
h de couleur de sang; elles asseuroient fermement estre vray
•» sang , comme s'il sortoit de la veine d'un homme incizé. »
CNicquet, p. 454.) — Ce miracle prit le nom de Miracle du
^aint sang et fut fort vénéré à Fontevrault.
— 178 —
de la B. Marie et des SS. Thomas de Cantorbery et
Edmond.
Un vase d'argent pour l'eau bénite, du poids de
2 marcs 1/2.
Manuscrits.
Deux paires de Bréviaires, dont un petit, avec
des fermoirs d'argent en trois endroits.
Un Missel doré, avec fermoirs d'argent.
Deux Psautiers, dont l'Un est doré dedans et
dehors.
Un Collectaire.
Une histoire de la Vie des Pères, garnie d'argent.
Deux Graduels.
Deux Antiphonaires.
Un livre de la B. Marie.
Etoffes et Tapisseries.
Quelques parements faits pour un grand autel,
tous aux armes d'Angleterre, dont un avec cour-
tines.
Un grand parement pour un autel, aux armes de
France.
Quatre pièces, façon tapisserie, pour orner les
côtés d'un autel.
Un grand rouleau tissé et garni de fils d'or
de Bellomonte, et iexix autres rouleaux de sain>ii
rouge, garnis de plumes dorées ; un autre rouleau
onde et tissé d'or*.
4 Martyrologe de Fontevrault^ Sainte- Famille, p. 513.
BIBLIOTHÈQUE.
Comme on l'a vu, l'ordre avait déjà, en 1477, de
nombreux manuscrits dont quelques-uns très-rares
et très-curieux ; tous , cependant, n'ont pas été
cités dans Y Inventaire de Marie de Bretagne ; le
couvent en possédait d'autres :
1° Un cahier relié, couvert en parchemin, de
159 feuillets, donnant les Statuts du B. H. Robert
d'Arbrissel *. Ce recueil, attribué à Geoffroy de
Vendôme ', fut nommé la Gauffre *, du latin Goffri-
dus [Geoffroy] ;
2° Un manuscrit intitulé : Modèle du style, par
Jean de Crète *. Cet ouvrage renfermait un modèle
de presque tous les actes dont l'abbaye pouvait
avoir besoin, et j'affirme qu'il n'était pas le modèle
* Trésor de Fontevrault, 1. 1, p. 16.
' Geoffroy de Vendôme, ami de Robert d'Arbrissel et auteur
incontesté d'une des fameuses lettres relatives à ce dernier, et
qui fit tant de bruit.
* Mathurin Soriz, Dissertât, apolog., p. 87.
* Jean de Crète, secrétaire d'Isabelle de Valois, dix-septième ^
âbbesse, morte en novembre 1349. Ce moine, ancien doyen de
Gascogne, fit de grandes largesses à son ordre. l\ fonda à per-
pétuité une messe de Notre-Dame à Saint-Jean-de-l'Habit et lut
enterré devant l'autel de la sainte Vierge. [Invent, des titresi
t. VIII, p. 479.) Isabelle de Valois eut toute sa vie pour son
:onfesseur-secrétaire la plus vive afiection ; le père Lardier dit
ïu'en 1650 « il y avoit encore dans l'église de Saint-Jean-de-
I l'Habit un grand tableau où elle est dépeinte selon l'habit
— 480 -
du style élégant. Le père Lardier l'a copié dans un
de ses volumes.
3° Un grand livre contenant la Légende d'or en
français, par Jacques de Voragine \ Richement '
historié et aux armes de la donataire, Marie de Mont- i
morency, il était enchaîné^ d'après les ordres de
cette abbesse, au miheu du chœur du grand monas-
tère, où par sa lecture il s'ervait à l'édification des
reUgieuses *.
La bibliothèque de Saint-Jean-de-l'Habit va
prendre, à partir de xvii® siècle, un grand déve-
loppement ; elle contenait déjà, dit le P. Jean
Lardier en 1650, « quantité de bons livres, dont
D une partie avoit esté donnée par M® Nicolas
i> Boschard', docteur. »
En effet Louise de Bourbon de Lavedan , en
» qu'on porloit en ce temps-là, avec ses armes tout autour, ayan*
» devant soy une image de sainte Catherine, et de l'autre coté
» dud. tableau est le portrait de Jean de Crète, son confesseuj.
B conseiller, secrétaire, devant un saint Jean-Baptiste.» {Sainte-
Familley t. III, p. 457.) — Où est ce précieux spécimen de lart
de peindre au xiv« siècle ?
* Jacques de Voragine, dominicain, né à Varraggio (Italie,
vers 1230, mort en 1298.
* Nécrologe de Fontevrault, Sainte-Famille, t. 111, p. 18.
^ Nicolas Boschard , docteur en théologie, inquisiteur de l.i
foi , abbé de Sully , fut pendant vingt-cinq ans confesseur dt-
Louise de Bourbon et d'une partie des religieuses de Fonte\Tauît.
Il se trouvait au chapitre de cette abbaye le 3 juin 1535, lors df
l'élection de cette abbesse, et fit ce jour-là une exhortation auv
religieuses ; quelque temps après, il assista le cardinal de Bour-
bon lorsque ce prélat vint bénir sa sœur, la nouvelle élu»\
Nicolas Boschard mourut le 25 juin 1558. (Martyrologe de Font*'-
vrault, Sainte -Famille, t. III, p. 680. — Biblioth. imp., CartvL
de Fontevrault, t. II, fo 373.)
-484 -
IG32, à la prière du grand prieur François Ber-
thelot *, autorisa son médecin. M® Texier S à ache-
ter pour Fontevrault la bibliothèque du sénéchal
de Saumur, et ce au prix de 4,500 livres. Sa coad-
jutrice, Jeanne-Baptiste de Bourbon, après avoir eu
soin d'embellir ce dépôt, Tenrichit de nombreux et
riches volumes, entre autres « des œuvres du divin
» Thomas d'Aquin \ » L'archiviste * de l'ordre sous
le gouvernement de cette abbesse, laissa en mou-
rant (1664) soixante et onze volumineux în-folio,
tous, hélas ! aujourd'hui perdus, sauf huit qui se
trouvent aux Archives d'Angers et quelques autres
dispersés çà et là. En Usant à la page 425 du tome II
(le cette collection^ le Catalogue de ces soixante et
onze manuscrits, on est pris de tristesse en voyant
tant de richesses historiques à jamais perdues ,
mais on éprouve un véritable sentiment d'admiration
pour leur auteur, qui, le croira-t-on, eut la modes-
tie de n'en faire imprimer aucun, sauf une apologie
1 François Berthelot, grand prieur de Saint-Jean-de-rHabit
d'août 1630 à 1638, « vir sanctus, cujus corpus servari adhuc
I) incorruptum testatur. » En 1628 il était confesseur de Jeanne-
Baptiste de Bourbon, alors coadjutrice, ei l'accompagna aux
îaux de Forges. H fut son vicaire pour la province de France.
[Callia Christ. — Sainte-Famille, t. III, p. 679.)
* Texier, médecin de Louise de Bourbon; elle lui donna place
lans son conseil. {Trésor de Fontevrault^ 1. 1, p. 196.)
3 Nécrol. de Fontevrault.
♦ Jean Lardier, né à Châteaugontier le 25 novembre 1601 ,
pttort en novembre 1661 ; il ne dormait qu'une nuit sur trois, ce
li explique comment il a pu écrire soixante et onze volumes ,
resque tous in-folio, et la plupart de 1,000 à 1,200 pages. (jBio-
'aphie Didot. — Hist, du Mairie^ de B. Hauréau. — Archives
le Fontevrault.)
11
L
5-.
du B. H. Robert d'Arbrissel dans les Bollandistes.
a
La bibliothèque de Fontevrault, avec ses nom-
breux et précieux manuscrits, ses livres rares venus
de différentes sources , avait une véritable réputa-
tion ; aussi l'auteur de la Vie de Robert d'Arbrissel
la cite-t-il avec orgueil et peut-être avec un peu
d'exagération : « Cette belle bibliothèque de Fonte-
» vraud , qui est à présent si renommée dans toule
» l'Europe , et qui est véritablement une des mer-
3> veilles de la province d'Anjou *. »
* Balthasar Pavillon, prêtre, né à Saumur le 12 janvier 16'2i\
En 16j6 il fut chapelain de la chapelle du Saint-Esprit, dans
l'église Saint-Pierre de Saumur ; en 1657 , prieur de Saiut-
Pierre de Bagneux (Anjou); en 1659, prieur de Denée (Anjou^
n mourut à Fontevrault, dans une maison appartenant à l'abbaye,
vers 1682, étant prieur de Velort (diocèse de Poitiers). Pavillon
fut aumônier du roi ; il publia son histoire de Robert d'Arbrii
sel en 1666. Nous avons trouvé aux Archives d'Angers son
testament , auquel nous empruntons le passage suivant, qui
jette, avec les faits inédits ici rapportés, quelque jour sur h
vie de cet écrivain de mérite, jusqu'alors oublié par les bio-
graphes :
a J'ordonne, sous le bon plaisir de Madame l'xXbbesse de ce
9 lieu, que mon corps soit enterré près le tombeau du B. H. R.
» d'Arbrissel, instituteur de cette abbaye. Et pour le service
» qu'on pourra faire pour moy, j'ordonne qu'il soit payé U
» somme de 60 livres Et pour contribuer autant qu'il e>t
» en moy à la béatiffication du B. H. Robert, je donne le lie!-^
» de mes propres au couvent de Fontevrault J'ordonne d»»
T> plus que toutes celles des dames de Fontevrault qui voudro! I
9 avoir la Vie du B» Robert^ le sieur Ernou, libraire, leur «ri
9 donne un exemplaire relié en parchemin, en luy payant doiut
9 solz pour la reliure. »
Nous possédons six pages du manuscrit de Pavillon <jui ser\ i
à l'impression de cet ouvrage. (Louis Raimbault, Répertoi.v
archéol. de l'Anjou, — Etude de Me Roullaud , notaii*e
Fontevrault. ~ Angers, Archives de l'abbaye.)
— 183 —
Cette merveille fut l'objet de tous les soins des
abbesses qui succédèrent à la fille d'Henri IV, et
notamment de la docte Gabrielle de Rochechouarl
et de sa nièce Louise-Françoise.
La sœur de Madame de Montespan, une des
femmes les plus savantes de son temps , comme
nous l'avons dit \ était , on le voit dans ses lettres ,
en rapport avec les plus célèbres libraires de Paris,
qui lui adressaient ce qui manquait à son riche
dépôt. Elle mettait même à contribution les grands
esprits du siècle, heureux et flattés de lui être
agréables en lui envoyant leurs œuvres. Voici ce
qu'écrivit le bénédictin Dom Martène, visitant l'ab-
baye quelques années après la mort de cette reli-
gieuse :
< Nous passâmes le reste de la journée à voir la
> bibliothèque, qui est très-grande et bien remplie
i> de livres ; on y voit quelques manuscrits dont les
1 Nous possédons plusieurs beaux portraits de cette charmante
femme, un entre autres où elle est représentée assise sous un
bosquet des jardins de Tabbaye ; et pour y rappeler, sans doute,
qu^elle parlait la langue de Cicéron, elle a fait tracer à ses pieds
ce distique d'Horace, dont elle tient en main les œuvres :
nie terrarum mihi praeter omnes
Angulus ridet (Livre II, ode vi.)
Ceci doit paraître un peu prétentieux, mais cette petite vanité
de savante lui est tout aussi pardonnable que celle qu'elle tira
toujours de sa haute naissance. Quoique religieuse, jamais on
ne la vit oublier sa noblesse, même dans les choses ordinaires
de la vie. C'est ainsi qu'elle possédait, timbré à ses armes, un
service de table dont nous avons retrouvé une assiette de faïence
de Ne vers, sur laquelle on les voit figurées avec tous les attributs
abbatiaux.
— 484 —
» plus curieux sont des Heures qu'on croit avoir
> servi à un duc de Bretagne, écrites en lettres d'ar-
ia gent sur du talque , dont toutes les marges sont
> ornées de vignettes et de mignatures très-deli-
3> cattes; et le Bréviaire de Madame Renée de
D Bourbon, reformatrice de l'Abbaye, qui lui avoit
> été donné par le cardinal de Bourbon *. »
En 1790 un rapport dressé après un inventaire
fait par la municipalité de Fontevrault, présidée par
le citoyen Alexandre Guerrier', maire, ancien moine
de l'ordre et ancien curé de la paroisse , va nous
faire connaître le local et le nombre des livres qui
1 Voyage littéraire, II* partie, pp. 3 et 4.
' Cet ancien religieux, qui avait été un exemple de verta
pendant tout le temps qu'il exerça les fonctions sacerdoliilet,
eut la faiblesse, nous n'osons dire la lâcheté, de signer la décla-
lation "suivante : « Au nom de la République française, une et
)» indivisible, je soussigné déclare que j'abdique solenneUemeni
» toutes les fonctions du ministère du culte à Fontevrault, daiij
» toute l'étendue de la République et dans tout l'univers, et celi
s au dégoût que j'en ressentais depuis plusieurs années, dégoûl"
» que j'ai manifesté et repété continuellement ; dégoût enfmqui
s contrariait cruellement mes sentiments patriotiques et mf>
» sentiments républicains, que j'ai fortement déployés dès le
» berceau de la révolution, et qui ont concourus, j'ose le dire
» authentiquement, à élever les esprits et le coeur de mes comi-
• toyens Je dépose en conséquence, sur le bureau de h
» municipalité, tous les titres et institutions qui m'avaioiit
» revêtu de la qualité de curé de cette commune, que j'exerçais
» depuis 1785
» Je déclare en outre vouloir acquérir une petite portion «le
j» biens nationaux, afin de me livrer antièrement à l'agricultun*,
» et surtout à disséminer de plus en plus le républicanisme dont
» je me sens embrasé. Je déclare, enfin, que quoiqu'affublé tio
» plus de 46 ans, je vais m'empresser de trouver une compa^iï''
» avec laquelle je puisse, sous les auspices de la Républiqu(\
— 185 —
s y trouvaient encore; beaucoup avaient été déjà
soustraits, chacun les emportant selon son bon plai-
sir ; des frères mêmes de Tordre ne se firent pas
faute d'en enlever , sans doute comme souvenir de
la retraite qu'ils allaient bientôt quitter.
« Nous sommes montés dans une grande biblio-
ï thèque étant dessus le porche en la longueur
* d'environ 50 pieds sur 15 de large, dans laquelle
ï s'est trouvé environ 4,000 volumes non suivis ,
» de différents auteurs grecs et latins mutilés et en
3 fort mauvais état , étant dans des cases en bois
» non fermées, de hauteur d'environ 9 pieds, gar-
y> nies de haut en bas.
3> Au-dessus desquelles cases se trouvent 28 ta-
î bleaux servant de frontispice.
» Plus une sphère, deux globes.
» Qui est tout ce qui se trouve dans la grande
» bibliothèque.
» De la nous sommes entrés dans une autre petite
> bibliothèque, attenante à celle ci-dessus, dans
2> laquelle s'est trouvé 1500 volumes, tant grands
» filer le charme de mes vieux jours
» A Fontevrault, le septidi de la première décade de frimaire,
» l'an second de la République une et indivisible.
Signé : v Alexandre Guerrier ,
■ ci-devant ministre du culte à Fontevrault et
• ci-devant religieux de Fontevrault. a
(Mairie de FoDlevraoït, Registre des délibérations du conseil de la commune^
folio 99.)
Ce triste document prouve que ce qu'il y a de plus rare, même
chez les natures les plus honnêtes, c'est le caractère I
41*
- 186 —
» que petits, contenant : Un Atlas défiguré^ le Die-
» tionnaire de Moréri, celui de Trévoux, la collec-
» tion des Conciles, la Bibliothèque des Pères,
» l'Histoire ecclésiastique , l'Histoire des auteurs
» modernes ecclésiastiques et une infinité d'aulres
» ouvrages de piété non suivis ^ »
En 1792 l'administration du -district, après en
avoir fait conduire à Saumur « la majeure partie et
» la meilleure, vouilant mettre fin à la dilapidation
» qui se faisait journellement, » fit vendre tout ce
qui restait de livres, ainsi que les boiseries et les
tablettes des rayons. Le tout fut adjugé aux
citoyens Prouteau, Maudit, Baudoin le jeune, Lirel
et Desparenches, la somme de 230 livres *.
Nous avons vu, nous possédons même, quelques
volumes qui faisaient autrefois partie de la biblio-
thèque de Fontevrault; presque tous sont riche ment
reliés et portent souvent les armoiries des abbes-
ses. La BibUothèque impériale en a plusieurs aux
armes des Mortemart ; celle de la ville d'Angers est
propriétaire d'un beau Platon portant l'écusson de
M"™® Gabrielle de Rochechouart. Enfin un négociant
d'Angers a pu acheter un superbe volume également
* Mairie de Fontevrault, Registre des délibérations,
* Extrait des Procès-Verhatix de la vente des meubles d**
l'abbaye^ en i792 et i793, manuscrit propriété de Fauteur. Vu
de nos amis dont le père habitait le monastère de Fontevrault
au moment de la révolution, nous affirme que les Pères grec?*
qui étaient destinés à la bibliothèque d*Angers, furent chargé»
sur un bateau à Montsoreau, mais qu'entre ce port et Saumur
un coup de vent ayant fait chavirer l'embarcation, ce fut la Loire
qui eut en partage^cette riche collection.
armorié et ayant appartenu à Tabbesse Jeanne-
Baptiste de Bourbon ; etc., etc.
Il ne reste plus rien, actuellement, du couvent de
Saint-Jean-de-l'Habit, qui contenait ces riches bi-
bliothèques. Vendu et démoli pendant la révolution,
aucun vestige n'en est demeuré qui puisse indiquer
au voyageur l'endroit où fut la retraite des moines
de cet ordre si puissant. Bâti à peu près en même
temps que le Grand-Mouliers, il contenait cepen-
dant des monuments dignes de fixer l'a^ttention des
archéologues ; l'église, surtout, était un beau spé-
cimen de l'architecture du xii® siècle. Plus heureuse,
l'abbaye échappa à la pioche des démoUsseurs,
grâce peut-être à la destination que lui donna dés
l'abord le gouvernement ; mais malgré la transfor-
mation de presque tous ses monuments on peut
encore, à l'aide de documents inédits ou imprimés,
lui restituer en partie son caractère primitif.
Lorsque mu par le désir de connaître le passé,
on pénètre aujourd'hui sous les cloîtres de cette
antique abbaye, on est pris d'un serrement de cœur
involontaire. Sous ces cloîtres — où pendant près de
sept siècles de nobles et pieuses femmes, victhnes
quelquefois d'une législation barbare, promenaient
leurs longs vêtements blancs et montraient aux
visiteurs privilégiés leurs visages rayonnants de
paix et de sérénité — sous ces cloîtres circulent
maintenant des hommes couverts de la sombre
livrée du crime, mais frappés ceux-là par une loi
juste et équitable. Religieuses et détenus eurent
toutefois un point de ressemblance, un seul, imposé
il"
— 188 —
par la Règle et les Règlements : robligation de
vivre silencieux.
Ah ! si le fondateur^, si Robert d'Arbrissel ,
rhomme à l'âme ardente , au cœur plein de feu , à
la bouche éloquente, pouvait un moment pénétrer
dans « son cher Foiitevrault, dans son parterre de
r> lys, » indigné, il s'écrierait comme l'apôtre saint
Luc : « Ma maison était une maison de prière^ et
» vous en avez fait une caverne de voleurs. >
FIN.
Nota. — Nous prions ceux de nos lecteurs qui
posséderaient ou connaîtraient des documents relatifs
à Fontevrault, de vouloir bien nous en donner avis,
désirant continuer nos travaux sur ce célèbre monastère.
-189-
FAC-SIMILE
s si|iiatiires dès Abbesses citées dans ce voluin.e.(l]i
^
^
I
O-
^Hi^i
'<onpz.
^^^
M
\^
^^ ifrfeÏ3e^ûm4op
(l) 11 ne nous a pas été possible de trouver la si^natr
de Marie de Bretagne.
^
1
^
'^
1
î
"H {
TABLE DES MATIÈRES.
CHAPITRE 1er.
Marie de Bretagne : État de quelques prieurés en
1209 et en 1460, p. 11. — Guillaume de Bailleul, p. 13.
— La Madeleine-lez-Orléans, p. 17. — Sainte-Marie de
Vega, p. 22. — Fontaine-en-France, p. 22. — Chaize-
Dieu, p. 23. — Acte fait après la mort de Marie de
Bretagne, p. 25.
Anne d^OrUans : Prieurés situés en Angleterre. —
Lettre de Charles VI à Richard II, p. 29. — Lettre de
la reine Philippe, p. 31.
Renée de Bourho^ : Saint-Michel, p. 24. — Émeute à
l'abbaye, p. 36. — Renée fait vœu de clôture, p. 39. —
Émeute à Saint-Jean-de-l'Habit, p. 39. — François 1er à
Fontevrault, p. 41. — Blessac, prieuré, p. 44. — En-
quête faite à Blessac, pp. 44, 45, 46, 47, 48. — Mort
de Renée; son épitaphe, p. 49.
Louise de Bourbon : Lettre de Louise à François le*",
p. 50. — Bénédiction de cette abbesse, p. 51. — Marie
Stuart à Fontevrault, p. 53. — Milly, p. 53. — Désor-
dre dans le prieuré de la Madeleine-lez-Orléans, p. 54.
— Lettre du cardinal de Bourbon, p. 55. — Dévastation
des prieurés de l'ordre, p. 57. — L'abbaye de Fonte-
— iU —
vrault assiégée, p. 57. — Salle du chapitre reconstruite
par Louise, p. 58. — Réparations modernes faites à
cette salle par M. l'abbé Christaud, p. 59.
Eléonore de Bourbon : Le prieuré de Prouillé, p. 60.
— Eléonore élue prieure de Prouillé, p. 61. — Lettre
de Charles IX au cardinal de Ferrare, p. 62. — Lettre
de Catherine de Médicis au duc de Toscane, p. 63. —
Eléonore coadjutrice, p. 63. — Faveurs accordées à
Fontevrault par Henri III, p. 64. — Boubon, prieuré,
p. 65. — Largesses d'Eléonore, p. 66. - Détresse de
l'abbaye, p. 66. — Eléonore et son neveu Henri de Na-
varre, p. 67. — Lettres d'Henri à sa tante, pp. 67, 68, 69.
— Henri visite Eléonore; relation de son séjour à Fonte-
vrault, p. 71. — Eléonore obtient d'Henri IV la grâce
d'un faux ermite, puis la rentrée des Jésuites en France,
p. 73. — Elle empêche les Jacobiii!& d'être expulsés du
royaume, p. 74. — Par son influencé, le P. Joseph peut
établir à Saumur un couvent de Capucins, p. 74. — Opi-
nion du cardinal Baroniuâ sur cette abbesse, p. 75*
Antoinette d^Orléans : Elle accepte malgré elle la
coadjutorerie, p. 76. — A la mort d'Éléonore, elle se
retire dans un cloître, p. 77.
Louise de Bourbon de Lavedan : Arrivée de Richeliea
à Fontevrault, p. 78. — Lettre de Marie de Médicis aui
religieuses, p. 79. — Election de Louise de Lavedan,
p. 79. — Lettre de Marie de Médicis, p. 80. — Louise
force ses filles à vivre en commun, p. 82. — Lutte d'An-
toinetle d'Orléans et de Madame de Lavedan, à propos de
la création de l'ordre du Calvaire, pp. 83, 84, 85. —
Lettre de Guillaume, évêque d'Angers, p. 86. — Acquies-
cement de Louise à la fondation du Calvairey p. 86. —
Fondation d'un séminaire à la Flèche, p. 87. — Res-
— 195 —
tauration des prieurés de Sainte-Croix, Sainl-Aignan et
Montmère, p. 88. — Marie de Bourbon coadjutrice,
p. 88. — Tentatives pour faire réviser la règle, pp. 89
et 93. — Travaux exécutés par ordre de Louise dans la
grande église, p. 90. — Nomination d'une coadjutrice,
p. 91. — Lettre de Louis XIII, p. 91. — Arrivée de
Jeanne-Baptiste de Bourbon à Fontevrault, p. 92. —
Mort de Louise de Lavedan, p. 94.
Jeanne-Baptiste de Bourbon : Jeanne est légitimée,
p. 96. — Elle est élevée à Tabbaye de Chelles; saint
François de Salles se charge de son éducation religieuse,
p. 96. — Son caractère, p. 96. — Altercation avec le
président Mole, p. 97. — \isite de M"^ de Montpensier
à Fontevrault, pp. 98 et 99. — Nouveau cimetière des
rois à l'abbaye, p. 100. — Ouverture du tombeau de Ray-
mond, comte de Toulouse, pp. 101 et 102. — Jeanne
s'occupe de la canonisation du B. H. Robert d'Arbrissel,
pp. 103 et 105. — Lettre à M. Duchesne, p. 104. — Des
religieux quittent furtivement leur couvent, p. 107. —
Jeanne veut faire enlever un religieux récalcitrant,
p. 108. — Plusieurs moines désertent Saint-Jean-de-
l'Habit, p. 109. — Lettre du frère le Noir, p. 110. —
La lutte entre Jeanne et les religieux recommence, p. 112.
— Arrêt qui rend définitivement à l'abbesse son pou-
voir absolu sur les moines, p. 105. — Mort de Jeanne-
Baptiste de Bourbon, p. 118.
#ne Gabrielle de Rochechouart, p. 119. — Lettre à
sa sœur M™« de Montespan, p. 120. — Lettre à M"»® de
Maintenon, p. 121. — Lettre de M"»® Gabrielle à
Louis XIV, p. 122. — Réponse de Louis XIV, p. 124.
— Remerciements de l'abbesse au roi, p. 125. — Elle
traduit le Banquet de Platon, p. 125. — Racine revoit
cette traduction, p. 420. — £«^fter jouée dans l'abbaye
— 196 —
de Fontevrault, p. 126. — Fragment de sa traduction
de V Apologie de Socrate, p. 127. ~ M. Pierre Clément
et son ouvrage sur cette abbesse, p. 128.
Louise-Françoise de Rochechouart, p. 129. — Lettre
de Louis XIV, p. 129. — Instructions données à la
prieure de Chaize-Dieu, p. 130. — Louis XY lui confie
réducation de ses filles, p. 130.
Louise^Claire de Montmorin : Lettre de Louis XV à
cette abbesse, p. 131. — Lettre de la princesse Sophie à
ses sœurs, p. 132.
Marie-Louise de Valence : Lettre de cette abbesse à
M. Chariot de la Croix, p. 133.
Julie- Sophie- Gillette de Pardaillan d'Antin, p. 133.
— Circulaire adressée à ses prieurés quelque temps avant
la Révolution, pp. 134, 135. — Sa mort, p. 136.
CHAPITRE II.
M. Paul Harchegay, archiviste honoraire du dépar-
tement de Maine-et-Loire, p. 137.
Inventaire de MdiTÏe de Bretagne, p. 137. — Margue-
rite Haudry, Marguerite de Brezé et Jeanne de Bonnaf-
faire, p. 139. — Jean Boucheron, — Chapelle-Saint-
Laurent, — Jeanne de Mancigny, — Église de Saint-
Benoît, p. 140. — Reliques et joyaux, p. 141. —
Argent comptant, p. 147. — "^Vaisselle d'argent et d'or,
p. 150. — Le prieuré de la Pignonnière, p. 151. —
La chapelle de Marie de Bretagne, p. 152. — Linge
ouvré, p. 155. — Tapisseries, p. 158. — Vaisselle
d*étain et d'airain, p. 161. — Inventaire des manus-
— 197 —
crits, p. 167. — Livres nouveaux, p. 172. — Livres
donnés par feue Madame, p. 173.
Aliénor de Bretagne^ p. 175. — Objets divers donnés
par cette abbesse à Fontevrault, p. 176. — Miracle du
Saint-Sang^ p. 177. — Manuscrits, étoffes et tapisse-
ries, p. 178.
Bibliothèque : Geoffroy de Vendôme, Jean de Crète,
p. 179. — Nicolas Boschard, p. 180. — François Ber-
thelot et Jean Lardiçr, p. 181. — Balthasar Pavillon,
p. 182. — Dons de M™« Gabrielle de Rochechouart, —
Visite de dom Hartène à la bibliothèque, p. 183. —
Inventaire de livres fait par Alexandre Guerrier, et
profession de foi républicaine de cet ancien moine, p. 184.
FaC'Simile des signatures des abbesses citées dans
l'ouvrage, p. 189.
Angers, imp. £. Barassé.
-^'
21. -J.
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